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Justice de classe et impunité

Un Gilet jaune placé en garde à vue après avoir déposé plainte pour violences policières

En février dernier, suite à une manifestation de Gilets jaunes au Mans, un manifestant ayant été gazé, frappé et roué de coups, a déposé plainte pour violences policières. Résultat ? Les policiers ne sont toujours pas inquiétés tandis que le plaignant a quant à lui été placé en garde à vue et sous contrôle judiciaire pour « violences contre un fonctionnaire de police ».

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C’est le journal Libération qui a dévoilé, à travers une récente CheckNews cette affaire qui met une nouvelle fois à nu l’impunité policière, qui se retrouve ici à son paroxysme.

Le 16 février dernier, lors d’une manif Gilets jaunes au Mans, un couple de manifestants a été victime de violences policières : « On a commencé à se faire insulter, et là je vois mon mari sur le côté. Ils m’ont mise en joue avec le LBD et mon mari est arrivé pour baisser leur arme, pour les calmer. C’est parti en cacahuète, ils nous ont frappés et mis des coups partout. Mon mari s’est allongé sur moi pour me protéger. Mais à cause des gaz, il s’est retrouvé en détresse respiratoire. Il a fait un arrêt cardiaque il y a deux ans. Ma fille est pompier volontaire, ils ont refusé qu’elle vienne l’aider. Les street medics n’ont pas eu le droit d’intervenir non plus ».

Suite à cette scène, le manifestant en question voit les policiers braquer un LBD – véritables armes à mutiler qui ont éborgné depuis le début de la mobilisation plus de 20 manifestants – et tente de baisser l’arme en question : « Je veux tenter de baisser l’arme. J’ai à peine posé la paume de ma main sur son canon que les coups se mettent à pleuvoir. Il y a tellement de lacrymos que je ne peux plus respirer, je me sens partir, comme lors de mon arrêt cardiaque il y a deux ans ».

Des violences policières qui ont coûté sept jours d’ITT – interruption temporaire de travail – à sa femme, qui a dû être évacuée en pleine manif par les pompiers à cause de douleurs au genou, qu’elle a dû par la suite opérer.

Dans une volonté de réparation et de « justice », selon leurs propres mots, suite aux coups et aux violences subis, les deux manifestants ont respectivement porté plainte pour violences policières. Pendant plus de 3 mois, le couple n’aura eu aucune nouvelle concernant les suites de cette affaire – ce qui n’est par ailleurs pas étonnant au vu de l’impunité dont les policiers jouissent et des tonnes de plaintes dénonçant les violences policières qui finissent classées sans suite.

Seulement, il y a un peu plus d’une semaine, le mardi 21 mai, le manifestant qui a déposé plainte est appelé à se rendre à une audition, dans le cadre de cette manifestation du 16 février, mais dans laquelle ce dernier n’est plus considérée comme victime de violences policières, mais comme… coupable de « violences contre un fonctionnaire de police ». Etant convoqué à une garde à vue : « On n’a rien compris. Mon mari a indiqué qu’il était une victime et qu’il ne viendrait pas s’il était placé en garde à vue », a témoigné sa femme.

Refusant de se rendre au rendez-vous, il a finalement été à son domicile puis placé en garde à vue ce mardi 28 mai 2019.

Il lui est reproché d’avoir commis des violences envers un policier et d’avoir tenté de saisir son LBD, en frappant le policier : « volontairement commis des violences n’ayant pas entraîné d’incapacité de travail […], avec cette circonstance aggravante que les faits ont été commis sur un fonctionnaire de la police nationale […] et notamment en l’espèce d’avoir tenté de saisir le LBD du policier en lui donnant un coup de poing ».

Des accusations que ce dernier nie : « On voit mon bras tendu, mais c’est parce que je demandais au policier de baisser son arme qu’il braque sur moi ou ma femme et ma fille ». « Je n’ai jamais frappé ce policier ni cherché à le dessaisir de son arme. Si j’ai vraiment fait tout ça, comment ça se fait qu’ils m’aient laissé libre sur le coup ? ça ne tient pas debout ».

Actuellement placé sous contrôle judiciaire, il est convoqué au tribunal correctionnel le 4 septembre prochain. Au vu de la répression politique ultra dure qui s’abat contre les Gilets jaunes, on peut malheureusement craindre que le jugement ne tourne pas en sa faveur.

Et ce alors qu’aucune preuve, seuls les témoignages des policiers faisant foi dans cette affaire – à l’heure où les mensonges et tentatives d’étouffer les cas de violences policières au sein du corps policier ne sont plus à démontrer - ne peuvent confirmer les accusations des policiers.

Les accusations et les plaintes des manifestants sont quant à elles tout simplement étouffées. Pour le moment, aucune poursuite en effet à l’égard des policiers mis en cause. Et ce à l’heure où un arrêt de travail de 7 jours confirme que la manifestante qui a porté plainte a bel et bien été violentée et reçu des coups ce jour-là.

Le retournement qui a eu lieu dans cette affaire, avec un déplacement des accusations, qui ont finalement été retournées contre le manifestant qui a posé plainte ressemble fortement à une volonté de faire taire l’accusation. Ceci met une nouvelle fois à nu la justice à deux vitesses ; l’impunité dont jouissent les policiers, qui peuvent violenter, mutiler et tuer sans être inquiétés.

Malgré les récentes déclarations du préfet de Paris, qui tendent à faire croire à un semblant de « justice » en évoquant l’ouverture d’enquêtes à l’égard de policiers ayant commis des « violences illégitimes » - le terme de violences policières étant réfuté - , cette affaire démontre encore une fois le rôle des institutions d’Etat et la justice actuelle. Et que la lutte contre la répression et les violences policières passera nécessairement par l’auto organisation ainsi qu’une réponse collective, en toute indépendance de classe et dans la rue, à cette envolée autoritaire, ces injustices et cette impunité.

Image d’illustration : LP/Philippe de Poulpiquet


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