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PAS DE « LOI TRAVAIL », DU TRAVAIL POUR TOU(TE)S.

Un travail pour chacun et des conditions de vie décentes, est-ce possible ?

Claire Manor ANI, CPE, loi Macron, loi El Khomri, tout un train de « réformes » qui n’ont de cesse de porter chaque fois plus loin le fer contre les acquis obtenus, au fil de décennies de lutte, par les travailleurs exploités contre leurs patrons exploiteurs. Se battre aujourd’hui pour le retrait de la « loi travail » ce n’est pas défendre le « code du travail » en tant que tel mais les acquis qu’il a entérinés, c’est-à-dire un certain rapport de forces entre salariés et patrons, qui déterminera le cadre plus ou moins favorable dans lequel nous mènerons nos luttes. Et c’est bien à un bras de fer que la « loi travail » donne lieu. Pour le pouvoir, lâcher d’un centimètre c’est risquer de perdre la bataille. Pour les travailleurs gagner du terrain c’est ouvrir la voie à d’autres conquêtes vers la légitime aspiration au travail pour toutes et tous et à des conditions de vie décentes.

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Des intérêts antagoniques que la crise capitaliste ne fait qu’aggraver

Pour les jeunes, les travailleurs, les précaires, les intermittents, les sans papier, les retraités qui se mobilisent, de twits en pétitions, d’AG en rassemblements, de grèves en manifs, le code du travail n’est pas un livre de chevet. Mais ils savent une chose, c’est que la galère des petits boulots, la précarité, le chômage, la menace de devenir SDF…. Ils n’en veulent pas. Tous voient leurs conditions de vie se dégrader de jour en jour. Ce qu’ils veulent, c’est du travail et une existence décente pour toutes et tous.

Pour les patrons, toujours plus avides de profits, à la recherche de sphères les plus rentables pour investir et des travailleurs les plus précaires à exploiter, faire sauter les derniers verrous de ce qui reste de la protection des travailleurs, qu’il s’agisse du secteur privé ou du secteur public, est un objectif stratégique à la fois contre l’ensemble des travailleurs, mais aussi dans la bagarre concurrentielle que les entreprises capitalistes mènent entre elles.

Nous subissons actuellement l’une des plus grandes crises du système capitaliste depuis les années 30, jalonnée par les rebonds mécaniques mais surtout les baisses qui secouent la conjoncture économique à des fréquences de plus en plus rapprochées et avec des répercussions de plus en plus lourdes. Cette crise profonde amène les patrons à ne plus faire de quartier et à tenter d’imposer un rapport de force de plus en plus impitoyable. Mais les boîtes, les facs et les bahuts en grève, la rue en ébullition risquent de leur donner du fil à retordre et peut-être même d’inverser le rapport des forces… ?

L’art du compromis ou l’art de la guerre ?

La ruse la plus classique dans une négociation consiste à faire croire à l’autre que l’on prend en compte ses intérêts. Passés maîtres dans l’art de l’enrobage Hollande-Valls-Medef réussissent l’extraordinaire tour de force de prétendre que c’est en permettant aux patrons de licencier plus facilement qu’on créera des emplois. Pour leur prêter main-forte, les médias dominants ne sont pas à cours d’exemples : les taux de chômage en Allemagne, en Grande Bretagne, où les licenciements sont facilités et les acquis du mouvement ouvrier sont démantelés, seraient bien inférieurs à ceux de la France. Ce qu’ils ne disent pas c’est que ce « faible » taux de chômage est corrélé à une très forte hausse de la précarité des emplois. La tour de passe-passe est simple à comprendre. Régler le problème du chômage alors que le système est en crise, ça veut dire imposer la précarité pour tous et un niveau d’exploitation des travailleurs encore plus élevé. Moyennant quoi les chiffres du chômage baisseront artificiellement.

Mais ni les jeunes, ni les travailleurs ne sont dupes de cette hypocrisie. La forte mobilisation du 9 mars, s’est exprimée comme une riposte claire face à la violence de l’attaque, imposant au gouvernement de passer au compromis. Heureusement pour nous, se disent Hollande-Valls-Medef, dans le paysage politique il y a les directions syndicales « réformistes », poids lourd CFDT en tête. Elles ont fait la preuve, depuis le début du quinquennat de leur capacité à accompagner les « réformes ». « Prenons le temps » de discuter.

Mais il n’y a pas de compromis possible sans céder quelques pouces de terrain, sans renoncer à quelques-unes des dispositions prévues. Hormis pour ceux qui étaient de toutes façons prêts à négocier et à qui il suffisait de donner symboliquement un os à ronger, pour tous les autres, l’antagonisme fondamental demeure : entre Hollande-Valls-Medef et travailleurs/jeunes.

Du coup, le gouvernement qui avait le soutien assez large de la droite, perd celui des républicains qui volent à la rescousse des PME soi-disant menacées. De son côté, « la fronde » fait mine de ronchonner tout en se rassemblant autour d’Hollande. Mais il ne s’agit en fait que d’un jeu de postures dans la perspective de 2017.

Dans la foulée, le recours à l’article 49.3, support éculé mais toujours possible du passage en force, se profile à nouveau à l’horizon, au risque de donner au conflit une allure de guerre ouverte. Car la pire des choses pour le gouvernement serait qu’une « loi travail », fût-elle entièrement vidée de son contenu, soit purement et simplement retirée.

Plutôt qu’à l’art du compromis c’est à l’art de la guerre qu’il va falloir recourir.

Les travailleurs n’ont pas peur de se battre, mais il leur faut une stratégie

Gouvernement et médias s’appliquent à longueur de proclamations et d’interviews à accréditer la thèse des « anciens » et des « modernes ». Au nom de la raison du plus fort, celle des intérêts des capitalistes, les travailleurs devraient accepter la mise en concurrence avec ceux des pays où ils sont le plus exploités, parfois dans des conditions quasi moyenâgeuses, taillables et corvéables à merci. Si la « raison » voulait que l’on s’aligne sur ces « esclaves modernes » d’autres lois El-Khomri bien plus drastiques encore devraient nous être réservées.

Loin de se laisser enfumer et dévoyer par les sirènes du « modernisme » les jeunes et les travailleurs, sont en train de se mobiliser, de chercher la convergence, beaucoup sont prêts à se battre jusqu’au bout pour le retrait de la loi travail et le chemin de la victoire passe par là : pas de conquêtes nouvelles sans défense des acquis.

Mais là ne peut se trouver l’ultime perspective de cette lutte : que la loi El Khomri soit défaite et le gouvernement violemment ébranlé serait un tremplin pour mettre en avant un certain nombre de revendications immédiates comme l’interdiction, sauf nécessité sociale, du travail du dimanche, du travail de nuit et des 3X8, des heures supplémentaires, la fin de l’intérim, du CDD et de l’auto-entreprenariat … A titre d’exemple, il faut savoir que les heures supplémentaires, qui sont monnaies courantes aujourd’hui et très souvent non déclarées, représenteraient 600 000 emplois stables supplémentaires.

A terme, ce que les travailleurs doivent viser à mettre en place est encore plus ambitieux : loin du miroir aux alouettes à la Sarkozy « travailler plus pour gagner plus » ou de la réalité que voudrait renforcer la « loi Travail » « travailler plus pour gagner moins », l’objectif des travailleurs devrait être d’imposer la seule règle qui vaille : « travailler tous pour un salaire assurant une vie décente ».

Les « modernes » nous opposeront qu’un tel objectif relève de l’utopie pure et simple, et qui plus est d’une utopie dépassée. Pourtant les solutions contre le chômage, tant structurel que conjoncturel existent. La fin de la précarité et de la surexploitation, en France comme ailleurs, est possible. Il faudrait pour cela que les syndicats, les organisations de masse, les jeunes, les travailleurs en lutte syndiqués et non syndiqués lient leurs intérêts à ceux des travailleurs sans emploi, des précaires, dans un cadre de solidarité. Il faudrait que le travail disponible soit réparti entre tous les travailleurs, en commençant par imposer la semaine de 32 heures, pour toutes et tous sans aucune distinction de sexe, d’origine ou de tout autre facteur discriminatoire. Le temps de travail moyen serait alors le résultat de la répartition du temps total de travail entre tous les travailleurs, sans modification, voire avec augmentation, des conditions de rémunération et avec un salaire minimum assuré de 1700 euros nets par mois, évoluant avec le pouvoir d’achat.

Refuser le cadre dans lequel ils nous enferment

Les travailleurs sont-ils comptables du fait que le capitalisme soit incapable de satisfaire les revendications qui surgissent des maux qu’il a lui-même engendrés ? Bien des travailleurs pensent ou commencent à penser le contraire. La « possibilité » ou « l’impossibilité » de satisfaire les revendications devient de plus en plus évidemment une question de rapport de forces. C’est ce rapport de forces qu’il faut construire dans les luttes qui se présentent à nous aujourd’hui. C’est lui qui permettra d’aller vers le seul gouvernement capable de satisfaire ces revendications, c’est-à-dire un gouvernement des travailleurs offrant la perspective d’une autre société, débarrassée de l’exploitation et des oppressions.


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