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La Izquierda Diario
27 de novembre de 2017 Twitter Faceboock

Macron instaure la fraude en toute légalité (au profit des seuls patrons)
« Droit à l’erreur ». Cherchez l’erreur
Jean-Patrick Clech

En vertu des sourires photogéniques de Gérard Darmanin, ce lundi, l’Etat et son administration sont devenus les amis de tout le monde. Désormais, on aura le droit de se tromper sans être sanctionnés. Mais derrière le projet de loi sur la simplification administrative présentée ce lundi en Conseil des ministres, cette seconde batterie de mesure phare de rentrée, après la Loi Travail XXL, se cache, comme dans les décrets Macron de réforme du Code du Travail, un beau paquet de cadeaux aux entreprises : Noël avant-l ’heure, en quelque sorte.

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Les Contes du chat perché

Imaginons un octogénaire, isolé, dans une ferme, entre Rostrenen et Saint-Nicolas-du-Pelem dans les Côtes d’Armor : il est invalide de guerre, mais également veuf d’une fonctionnaire. A ce titre, il touche une pension de réversion. Sans compter quelques menus revenus supplémentaires, imposables, provenant d’un compte Crédit Agricole, accumulés depuis des années. Notre octogénaire oublie, en complétant sa déclaration de revenus 2017, de cocher une case. Au lieu de recevoir une notification du Trésor Public lui enjoignant de payer sous trente jours une somme forfaitaire de 56 euros 45 centimes, l’octogénaire recevra désormais la visite de Gérard Darmanin, en personne, tout sourire, un bouquet de fleurs à la main, lui disant qu’il « a le droit à l’erreur » et que l’administration bienveillante lui pardonne.

Voilà le mauvais conte pour enfants (du XVI° arrondissement, de ceux qui lisent encore Bécassine) qu’Emmanuel Macron et ses ministres veulent nous vendre. Dans le cadre d’une « société de confiance » et d’une « administration accueillante », chacun aura désormais le droit de se tromper au moins une fois sur une histoire de gros sous.selon l’Elysée. Seulement voilà, et c’est-là où le bât blesse : si pour un particulier, les « gros sous » peuvent commencer à quelques centaines d’euros, c’est bien plus pour une PME voire une grosse entreprise. Pour Macron et son ministre, Gérard Darmanin, « toute le monde », c’est Dupont-Durand autant que Bouygues, la famille Peugeot ou les Leclerc.

Le gouvernement avait sa mesure sous le coude depuis cet été mais elle a été peaufinée entre-temps. Ça tombe bien, puisqu’elle s’inscrit à merveille dans le prolongement de la destruction du Code du Travail qui est à l’œuvre avec la Loi XXL. Il s’agit, par ailleurs, d’une pure opération de macronerie.

Clientélisme

D’un côté, on atomise à l’extrême la société pour en faire une somme de clients directement reliés à l’Etat par le fait du prince (ou du Bonaparte). Tout principe d’égalité collective est nié : ici, c’est celui de l’égalité face à l’impôt, au profit d’une individualisation poussée à l’extrême. Le problème ne sont plus les impôts, payés par celles et ceux qui sont imposables alors qu’ils ont de petits revenus, mais d’en optimiser le paiement. De l’autre côté de l’éventail social hexagonal, on se frotte les mains.

Cadeaux à gogo (pour le Medef)

Côté patronat, on applaudit bien entendu. Dès ce week-end, avant même que le texte ne soit présenté en conseil des ministres ou ne filtre dans Le Journal du Dimanche, Thibaut Lanxade, vice-président du Medef, disait à qui voulait bien l’entendre tout le bien qu’il pensait de Darmanin. La Lune de miel entre le patronat et le président, confirmée à la rentrée avec la participation des ministres à l’université d’été de Jouy-en-Josas, continue à se vérifier au quotidien.

Et pour cause : ce sont tous les services de l’Etat qui grèvent le budget des entreprises par une excessive pinaillerie administratrive qui sont visés : URSAAF, contrôles à la fraude, douanes et fisc, notamment. Si avec la Loi Travail, c’est l’inversion de la hiérarchie des normes qui est instaurée, avec ce texte de loi sur la simplification administrative, c’est de l’inversion de la charge de la preuve dont il s’agit. Désormais, ce sera à l’Etat de démontrer la mauvaise foi des patrons resquilleurs et pas l’inverse.

La première bêtise compte pour du beurre (et les patrons peuvent garder l’argent du beurre)

Une fois au moins, puisqu’on ne pourra échapper à l’amende qu’une seule fois, il y aura donc droit à la fraude légalisée ou presque. Parmi les 18 mesures phare présentées par Darmanin, trois retiennent particulièrement l’attention des patrons, et on les comprend : la numéro 6, à savoir qu’en cas de manquement aux règles en matière de temps de travail, d’hygiène ou de restauration, si l’employeur est de bonne foi, il ne recevra qu’un avertissement ; la numéro 11, qui instaure le principe de la médiation généralisée avec l’URSAAF en cas de conflit ; et la numéro 2, qui limite, dans le cas des entreprises de moins de 250 salariés, les possibilités d’enquête de l’administration.

Plus que jamais gestionnaire des biens des puissants

Un président des riches qui essaye de faire populo en instaurant un dialogue direct avec « les vrais gens ». C’est le trait de fabrique du bonapartisme macroniste. A nouveau, sur cette question administrative, le gouvernement en fait preuve, espérant élargir davantage sa base sociale qui est, plus que jamais, exiguë.

En attendant, et alors qu’ils trinquent, c’est nous qu’on paie, comme dirait l’autre.

Crédits photos : Eric DESSONS - SIPA

 
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