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Répression patronale

Un salarié d’Amazon licencié après s’être plaint de son salaire sur une messagerie interne

Doyen de l’entrepôt Amazon de Saint-Priest dans la région Lyonnaise, un employé attaquera sous peu l’entreprise américaine aux prud’hommes pour le licenciement scandaleux dont il a été victime. Son forfait ? Oser demander une augmentation de salaire convenable et des conditions de travail décentes sur la messagerie interne.

Brian Tugesun

9 juin 2021

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Crédit photo : Lyonmag

C’est le mercredi 12 mai dernier que la sentence tombe, annoncée par son supérieur hiérarchique. Un employé Amazon, agent de tri d’un dépôt situé à Saint Priest près de Lyon, est licencié pour avoir envoyé des messages à propos des mauvaises conditions de travail de l’entreprise. « Licenciement pour faute réelle et sérieuse avec effet immédiat. » ; la lettre de licenciement est glaciale, une simple citation est mentionnée où l’employé s’était risqué à remettre en question l’ordre établi et les réactions lugubres de la direction des ressources humaines. Dans le message cité, l’ouvrier chargé de préparer des colis critique les shifts infernaux de cet entrepôt de la région Lyonnaise : « La fatigue arrive très vite surtout avec des horaires ainsi qui risquent d’être compliqués à suivre ».

L’employé faisait aussi d’autres remarques alarmantes à l’encontre de l’augmentation de salaire annuelle, jugée beaucoup trop insuffisante au regard des risques encourus et de la fatigue omniprésente dans l’entrepôt lugubre et de la directrice des ressources humaines, totalement réfractaire et insensible aux revendications des travailleurs : « Je suis désolé mais la RH qui nous représente est une version de robotnik qui ne cherche absolument pas la solution pour nous car à chaque fois qu’on lui en parle, elle reste simplement sur sa position sans se remettre une seule fois en question ».
Par ce renvoi immédiat et sans appel, Amazon entend montrer à ses employés qu’aucune insubordination ne sera tolérée, même de la part de ceux qu’elle désigne comme « meilleur employé », comme c’était le cas de ce salarié. Cette ignoble mise au pas n’est en réalité que le symptôme de la manière abject dont Jeff Bezos traité les travailleurs d’Amazon, entre management agressif et répression féroce

Tandis que l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires record de 8,1 milliards de dollars en 2020, les salariés qui se situent en bas de l’échelle sont systématiquement méprisés et broyés par la multi-nationale, victimes d’une direction sourde à tout reproche et avançant tel un bulldozer, à grands coups de chronométrage et autres surveillances informatiques permanentes.
La dernière fantaisie de cette GRH détraquée qui sévit aux Etats-Unis : le « Zenbooth », des « kiosques interactifs individuels » ayant des allures de cercueils informatique où les employés peuvent se « ressourcer » devant des vidéos de « méditations guidées, d’affirmations positives, de scènes apaisantes avec des sons, et plus encore », rien de mieux pour s’apaiser l’esprit après un shift d’une dizaine d’heures.

Dans un rapport, sorti la semaine dernière, l’horreur des conditions de travail à Amazon était démontré. Comme nous l’écrivions dans notre article sur le sujet : « Dans ces mêmes entrepôts, les salariés n’ont souvent même pas le temps de se rendre aux toilettes, et quand ils y sont autorisés, leur passage est chronométré, mesuré, comparé. Les salariés n’ont aucun répit : en moyenne, les personnes travaillant dans un centre logistique Amazon doivent préparer 150 colis par heure. Les contrôles en terme de productivité sont nombreux, et au mépris des conditions de travail des travailleurs et de leur dignité. »

Comme l’explique Sud, qui organisait un rassemblement aujourd’hui pour le salarié, « son crime est d’avoir osé critiquer la politique salariale d’Amazon ». Amazon n’est pas seule dans cette politique de mise au silence des travailleurs, à Toulouse, c’est Rozenn Kevel, étudiante et travailleuse à Chronodrive, qui a été licenciée après avoir mené une lutte décisive contre les violences sexistes et sexuelles dans son magasin. La répression systémique et systématique des travailleurs ne s’arrêtent pas aux portes des GAFAM, elle est vécue par tous et toutes, au quotidien.

Les tentatives de syndicalisation de la firme américaine en Alabama notemment, durement réprimées par des menaces directes et des campagnes publicitaires géantes anti-syndicalisation, ne peuvent que nous laisser en colère, frustrés de lutter contre une machine gigantesque aux ressources pécunières quasi-illimitées. Cette lutte est en revanche primordiale pour engranger un potentiel tournant contre le patronat américain qui pourrait se retrouver devant une véritable vague de travailleurs prenant confiance afin de s’organiser, depuis la base, et contre les bureaucraties syndicales et la répression voyou de l’empire de Jeff Bezos.


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