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Paris sous la plage

« Travaux Castor »-RER C pendant l’été. Sous les pavés, la précarité du transport public s’associe à celle du travail

Roland Darbant Comme chaque année, les travaux de rénovation des voix ferrées parisiennes s’intensifient en été : travaux sur la ligne C et la ligne A, les travailleurs qui n'ont pas la chance de partir en vacances payent le prix fort d'un temps de trajet allongé. Derrière le discours de « consolidation des infrastructures » qui voudrait leur faire avaler la pilule, se cachent une précarité toujours plus grande du transport public, et pour la compenser, des agents qui subissent eux-mêmes des conditions de travail à la limite du supportable : usagers et travailleurs payent l’addition d’un système de transport public qui essaye à tout prix d’augmenter ses bénéfices.

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« Mission Castor 2015 »


Dans le cadre pluriannuel de travaux de maintenance de la ligne C du RER, les « travaux castor » 2015 ont débuté ce 15 juillet, à Paris. Les touristes, très nombreux à utiliser une ligne qui lie plusieurs sites touristiques, reçoivent cette nouvelle dans la bonne humeur. Le charme parisien et le soleil d’été y est pour quelque chose. Mais pour ceux qui l’utilisent pour se rendre au travail, c’est rajouter au malheur. Jusqu’au 22 août, la fermeture des gares entre Austerlitz, Javel et Henri Martin peut rajouter jusqu’à plus d’une heure à un trajet déjà fatiguant entre la maison et le travail. Si les travaux sont bien nécessaires, la SNCF n’assure pas pour autant de bonnes conditions de transport aux usagers en ne mettant pas en place les équipements nécessaires à assurer les navettes de remplacement. Et c’est la même recette qui est appliquée aux agents de renseignement. Derrière les « gilets oranges », les sourires et la bonne humeur, se cache aussi la précarité du travail : pour assurer un service minimum, la SNCF et son sous-traitant Itiremia sont peu regardants sur les conditions de travail, tandis que les alertes sanitaires sur les méfaits de la canicule envahissent les médias. Peu importe, le profit n’a pas d’odeur, et ce n’est pas la sueur des agents Castor qui leur donnera des remords.

Des travaux sans compensations pour les travailleurs franciliens qui ne partent pas en vacances


A la différence des années précédentes, la circulation des trains de la ligne C du RER est cette année interrompue entre les gares d’Austerlitz, Javel et Henri Martin. Les usagers qui se sont habitués à reprendre le train aux Invalides, doivent effectuer encore un deuxième trajet pour arriver à Javel, avec les navettes de substitution. Pour ceux qui utilisent la ligne C pour arriver aux gares situées au nord de Paris, le casse-tête n’en finit pas : les navettes de substitution n’arrivent pas à Henri Martin et il faut se débrouiller autrement.

Il est vrai que les travaux de« consolidation des infrastructures » sont bien nécessaires pour éviter toute sorte d’accident. Mais il est aussi de responsabilité de la SNCF d’assurer le transport aux usagers dans le cadre le plus proche possible des trajets ferrés. Or ce n’est toujours pas le cas : les navettes de substitution ne font pas le trajet complet des gares affectées et, en plus, passent dans à cadence adapté aux vacanciers, mais qui fait peur pour ceux dont le timing est plus resserré : l’usager habitué à prendre un train avec une capacité de 2.000 passagers tous les cinq minutes doit faire avec une navette de capacité de 80 passagers parfois tous les 30 minutes. Pour les trajets Austerlitz – Javel ainsi que Austerlitz – Henri Martin les usagers doivent compter sur plus d’une heure supplémentaire de trajet et autant de prises de tête pour effectuer leurs trajets. Cette précarisation du transport public ne bénéficie qu’aux poches de la SNCF et aux sous-traitants filiales de la SNCF : le service de substitution coûtant chère, la SNCF laisse les usagers se débrouiller pour arriver à leur destination. Et cet été les travaux ne se limitent pas à la ligne C : des coupures sont aussi prévues sur la ligne A, entre Auber et La Défense. Pour tous ceux qui travaillent sur l’Ile-de France cet été, ceux qui n’ont pas la chance et les moyens de partir en vacances, c’est la double peine : canicule, labeur et galère de transport, on est loin du Paris Plage que vante la mairie de Paris.

Des « agents castor » à votre service : calmer les foules et subir des conditions de travail ultra-précaires


Si la situation s’est empirée pour les usagers, il en est de même pour les « agents castor », responsables du renseignement aux usagers dans les gares affectées, et gestionnaires des prises de bec avec les usagers. Les agents embauchés par l’intérimaire Itiremia, filiale du groupe SNCF, doivent faire face à des conditions de travail qui atteignent les limites du supportable : obligés à faire de longues heures debout, les rares pauses autorisés n’étant pas rémunérés, parfois sans toilettes à proximité, sans rémunération supplémentaire les dimanches et jours fériés : la « pause » consiste à relever ses jambes dans un local de la RATP et avaler un sandwich en 10 minutes chrono. Et le matériel manque : dans la gare de Saint Michel, par exemple, certains « agents castor » n’ont même pas une simple casquette, qui fait néanmoins partie de la tenue obligatoire, pour leur permettre de supporter le soleil pendant les huit heures de travail consécutives, et les éventuels coups de chaleur dus à la canicule. Heureusement, certains usagers, plus cléments que d’autres, épargnent, à coup de sourire et de remerciements les agents castors, devenus les véritables boucs émissaires de la précarité du transport public.

Les travailleurs et les usagers payent l’addition


Si dans le quotidien usagers et agents se trouvent parfois dans des situations de conflit générées par la précarisation du transport public, leurs intérêts se rapprochent énormément. La quête insatiable de bénéfices de la part de la SNCF/Itiremia est responsable de la précarisation du transport public et du travail de ceux qui assurent les services attenants aux travaux de « consolidation des infrastructures » pendant les « travaux castor ». Un agent qui vient de faire six heures debout en plein soleil, sans casquette, et un usager qui doit attendre 30 minutes pour une navette de substitution qui ne l’amènera pas à sa destination finale sont tous les deux victimes du délabrement du transport public. Mais n’oubliez-pas, les poches pleines de la SNCF et d’Itiremia vous remercient pour l’effort et la compréhension. Bon voyage !


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