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Projet russo-turc avorté ?

Trêve contestée en Syrie : le tour de force diplomatique de Poutine et d’Erdogan menacé ?

La reprise totale d’Alep par les forces de Bachar-el-Assad le 23 décembre dernier a permis à Poutine d’effectuer un véritable coup de force diplomatique. Soutenue par la Turquie, membre de l’Otan et principal allié des forces rebelles syriennes, la Russie est parvenue à imposer un accord de cessez-le-feu le 29 décembre dernier qui doit ouvrir sur des négociations de paix prévues fin janvier à Astana au Kazakhstan. Une situation qui a tout pour déplaire aux chancelleries occidentales. La contestation de cette trêve par une partie de l’opposition syrienne qui accuse Damas de poursuivre les hostilités va-t-elle mettre un coup d’arrêt à l’avancée russo-turque dans la région ? Quoi qu’il en soit, elle arrive à point nommé pour les occidentaux qui cherchent à gagner du temps pour éviter ce coup de force de Poutine.

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Une victoire diplomatique que Poutine cherche à consolider au plus vite

La « libération » d’Alep Est menée avec massacres et fracas a offert à Damas et à son principal allié russe un avantage énorme dans l’évolution du conflit en Syrie. Reprise d’Alep qui marque donc la victoire des soutiens de Bachar Al-Assad et en premier lieu de la Russie : celle-ci compte désormais parmi les puissances influentes sur la zone proche et moyen-orientale

Ainsi, c’est ce tournant dans les relations diplomatiques et géopolitiques, que la Russie a voulu consolider au plus vite en imposant avec le soutien de la Turquie, dès le 29 décembre, soit quelques jours à peine après la reprise définitive d’Alep, un cessez-le-feu et une proposition de pourparlers de paix prévus pour la fin janvier dans l’objectif de clore au plus vite ce conflit syrien et d’asseoir le statu- quo à l’avantage du clan Assad.

Avancée turque

Signe d’affaiblissement de l’influence américaine, la conclusion de l’accord avec l’appui de la Turquie et en excluant les Etats-Unis. Membre de l’Otan, accueillant sur son sol la base militaire américaine d’Incirlik, la Turquie n’a pourtant pas cessé de prendre ses distances avec Washington tout au long du conflit syrien. Inquiète du soutien américain accordé aux troupes kurdes irakiennes et de sa politique de coopération militaire avec ces derniers, ambivalente sur les relations avec Daesh qui n’a pas été, jusqu’à très récemment, qu’un ennemi secondaire par rapport à la menace d’élargissement d’un Etat kurde à ses frontières, la Turquie a préféré s’extraire du camp occidental pour jouer cavalier seul et renforcer son rôle d’intermédiaire privilégié entre les différentes composantes du conflit syrien. Le rapprochement avec la Russie, dans le cadre de la signature d’une trêve qui exclut les Etats-Unis, constitue également pour Erdogan une victoire sans commune mesure et permet à la Turquie de s’affirmer comme une puissance régionale à part entière.

Et la trêve joue clairement en faveur des intérêts turcs. Elle a été conclue entre 13 groupes rebelles dits modérés, soutenus par la Turquie et les forces loyalistes, excluant cependant la coalition Fatah Al Cham, proche d’Al-Qaida. Mais surtout, la trêve respecte les souhaits de la Turquie, en y excluant le YPG kurde, allié des Américains, qui vient de déclarer une constitution sur les trois cantons autonomes de Kobané, Afrine et Jaziré situés au Nord de la Syrie et appelle à des prochaines élections législatives. Grande source d’inquiétude pour la Turquie, l’accélération de ce dossier kurde à l’approche de la fin du conflit est très certainement une des raisons qui ait précipité l’accord russo-turc. Enfin, l’État Islamique est également exclu des négociations.

Une course en vue des négociations de paix

L’accord de paix prévu à Astana fin janvier s’inscrit quelques jours à peine avant la tenue des pourparlers de paix inter-syriens, organisé sous l’égide de l’ONU le 8 février prochain. Si Mevlut Cavusoglu, ministre des affaires étrangères turc a précisé que les accords de paix à Astana n’étaient pas une « alternative à Genève, mais une étape complémentaire » il faut toutefois remarquer que le calendrier n’a pas été laissé au hasard, et que les pourparlers organisés par la Russie, la Turquie et l’Iran prennent de court les plans occidentaux.

Quoi qu’il en soit, la trêve récente se retrouve de nouveau menacée : après avoir tenu tant bien que mal pendant 4 jours, une partie des rebelles, dont le groupe Sultan Mourad, appuyé par la Turquie, a décidé de quitter la table des négociations. En réalité, les violences, même si de basse intensité se sont poursuivies ces derniers jours. Des raids aériens de la part du régime ont été recensé par l ‘Observatoire Syrien des Droits de l’Homme au nord d’Alep ce lundi, et mardi, dans la région de Damas, se sont des tirs qui ont été échangés et des bombardements menés par les forces d’Assad. La zone de Wadi Barara, région tenue par les rebelles à 15 km de Damas et qui est stratégique pour alimenter en eau la capitale a été particulièrement visée.

Une situation qui met en péril les projets russes pour entériner son avancée et assurer une sortie du conflit, mais qui pourrait bien laisser du temps aux chancelleries occidentales, pour l’instant fortement handicapées par les différents agendas nationaux : la passation de pouvoir entre Obama et Trump aux Etats-Unis, la fin de mandat de Hollande et la préparation des élections de Merkel, sont une fenêtre d’opportunité qui laisse au président russe une plus grande marge de manœuvre et qu’il ne voudrait pas laisser passer.


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