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Victoire à Paris 1, une crise ouverte à l’Université qui doit servir aux futures batailles de la jeunesse

La victoire sur les partiels à Paris 1 ouvre une crise importante dans l’enseignement supérieur et remet en cause les logiques sélectives qui y règnent. C’est une brèche ouverte pour préparer les batailles à venir et que nous ne soyons pas la génération sacrifiée !

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Crédit Photo : O Phil des Contrastes

A Paris 1, les étudiants viennent de remporter une victoire sans précédent contre la direction de l’Université et le gouvernement. Alors que certains professeurs avaient décidé de porter en justice la motion des élus étudiants écartant toute note en dessous de 10, le juge a statué hier et validé le cadrage voté. Une victoire importante contre la sélection dans une période où les jeunes les plus précaires ne pouvaient pas s’assurer d’avoir leur année.

Une victoire qui arrive après une très longue bataille menée par les élus étudiants dans les conseils puis en justice. Des élus, largement soutenus par les étudiants, qui ont dû s’affronter à une présidence et à certains professeurs déterminés à empêcher la validation pour tous en maintenant les partiels coûte que coûte. Depuis la première motion du 16 avril, c’est une véritable fronde réactionnaire en faveur de la sélection, avec à sa tête des professeurs de l’École de Droit de la Sorbonne, qui s’est élevé contre le cadrage étudiant, emmenant celui-ci jusqu’au Tribunal Administratif.

Pourtant, malgré les multiples tentatives de passages en force de la présidence, entre suspensions de séances anti-démocratiques et mensonges éhontés pour décrédibiliser les élus, et les pressions imposées par les UFR les plus sélectifs, les élus ont obtenu une victoire, définitivement actée aujourd’hui par un mail de George Haddad appelant à « appliquer les modalités de contrôle de connaissances votées pour le second semestre de cette année académique par la CFVU du 5 mai 2020. »

Une victoire que Frédérique Vidal semble cependant chercher à remettre en cause.

Une victoire contre la sélection et l’élitisme qui ouvre une crise importante

La ministre de l’Enseignement supérieur, qui déclarait déjà en avril : « Il ne sera pas possible de neutraliser le second semestre, ni de mettre systématiquement des notes supérieures à 10/20. Et si d’aventure, certains étaient tentés de le faire, le ministère jouerait son rôle de régulateur et ne validerait pas les épreuves évaluées de cette manière. Il est demandé aux établissements, même dans les conditions actuelles, de garantir la qualité des diplômes » a clairement décidé de soutenir la fronde des professeurs de droit, et même de l’encourager ! Dans un communiqué, elle explique que le Ministère appuiera « les enseignants-chercheurs qui souhaiteront se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat. Il appartiendra à la plus haute juridiction administrative de l’Etat de dire le droit et de rappeler les uns et les autres à leurs responsabilités devant les étudiants et l’institution universitaire. »

La ministre justifie de cette décision en expliquant que la décision juridique « porte une atteinte directe à la qualité des diplômes délivrés par l’université ». Une déclaration qui montre bien la crise qu’a ouverte cette victoire étudiante. De fait, le cadrage à l’encontre des principes d’une université toujours plus sélective et qui doit servir à préparer la main d’œuvre future. Pour une Université aussi prestigieuse que Paris 1 c’est remettre en cause profondément les logiques concurrentielles et la soi-disant « valeur du diplôme » qui va avec. Si le combat a été si dur à Paris 1, il est aussi ailleurs car il s’agit là d’empêcher le « business as usual » dans les Universités, et de prendre le contre-pied de la logique du gouvernement.

Pour autant, Paris 1 n’est pas la seule fac à avoir mené un tel combat. A Nancy, Evry, au Mirail ou à Nanterre les #HonteUniv ont fleuri ces dernières semaines, de la part d’étudiants qui se battent aussi pour empêcher le maintien des partiels. Eux aussi se sont confrontés à la détermination de leurs présidences et aux manœuvres anti-démocratiques, comme celle de J.F Balaudé, président de la fac de Nanterre qui s’est octroyé les pleins pouvoirs dans les conseils. Des batailles qui révèlent le caractère anti-démocratique de l’université, et pour lesquelles la victoire Paris 1 sera un point d’appui.

Une première victoire et une brèche ouverte pour préparer les batailles à venir

Dans la continuité des mobilisations des lycéens qui se sont levés contre les E3C en refusant un bac local et inégalitaire, des étudiants contre Parcoursup ou des professeurs contre la précarisation annoncée par la LPPR, cette victoire est un premier appui pour revendiquer une autre Université, qui aille dans le sens opposé des futures contre-réformes, que pourrait avancer le gouvernement -> https://www.revolutionpermanente.fr/Pourquoi-Vidal-et-le-gouvernement-ne-veulent-pas-de-la-validation-automatique-des-partiels].

En permettant d’obtenir le 10 minimum dans la première fac de France, les élus étudiants ont conquis une tranchée contre la sélection, pour une Université qui ne soit pas celle de la concurrence et de la mise au pas, ouverte à toutes et tous et fermée aux intérêts privés. La qualité du combat qu’ont mené les organisations étudiantes à Paris 1 ainsi que leurs soutiens doit donc servir d’appui pour penser les prochains affrontements. C’est leur détermination qui a paralysé la direction de l’Université, tout comme leur volonté de révéler au grand jour les manœuvres de l’administration. Une victoire qui s’est faite dans l’unité, autour d’une campagne politique offensive, entre threads Twitter, manifestations virtuelles, pétitions, articles et mise sous pression des adversaires. Dans les autres université, cette expérience doit servir à généraliser la victoire.

De fait, au-delà du contexte immédiat, cette victoire pose la question des mobilisations à venir. Alors que la sélection risque de s’intensifier, car l’Université va elle aussi devoir payer la crise qui vient, l’augmentation des frais d’inscriptions et d’autres attaques se prépare. En outre, si les universités risquent de rester partiellement fermées, ce sont à nouveau les plus précaires, les étudiants-salariés, ceux qui ne disposent pas des « bonnes conditions » qui verront leurs conditions d’étude se dégrader.

Face à la précarité et à la sélection : nous ne serons pas la génération sacrifiée !

Les jeunes vont être une des variables d’ajustement face à la crise. Obligés de travailler pour survivre, ils sont une main d’œuvre déjà facilement exploitable. Mais avec les premières lois de casse du Code du Travail, cela va s’intensifier. Avec la loi d’état d’urgence sanitaire, le gouvernement permet par exemple de multiplier les CDD et intérima et donc la jeunesse, qui occupe majoritairement ces emplois, en facilitant le recours à ce type de contrats courts.

Déjà des étudiants ont perdu leurs travails en intérim, été licenciés à Domino’s Pizza pour avoir refusé de travailler dans des conditions sanitaires dangereuses ou se sont vus refuser une prime qui leur revenait, comme à Auchan. De nombreux étudiants perdent leur travail et n’en retrouveront pas pendant les vacances. La précarité va donc s’intensifier et obliger certains à arrêter leurs études, tandis que le chômage dans la jeunesse va multiplier les « ni ni », n’ayant pas d’emploi sans toutefois pouvoir étudier.

En ce sens, gagner sur les partiels c’est permettre de relever la tête, refuser d’être la génération sacrifiée, celle qu’on sur qui on va faire reposer une crise économique qu’elle n’a pas provoquée. C’est un premier pas pour se préparer à gagner ailleurs. Aujourd’hui se battre contre la sélection signifie aussi revendiquer une autre gestion de cette crise sanitaire, qui corresponde aux intérêts de la majorité et pas au calendrier du patronat et du gouvernement.

C’est pour cela que nous pensons que cette victoire doit être liée plus largement au combat des jeunes qui se battent contre les licenciements ou pour des meilleurs salaires, comme à Chronodrive où les jeunes salariés se battent pour une meilleur salaire. Elle doit être un premier pas pour permettre à la jeunesse, à majorité salariée, de contrer les attaques qui vont arriver et de s’unir pour revendiquer la fin de la sélection mais aussi par exemple l’interdiction des licenciements ou l’embauche en CDI pour tous. Contre la précarisation et les aides minimales du gouvernement, comme les 200 euros proposés par E. Philippe qui ne permettent même pas de se payer des masques, il faut revendiquer une allocation à hauteur du SMIC pour tous les précaires. Pour un avenir meilleur, c’est maintenant que ça se joue et le combat sur les partiels doit se lier à toutes les autres luttes de la jeunesse pour relever la tête !


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