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Edito

Un 5 février qui montre la voie. Et maintenant ?

Ce mardi 5 février, jour de grève et de mobilisation nationale, a été une réussite. « Près de 300 000 manifestants dans toute la France ».Sans pour autant être un raz de marée, la journée a réussi son pari : initier la convergence « gilets jaunes et gilets rouges » avec, à son actif, des actions de blocage réussies, y compris dans la « France profonde », ce qui montre l'enracinement de la colère, et la voie pour la suite.

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crédit image : Felipe Barrientos

300 000. C’est le chiffre de manifestants annoncé par la CGT pour ce 5 février. Pas un raz de marée donc, mais une mobilisation qui se situe dans les « moyennes basses » des mobilisations sociales des dernières années.

Dans les principales « pointes avancées » de la mobilisation des Gilets Jaunes que sont Marseille, Paris, Toulouse et Bordeaux, les chiffres de mobilisations sont dans la lignée des estimations de mobilisation des derniers actes. Ainsi, près de 35 000 manifestants dans la capitale, 12 000 dans la ville rose toulousaine et 10 000 pour la « belle endormie » bordelaise. C’est de loin la cité phocéenne qui a explosé les chiffres de la mobilisation avec 55 000 personnes décomptées par la CGT dans les rues de Marseille. Mais c’est aussi dans des villes plus modestes, de cette « France rurale » qui s’est réveillée avec la mobilisation des Gilets Jaunes, que les (bonnes) surprises affluent. Entre autres chiffres, celui des 2000 manifestants à Aurillac, 2500 à Tarbes ou encore 350 à Rodez. Dans les villes de taille plus « intermédiaire », la mobilisation a aussi été forte, comme au Havre où 5000 personnes ont manifestés. Forte mobilisation également à Avignon et Reims, ou 2 000 manifestants étaient dans la rue. Des chiffres qui ont clairement dépassé les prévisions syndicales lorsqu’on les compare aux parcours ridiculement petits déposés, comme ce fût le cas à Paris ou à Lille, où les manifestants ont littéralement piétiné durant plusieurs heures. Effectivement, face à la potentielle affluence, les décisions des appareils syndicaux de déposer des parcours de manifestation si réduits, paraissent pour beaucoup en décalage avec les déclarations de la direction de la CGT pour construire la "convergence".

Si les manifestations syndicales du 5 février se trouvaient "jaunies", ce n’est pas seulement en raison de la présence, très nombreuse, des Gilets Jaunes, y compris de certaines figures comme Jérôme Rodrigues à Paris, aux côtés des cortèges syndicaux, mais par l’encadrement policier exceptionnel qui rappelait les manifestations Gilets Jaunes du samedi. Les blindés étaient déployés à Toulouse, tandis qu’à Bordeaux, les manifestants ont fait face à une répression sans commune mesure pour une manifestation syndicale. A Lille, le cortège a été abondement gazé sur la Grande Place de Lille alors que les manifestants tentaient de poursuivre la parcours au delà de celui - ridiculement réduit - déposé par la CGT. A Paris, aussi vite arrivés place de la Concorde, fin de parcours syndical, Gilets Jaunes et Gilets Rouges ont reçu une pluie de grenade lacrymogène pour disperser la manifestation. Des méthodes particulièrement répressives, inhabituelles pour des manifestations syndicales, qui montrent que le gouvernement craint lui aussi la convergence et n’hésite pas à traiter manifestants, qu’ils soient jaunes ou rouges, avec la même violence.

Les prémisses d’une convergence ?

Dans un silence médiatique assourdissant, cette journée de mobilisation a aussi été marquée par une multitude d’action commune entre Gilets Jaunes et Gilets Rouges, bien sûr dans la rue, mais aussi sur des actions de blocages ciblés, dans la lignée de l’opération menée à Rungis dès l’aube. Autre fait marquant, celui des blocages et actions menées sur les Universités, de Nantes à Bordeaux en passant par Toulouse et Paris, où le mouvement étudiant, si absent depuis deux mois, a montré le bout de son nez.

Bien sûr, la dynamique est pour l’instant fragile, et rien ne dit que les jours prochains verront un enracinement de la mobilisation dans les entreprises et les Universités. Néanmoins, il s’agit là d’un des éléments positif de cette journée de mobilisation du 5 février. Très concrètement, sur le terrain, des franges du mouvement ouvrier et du mouvement étudiant ont rejoint dans la rue et les actions les Gilets Jaunes, eux aussi mobilisés dans cette journée. Cela ouvre t-il à la possibilité d’une convergence durable ? Il est évidemment encore trop tôt pour le dire.

Et maintenant ? Construire la grève dans les entreprises et les Universités pour enclencher la dynamique !

Comme nous pouvions nous en douter, la journée du 5 février n’est pas encore le synonyme d’un enclenchement direct d’une grève généralisée et d’entrée en lutte par millions de travailleurs et d’étudiants aux côtés des Gilets Jaunes.

Pourtant, il s’agit d’un point d’appui réel pour enclencher une dynamique de mobilisation dans ces secteurs, et ainsi ouvrir la voie à une perspective de victoire.

Pourtant aussi, dans plusieurs villes, des Gilets Jaunes ont appelé à organiser une Assemblée Générale de ville le soir même pour lancer la reconductible. A Lille comme à Caen, l’appel des Gilets Jaunes à se réunir en AG commune en fin de manifestation n’a malheureusement pas été suivi par les directions syndicales locales. A Caen, des Gilets Jaunes ont beaucoup débattu sur le fait qu’il n’y ait finalement pas eu cette Assemblée générale en plein air en fin de manif. La direction locale de la CGT et de la FSU auraient évoqué des "problèmes techniques" pour décaler cette prise de parole, initialement proposé par Sud. A Caen, beaucoup de Gilets Jaunes qui croient en la possibilité d’une reconductible dès aujourd’hui ont été déçus de la réponse de l’UD CGT qui prévoirait d’appeler de nouveau à la grève...mi-mars.

Pourtant, à partir des Gilets Jaunes, on lance des Assemblée Générale où la question de la reconductible est posée. En ce qui concerne les Gilets Jaunes de Caen, la grève reconductible annoncée, ce n’était pas pour du beurre : des gilets jaunes étaient prêts à partir en illimitée.

D’autres n’attendent pas le feu vert des directions syndicales et sont à l’initiative. A Limoges, des Gilets Jaunes, après avoir appelé à ce que les militants syndicaux les y rejoignent lors de la manifestation, sont allés bloqué un centre de tri et à prendre le relais des syndicalistes et de maintenir la pression du mouvement. Reste à ce que les bases syndicales les y rejoignent...

Les jours et semaines à venir seront donc décisives, et il est indispensable de lutter pour que cette journée du 5 ne soit pas une sempiternelle « journée saute mouton ». Comme dans ces initiatives à Lille, ou à Caen, il s’agit au contraire de constituer des Assemblées Générales qui regroupent des Gilets Jaunes aux franges de travailleurs mobilisés, appuyés par la jeunesse, d’exiger des directions syndicales, en particulier de la centrale CGT de Martinez, de FO dont plusieurs fédérations avaient appelé à la grève, et de la FSU qui concentre les travailleurs du secteur public, de poursuivre la mobilisation et de mettre en œuvre d’un plan de bataille à la hauteur de la situation actuelle.

Rompre avec toute tentation du « dialogue social » bien sur, mais aussi organiser la tenue d’Assemblée Générale sur les entreprises afin d’appeler à une grève reconductible et illimitée. Pour cela, il sera particulièrement important d’appuyer toutes ces initiatives à la « reconductible » qui apparaissent dans la situation, afin d’intensifier la pression de la « base » syndicale sur les hautes sphères des confédérations, et en particulier de la CGT.

On le sent, cette séquence de début février pourrait marquer un tournant décisif dans la lutte engagée par des centaines de milliers de Gilets Jaunes, toujours largement soutenus par la population, contre Macron et son monde. La journée du 5 février, si cela était encore nécessaire, a balayé tous les doutes : Oui, la jeunesse, les travailleurs et les Gilets Jaunes ont les mêmes intérêts, les mêmes aspirations et des revendications communes. Il s’agit maintenant de se battre sur deux tableaux : travailler à la convergence des secteurs actuellement mobilisés et chercher par tous les moyens à contaminer l’ensemble du monde du travail et de la jeunesse.


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