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La Izquierda Diario
27 de novembre de 2017 Twitter Faceboock

Pour en finir avec le patriarcat
Pan y Rosas : Manifeste féministe internationaliste

Dans les années 2000, le collectif féministe Pan y Rosas est impulsé par des militantes du Parti des travailleurs socialistes (PTS) en Argentine, étudiantes, travailleuses ou chômeuses, puis a fleuri dans plusieurs pays, reprenant le slogan « Du pain et des roses », symbole de la lutte des ouvrières en 1912 du textile aux Etats-Unis contre leurs conditions de travail et leurs bas salaires. Ces groupes militants de femmes se donnent pour objectif de résister aux attaques du patronat et des gouvernements bourgeois en construisant une résistance féministe ouvrière et internationaliste. Elles ont écrit un manifeste internationaliste qui vient d’être traduit en français, qui détaille comment cette lutte pour l’organisation des femmes ne peut être victorieuse sans la remise en cause du système d’exploitation dans lequel nous vivons à travers une révolution socialiste.

Link: https://www.revolutionpermanente.fr/Pan-y-Rosas-Manifeste-feministe-internationaliste

Manifeste international de l’organisation de femmes Pan y Rosas « Pan y rosas » : du pain, des roses, et des femmes aux avant-postes Dans le film Pride, comme dans un film de Ken Loach sur la lutte de femmes de ménage à Los Angeles, on retrouve ce slogan, repris en chanson : Bread and Roses, « du pain et des roses ». Né lors de la mobilisation des ouvrières textiles américaines en 1912 contre leurs conditions de travail et leurs bas salaires, ce slogan est aussi le nom que s’est donné le collectif féministe Pan y Rosas, qui existe dans différents pays. Impulsé au début des années 2000 par des militantes du PTS en Argentine et des étudiantes et travailleuses indépendantes, celui-ci s’est forgé dans les luttes ayant suivi la crise économique de 2001 en Argentine. Il a notamment été au cœur du soutien à la lutte de l’usine textile Bruckman, récupérée par ses ouvrières suite au départ du patron, pour échapper aux licenciements.

« Du pain et des roses », c’est rappeler que le mouvement ouvrier révolutionnaire n’a jamais été, contrairement à ce qu’ont voulu faire croire les organisations staliniennes, une lutte qui se limitait aux questions économico-syndicales (le pain). Dans la société d’aujourd’hui, se battre pour l’égalité salariale entre hommes et femmes, mais aussi pour le droit « aux roses » :

- le droit de vivre librement, de se marier et d’avoir des enfants ou non, en finir avec le machisme et les violences faites aux femmes, mais aussi, le droit à l’éducation pour toutes, l’accès à la culture, etc.

  •  c’est lutter pour l’organisation des femmes, pour que nous reprenions notre destin entre nos mains et que nous livrions cette bataille pour nous et l’ensemble de notre classe. Mais cette lutte ne peut être victorieuse sans remettre en cause le système d’exploitation dans lequel nous vivons, qui donne à nos exploiteurs le pouvoir de décider de nos vies.

    Après l’Argentine, Pan y Rosas a fleuri dans plusieurs pays, avec l’idée de construire des groupes militants de femmes, étudiantes, travailleuses ou chômeuses, pour résister aux attaques des patrons et des gouvernements contre le droit des femmes avec cette même démarche de construire une résistance féministe ouvrière et internationaliste.

    Manifeste international de l’organisation de femmes Pan y Rosas

    Le 8 mars 2017, lors de la journée internationale de lutte des femmes, nous étions des milliers à nous mobiliser, dans différents pays, sous le mot d’ordre #GrèveInternationaleDesFemmes. Ce mot d’ordre ne tombe pas du ciel : il s’est forgé dans les récentes luttes massives des femmes contre les violences machistes et les féminicides, comme en Argentine, au Chili, au Mexique et en Italie ; pour le droit des femmes à disposer de leur corps ; le droit à l’avortement comme en Pologne, en Irlande et en Corée du Sud ; contre les inégalités salariales femme/homme comme en France et en Islande ou encore dans les mobilisations contre la misogynie de Donald Trump, qui ont été massives non seulement dans plusieurs villes nord-américaines, mais aussi dans des villes européennes comme Londres, Barcelone, Berlin, Amsterdam, Budapest et Florence. Ces luttes des femmes expriment également la résistance à la crise capitaliste en cours, que la classe dominante et ses gouvernements veulent faire payer à la population travailleuse, en attaquant les conditions de vie de la classe ouvrière et des secteurs les plus précaires, qui comptent une majorité de femmes.

    Mais, de plus, ce 8 mars 2017 correspondait au centenaire de la Révolution russe, qui a débuté lors de la Journée Internationale des Femmes de 1917, avec une grève des ouvrières du textile de Saint Petersbourg et qui s’est rapidement propagée, s’étendant à d’autres secteurs de la population, atteignant son point culminant au mois d’octobre, avec la prise du pouvoir par la classe travailleuse. Une révolution qui, en si peu de mois, a permis de conquérir des droits et des libertés pour lesquels nous nous battons encore aujourd’hui, cent ans plus tard, à travers le monde.
    Nous, les femmes qui signons et souscrivons à ce texte, revendiquons cette tradition que nous considérons plus que jamais nécessaire dans la lutte pour notre émancipation. Nous sommes convaincues qu’elle ne pourra être atteinte définitivement que lorsque nous aurons éradiqué tous les vestiges de cette société basée sur l’exploitation et l’oppression de millions d’êtres humains, et que nous aurons construit, sur ses ruines, une nouvelle société socialiste.

    Pan y Rosas, mars 2017

    Allemagne, Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, État Espagnol, États-Unis, France, Mexique, Uruguay, Venezuela

    L’histoire de la lutte des classes est également l’histoire de la lutte des femmes
    Ces mobilisations de femmes dans le monde entier auxquelles nous avons assisté ne sont pas une nouveauté. Depuis des temps anciens, les femmes ont opposé une résistance à la discrimination, la soumission et l’inégalité que nous impose la domination patriarcale ; et à toutes les formes d’oppression et l’exploitation imposées par les classes dominantes au cours de l’histoire. Les femmes paysannes européennes, pendant des siècles, se sont rebellées contre la pénurie et les prix élevés du pain et de la farine, qui condamnaient leurs familles à la famine et la misère. En Amérique latine, nombreuses sont les histoires de femmes courageuses des peuples autochtones qui ont résisté à la domination coloniale. Au temps de la Révolution française, les femmes ont dénoncé le fait que la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen ne prenait pas en considération leurs propres droits de citoyennes, tandis qu’une foule dirigée par les femmes des quartiers populaires de Paris se dirigeait à Versailles pour réclamer au Roi de meilleures conditions de vie. Et, près d’un siècle plus tard également, les femmes de la population pauvre de Paris ont résisté héroïquement sur les barricades de la Commune, défendant le premier gouvernement ouvrier de l’histoire qui les avait converties en citoyennes, avec des droits égaux à ceux des hommes. Pour défendre ces acquis historiques, des bataillons armés ont combattu jusqu’à l’écrasement sanglant infligé par la bourgeoisie française, au prix de déportations et d’exécutions.
    Avant la Première guerre mondiale, des milliers de femmes se mobilisaient en Angleterre, en France et dans d’autres pays, pour obtenir le droit de vote et d’éligibilité dans les élections. Aux États-Unis, beaucoup de ces suffragettes luttaient en même temps pour l’abolition de l’esclavage. Dans les pays d’Amérique latine et les Caraïbes, les femmes se battaient pour accéder aux études supérieures et l’ensemble des droits civils qui leur étaient toujours refusés. Bien souvent, ces femmes ne trouvaient un écho à leurs revendications que dans les partis socialiste-ouvriers de l’époque. En Europe, pendant la guerre, ce sont les travailleuses qui ont essayé d’empêcher l’envoi de troupes au front, freinant les trains par des émeutes, des mutineries et des révoltes, mais aussi en sabotant la production d’armement et de munitions. De plus, elles furent en première ligne des manifestations contre la pénurie et le coût trop élevé de la vie qu’imposait ce conflit guerrier.

    C’était le cas des ouvrières du textile de Saint Petersbourg, en Russie, qui, en 1917, ont choisi de commémorer la Journée Internationale des Femmes en entrant en grève et en revendiquant « Pain, Paix et Fin de l’autocratie ! ». Sans concertation, les plus opprimées des femmes et les plus exploités des prolétaires ont ouvert le chemin du plus grand processus révolutionnaire de l’histoire du mouvement ouvrier : la Révolution russe. Dirigée par le Parti Bolchevique de Lénine et Trotsky, elle mit en échec le régime tsariste et, quelques mois plus tard, a imposé un gouvernement des travailleurs, basé sur les conseils ouvriers. Il y a cent ans, les femmes russes ont conquis, avec la révolution prolétarienne, des droits pour lesquels aujourd’hui, un siècle plus tard, nous nous battons toujours dans la majorité des démocraties capitalistes, y compris pour certains qui devraient être considérés comme élémentaires, comme le droit à l’avortement.

    L’histoire est alimentée par l’héroïsme, l’abnégation et le courage de millions de femmes anonymes et d’autres, dont le nom est toujours connu, comme la courageuse battante aymara, Bartolina Sisa de Bolivie, les ouvrières socialistes Teresa Flores du Chili ou Carolina Muzzilli d’Argentine, la générale zapatiste Amelia Robles du Mexique, l’organisatrice ouvrière Mother Jones des États-Unis, la socialiste féministe franco-péruvienne Flora Tristan, les communardes Elizabeth Dimitrieff et Louise Michel, les révolutionnaires internationalistes comme l’allemande Clara Zetkin ou la russe Nadejda Kroupskaïa, les opposantes qui se sont affrontées au stalinisme comme Nadejda Joffé de Russie, Marvel Scholl et Clara Dunne des États-Unis, Patricia Galvao du Brésil, ou Pen Pi Lan de Chine. Elles n’étaient pas toutes féministes – dans le sens où l’on pourrait aujourd’hui définir ce terme – mais elles se sont toutes affrontées à l’oppression, aux côtés des exploité- es, et se sont battues pour leur organisation, leurs droits et leur émancipation. Elles n’ont pas non plus toutes soutenu une perspective socialiste et révolutionnaire – celle que nous défendons – mais elles font partie de ces femmes, parmi tant d’autres, dont les combats sont étudiés par les femmes qui rejoignent Pan y Rosas.
    Nous portons avec fierté l’héritage de cette tradition de femmes, comme Rosa Luxembourg qui, surmontant d’énormes épreuves, a démontré que ni l’oppression de genre, ni la discrimination subie en fonction de son origine ou de sa nationalité, ne constituaient un obstacle pour qu’elle – avec ses fortes convictions, son abnégation et son courage – puisse devenir l’une des plus grandes dirigeantes révolutionnaires de l’histoire.

    De nouveaux droits et des conflits croissants : un héritage contradictoire pour les femmes dans les dernières décennies

    Au cours du dernier demi-siècle, la vie de la majorité des femmes en Occident1 – particulièrement dans les pays centraux et les grandes métropoles – a changé à un point qui aurait été impensable à peine un siècle plus tôt. En seulement quelques décennies, grâce aux luttes des femmes, les lois et les normes qui nous interdisaient l’accès à tous les niveaux de l’éducation, ou à exercer une fonction publique, ont été supprimées ; des droits démocratiques élémentaires ont été conquis, nous donnant une indépendance légale vis-à-vis de la tutelle patriarcale du père et du mari ; et de grands secteurs urbains de masses féminines, dans de nombreux pays, ont accédé à plus de possibilités légales de décider de son projet de vie, de sa sexualité et de son corps.

    Même s’il ne s’agit pas d’un processus linéaire, qui évolue progressivement dans le même sens, et qu’il ne s’étend pas à l’ensemble des femmes, son avancée est si importante que la classe capitaliste n’a d’autre choix que de le reconnaître et de mettre en première ligne de ses politiques ultra-réactionnaires des femmes comme Angela Merkel en Allemagne ou Theresa May en Grande-Bretagne. On pourrait dire, en comparaison aux décennies antérieures, que dans une grande mesure les contraintes légales empêchant les femmes d’accéder à des lieux de pouvoir se sont réduites (à l’exception du Vatican).

    Il s’agit d’une très grande différence avec l’époque où des socialistes révolutionnaires comme Rosa Luxembourg combattaient l’impérialisme allemand, alors qu’on interdisait aux femmes, aux étudiants et aux apprentis d’adhérer aux organisations politiques et d’assister aux réunions où l’on parlait de politique.
    D’un certain point de vue, la plupart des droits actuels sont le fruit des luttes féministes des années 60 et 70 qui ont pu révéler, conceptualiser et transformer en étendard politique et en programme de lutte le fait que « le privé est politique ». À cette période, différents courants du féminisme radical criaient à la face du monde que l’inégalité politique, économique, sociale, culturelle et sexuelle des femmes par rapport aux hommes n’était pas un problème spécifique de chaque femme et de chaque homme limité aux relations dans le domaine de la vie privée. Il y avait un propos qui se retrouvait dans une infinité de témoignages individuels, démontrant que la singularité de cette expérience renfermait, dialectiquement, son véritable caractère structurel. Ce qui était stipulé comme « naturel » était la cristallisation de processus socio-historiques complexes.

    En ces décennies, le patriarcat, mais aussi le colonialisme, le racisme et la norme hétérosexuelle étaient questionnés comme systèmes de domination, signe d’une forte radicalisation sociale et politique des masses, qui se levaient contre l’exploitation capitaliste en Occident et l’oppression exercée par la bureaucratie stalinienne dans les états ouvriers d’Europe de l’Est. Cependant, bien que les changements qui survinrent alors dans la vie quotidienne de millions de femmes aient été considérés par certains analystes comme véritablement « révolutionnaires » en comparaison à la vie des femmes des générations antérieures, il est évident que ces droits conquis dans le cadre des démocraties capitalistes n’éliminèrent pas l’oppression patriarcale et encore moins l’exploitation qui maintient des millions d’êtres humains soumis à l’esclavage salarial, sombrant dans la barbarie de la faim, des guerres, de la pollution, des inondations et des sécheresses, du chômage, de la misère. Aujourd’hui, parmi les plus de mille millions d’êtres humains qui vivent dans une pauvreté extrême, 70 % sont des femmes et des filles.

    Ainsi, les droits acquis par de grands secteurs de masses féminines, coexistent et contrastent brutalement avec les statistiques d’oppression qui indiquent par exemple que, chaque année, entre un million et demi et 3 millions de femmes et de filles sont victimes de violence machiste.

    Que malgré les énormes avancées technologiques et scientifiques, à échelle mondiale, 500 000 femmes meurent annuellement de complications au cours d’une grossesse ou d’un accouchement, alors que 500 femmes meurent quotidiennement des conséquences d’avortements clandestins, pratiqués dans de mauvaises conditions. Que la prostitution s’est transformée en une industrie aux proportions énormes et extrêmement rentables, qui alimente elle-même massivement les réseaux de traite d’êtres humains.

    Que parmi les 960 millions d’analphabètes, 70 % sont des femmes et des filles. Que la « féminisation » du travail a également augmenté de manière exponentielle : nous, les femmes, constituons plus de 40 % de la force de travail, dont 50,5 % sont précarisées, en plus de porter sur nos épaules la double journée de travail qu’impliquent les tâches domestiques. Sans compter, plus récemment, le tournant à droite auquel nous avons pu assister dans de nombreux pays occidentaux, qui visait à attaquer bien plus encore les droits mentionnés précédemment. Par exemple, aux États-Unis, Donald Trump entend avancer avec détermination contre le droit à l’avortement, sur la base de coupes budgétaires qu’ont déjà opéré en amont les gouvernements de nombreux États, sous l’administration du Parti Démocrate, avec Barack Obama à la Maison-Blanche. En Europe, il y a eu d’importantes mobilisations de la droite et de fondamentalistes catholiques non seulement contre le droit à l’avortement mais aussi contre le mariage pour tous et d’autres droits démocratiques.

    Que la « féminisation » du travail a également augmenté de manière exponentielle : nous, les femmes, constituons plus de 40 % de la force de travail, dont 50,5 % sont précarisées, en plus de porter sur nos épaules la double journée de travail qu’impliquent les tâches domestiques. Sans compter, plus récemment, le tournant à droite auquel nous avons pu assister dans de nombreux pays occidentaux, qui visait à attaquer bien plus encore les droits mentionnés précédemment. Par exemple, aux États-Unis, Donald Trump entend avancer avec détermination contre le droit à l’avortement, sur la base de coupes budgétaires qu’ont déjà opéré en amont les gouvernements de nombreux États, sous l’administration du Parti Démocrate, avec Barack Obama à la Maison-Blanche. En Europe, il y a eu d’importantes mobilisations de la droite et de fondamentalistes catholiques non seulement contre le droit à l’avortement mais aussi contre le mariage pour tous et d’autres droits démocratiques.

    Si nous en sommes là, c’est parce que l’étape de montée de la lutte des classes et de radicalisation de masse que nous avons évoquée, dans laquelle ont émergé les mouvements sociaux tel que le mouvement féministe, a été défaite et déviée. Ce que l’on appelle « néolibéralisme » n’est rien de moins que la réaction brutale du capitalisme face à cette vague de mobilisations, de grèves et de processus révolutionnaires qui s’est attaquée à la domination du capital dans les années 70.
    À cause de la trahison des directions réformistes des masses – qu’elles soient politiques ou syndicales – en Orient et en Occident, le capitalisme a réussi à survivre à ses crises, en imposant une politique économique qui a conduit des millions de travailleurs au chômage, fragmentant et délocalisant la classe travailleuse, et valorisant les valeurs de l’individualisme et du « sauve qui peut » par le biais d’une situation de déliquescence générale. Pour imposer cette défaite, les classes dominantes n’ont pas seulement compté sur la collaboration des directions traîtres des classes exploitées. Elles ont dû aussi assimiler, coopter et affaiblir les ailes les plus radicales des mouvements sociaux qui remettaient en cause le capitalisme patriarcal, hétéro-sexiste, raciste et colonialiste.

    Les droits conquis pendant cette période ont été, d’une certaine manière, une « reconnaissance » par les classes dominantes du nouveau rapport de force imposé par les masses, et un moyen de répondre à ce mécontentement et à la féminisation croissante de la force de travail.

    De cette manière, le capitalisme a cherché à répondre à la nécessité qu’il avait d’augmenter la main d’œuvre disponible, en augmentant la concurrence entre les masses salariées, et en avançant dans l’offensive contre les conquêtes 16 historiques de la classe ouvrière (comme il l’a fait depuis ses origines, développant une « armée industrielle de réserve » pour baisser les salaires, divisant les rangs de la classe ouvrière entre hommes et femmes, natifs et étrangers, titulaires et contractuels, etc.).

    Le divorce entre la classe ouvrière et les mouvements sociaux a ainsi été consommé, après une longue histoire de barricades partagées. Le féminisme a abandonné la lutte contre l’ordre social qu’impose le capital, et qui pousse de nombreuses femmes dans la misère ; à l’inverse, l’absence d’horizon révolutionnaire et la trahison de ses propres directions a conduit la classe ouvrière à une logique corporative économiciste. Les femmes qui recherchaient une voie pour leur émancipation n’ont pas trouvé, pendant ces décennies de profonde restauration conservatrice, de modèle à suivre dans les pays qui prenaient le nom de « socialisme réel », comme cela avait pu être le cas au début du XXe. Elles ne trouvaient là que la confirmation que toute tentative de s’opposer à la domination existante ne pouvaient que générer de nouvelles et monstrueuses formes de domination et d’exclusion, car le stalinisme se chargeait de rétablir l’ordre familial patriarcal en promouvant le rôle des femmes comme épouses, mères et femmes au foyer ; il se chargeait d’interdire le droit à l’avortement, de criminaliser la prostitution comme au temps du tsarisme, de réduire drastiquement ou d’éliminer directement les politiques publiques de création de laveries, cantines et logements collectifs, et de liquider toutes les organisations de femmes dans le parti.

    Et ce n’est qu’une partie des moyens par lesquels la bureaucratie stalinienne a détruit les mesures audacieuses mises en place grâce à la Révolution russe de 1917.
    Sur la défaite de cette vague de radicalisation des masses des années 70 a germé l’idée que le capitalisme était invincible et que toute perspective de transformation radicale des conditions d’existence des exploité-es et des opprimé-es était purement utopique. Nous ne pouvons pas nier que les droits conquis pendant cette période (accordés à certains secteurs sociaux, dans certains pays, et en danger permanent d’être remis en cause par des nouvelles conjonctures politiques), ont constitué une certaine « victoire ». Mais nous voulons souligner que cela a servi aussi à mettre en place cette défaite plus fondamentale, prolongée et nécessaire pour le capital, qui a été appelée « néolibéralisme ». Quand l’idée de transformation radicale de la société a été éliminée de l’imaginaire des masses, la lutte pour l’émancipation a été majoritairement abandonnée par le féminisme lui aussi, et troquée pour une stratégie de réformes progressives, d’accumulation de droits au sein des démocraties capitalistes, cherchant de manière utopique la modification du système « de l’intérieur ». La critique radicale du capitalisme s’est métamorphosée en une recherche de l’élargissement de la citoyenneté dans les démocraties capitalistes dégradées qui n’ont rien à offrir pour pallier à la misère qui structure la vie des masses. Bien que l’ordre culturel, social et moral fondé sur les relations de production capitalistes soit critiqué en certaines occasions, cette critique apparaît toujours déliée de l’ordre économique de l’exploitation du travail humain qui le nourrit, et qui n’est jamais remis en cause.

    Cela a permis que le féminisme hégémonique, durant les décennies de néolibéralisme, ait été celui qui se repliait sur la lutte pour la reconnaissance des droits, sur le terrain de « l’État démocratique ». Cet État qui n’est pas neutre mais bien capitaliste, qui est garant de la violence que représente l’exploitation salariale de millions d’êtres humains au profit de la classe dominante minoritaire et parasitaire, qui s’est fondée à l’abri de sa priorité privée moyennant l’exercice du monopole de la violence contre les exploités ; ce même État censé reconnaître les abus commis contre les femmes et distribuer des peines à leurs auteurs.
    C’est ainsi que nous arrivons à l’époque actuelle dans laquelle – tout en ayant obtenu la reconnaissance du fait que le viol marital est une violence et non un droit du conjoint, que l’abus sexuel est une violence et non une habitude culturelle, que le harcèlement de rue est une violence et non une infraction sans importance – paradoxalement, cette même logique d’exiger la reconnaissance, de la part de l’État et de son système pénal, a abouti au résultat inverse de ce qui était recherché. Car, tout en avançant dans l’établissement de droits auparavant inexistants, ainsi que dans la visibilisation des conditions que l’oppression patriarcale nous impose, tout cela a été réduit et assimilé à un problème individuel d’écriture du droit pénal.
    Après avoir lutté pendant des décennies pour dénaturaliser l’oppression des femmes, pour démontrer que le machisme est structurel des sociétés de classes et que le patriarcat est un système qui imprègne nos vies et relations interpersonnelles, on en est arrivé à mettre au premier plan les comportements violents les plus extrêmes, y compris mortels, de quelques individus, tandis que la société capitaliste patriarcale, avec son État et ses institutions, fut épargnée et « libérée » de toute responsabilité, renforçant par là-même leur pouvoir punitif.

    C’est comme si le capitalisme patriarcal nous avait dit, à nous les femmes : « Les démocraties capitalistes vous ont 19 déjà concédé le droit à l’égalité devant la loi ; maintenant, l’émancipation est une question individuelle dont toi seule est responsable ». La droite conservatrice a elle aussi élaboré son propre « féminisme », sur cette nouvelle conception libérale : si l’on ne parle que de droits individuels, alors on peut revendiquer « le droit à être femme au foyer et à s’occuper du mari et de la famille », le « droit à reléguer au second plan les carrières professionnelles pour se dédier pleinement à l’éducation des enfants », etc.

    Le féminisme libéral ne peut pas s’affronter aux attaques de la droite, car il a fini pas tomber dans son propre piège. Mais comme l’ont démontré les récentes mobilisations de femmes à travers le monde, et les débats que la victoire de Trump a générés aux États-Unis, ce féminisme libéral – que certaines nord-américaines nomment aujourd’hui « féminisme des entreprises » et auquel est identifié Hillary Clinton (Parti Démocrate) – est finalement entré en crise. Seul un féminisme qui aspire à se transformer en mouvement politique de masses, où la lutte pour plus de droits et de libertés démocratiques est liée à la dénonciation de ce régime social d’exploitation et de misère pour l’énorme majorité des gens, avec l’objectif de le faire tomber, peut être véritablement émancipateur.

    Réforme de l’État capitaliste et meilleur système punitif pour abattre le patriarcat : une utopie réactionnaire

    Finalement, nous avons obtenu, dans la plupart des démocraties capitalistes, avec toutes ses institutions – dont le Droit Pénal – d’être reconnues comme victimes du machisme. Et il est vrai que les femmes continuent à être victimes de la violence de genre, de harcèlement et d’abus sexuels, de viols dans la rue, à l’école, au bureau, à l’Église et au foyer. Victimes d’une exploitation qui atteint des niveaux insoutenables, qui détruisent notre santé et notre vie. Nous sommes aussi et surtout des victimes « collatérales » des guerres. Et nous sommes victimes de féminicides.

    Cependant, le patriarcat tient aussi, de cette manière, à ce que nous nous considérions et que nous soyons considérées comme impuissantes. Des victimes victimisées, alors impuissantes pour transformer radicalement les bases de cette oppression ; réduites à réclamer individuellement que l’État applique ses peines (elles aussi individuelles) aux coupables ; obligées d’entrer dans la logique punitive de cette politique droitière qui s’étend dans le monde entier, de donner notre confiance aux mêmes institutions de ce système social qui légitime et garantit notre subordination. Pour obtenir cela, le capitalisme patriarcal a besoin d’occulter de notre mémoire historique toutes les luttes de nombreuses générations de femmes. Il lui faut instiller en nous un sentiment de rancœur envers les hommes qui partagent avec nous les chaînes de l’exploitation capitaliste et rompre les liens de solidarité avec les autres femmes, elles aussi exploitées et opprimées. Il a besoin de faire taire cette haine sociale contre les conditions dégradantes dans lesquelles a vécu et vit la grande majorité de l’humanité et qui a fait surgir de puissantes convictions de combat tout au long de l’Histoire.

    Femmes de Pan y Rosas, nous n’acceptons pas d’être les victimes impuissantes que ce système veut que nous soyons. Nous choisissons, au contraire, les puissantes convictions qui se nichent dans la haine de ce système de production qui nous pousse à nous considérer comme des victimes – comme des millions d’être humains à travers toute la planète – d’un ordre social qui empeste. Il ne s’agit pas d’une haine individuelle, subjective. C’est la haine sociale qui toujours, comme une étincelle, enflamme l’insurrection de toutes et tous les esclaves, tout au long de l’histoire. Comme le disait la communarde Louise Michel à la fin du XIXe siècle : « Gare pour le vieux monde le jour où les femmes diront : C’est assez comme cela ! Elles ne lâchent pas, elles ; en elles s’est réfugiée la force, elles ne sont pas usées. Gare aux femmes ! […] Oui, gare aux femmes, quand elles se lèveront, écœurées devant tout ce qui se passe ! Ce jour-là ce sera fini, le monde nouveau commencera. ». Femmes de Pan y Rosas, nous nous battons pour ce monde nouveau libéré de tous les fers qui aujourd’hui emprisonnent les forces de l’Humanité, et qui pèsent doublement sur les femmes.

    Pan y Rosas est un regroupement internationaliste de femmes d’Allemagne, Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Espagne, États-Unis, France, Mexique, Uruguay et Venezuela.

    Nous sommes des militantes de courants qui font partie de la Fraction Trotskyste - Quatrième internationale qui, avec des travailleuse et étudiantes indépendantes, partageons l’idée posée de manière synthétique par la socialiste Louise Kneeland, en 1914, qui affirmait que « la personne qui est socialiste mais pas féministe manque d’ouverture, celle qui est féministe sans être socialiste manque de stratégie ». C’est-à-dire que nous considérons que seule la révolution sociale, qui mettra fin à ce système d’exploitation, peut établir les bases pour l’émancipation des femmes. Nous présentons ici quelques points centraux de notre programme politique.

    Nous ne demandons pas, nous exigeons notre droit au pain, mais aussi aux roses !

    Ni una menos !

    Nous, les femmes de Pan y Rosas, sommes en première ligne des luttes pour la liberté et les droits démocratiques, et nous combattons également les préjugés sexistes au sein de la classe ouvrière, répandus par les institutions de la classe dominante et ses agents dans les rangs des prolétaires, à l’image de la bureaucratie syndicale.

    À la différence d’autres courants qui se revendiquent de gauche, nous ne considérons pas que la lutte pour nos droits doit être repoussée « après les révolutions » ou « après la prise du pouvoir », comme le suggèrent le stalinisme et tous les courants populistes. Nous soutenons que, tout en luttant pour un système où n’existent ni l’exploitation ni l’oppression, il est de notre devoir indispensable d’impulser les luttes des femmes pour les meilleures conditions de vie possible à l’intérieur même du système, ainsi que pour les droits démocratiques les plus élémentaires. C’est le cœur de notre pratique militante quotidienne, y compris dans des pays comme l’Argentine où nous avons intégré le FIT (Frente de Izquiera y Trabajadores) avec d’autres partis trotskystes, et où nos élu-es parlementaires sont reconnu-es pour faire de leur siège au congrès national et dans les législatures de province une tribune et un point d’appui pour les luttes des femmes pour leurs droits.

    Nous sommes également en désaccord avec les courants populistes lorsqu’ils soutiennent que l’organisation indépendante des femmes dans la lutte pour leurs droits « menace » l’unité de la classe ouvrière. Au contraire, nous considérons que lorsqu’une femme est humiliée, violentée ou discriminée par ses frères de classe, la classe ouvrière en est fortement fragilisée. Mais quand les femmes travailleuses prennent en main la lutte pour leurs droits, la classe ouvrière en ressort renforcée pour s’opposer aux exploiteurs. Ce n’est pas le combat contre le machisme qui nous divise : c’est la classe dominante qui répand ces préjugés misogynes, sexistes, homophobes mais aussi xénophobes, racistes et nationalistes pour diviser la classe des exploité-es et des opprimé-es.

    Les chiffres concernant les violences faites aux femmes sont très élevés, particulièrement contre les filles et les jeunes femmes. À cette violence psychologique, physique, liée au travail, sexuelle, il faut également ajouter que le féminicide est l’une des principales causes de la mort des femmes. Dans la majorité de ces crimes, les responsables sont des hommes proches des victimes. Il s’agit du dernier maillon, mortel, d’une longue chaîne de violences qui trouvent leurs racines dans la société patriarcale et qui se légitiment, se reproduisent et se justifient à travers l’État capitaliste et les institutions de son régime de domination.
    C’est pour cela que nous crions : Stop aux violences contre les femmes ! Pas une de plus ! Nous voulons continuer à vivre ! Nous exigeons des pouvoirs publics la mise en œuvre de tous les moyens nécessaires pour pallier les conséquences de la violence machiste et empêcher les féminicides : des refuges pour les victimes, le maintien du salaire lors des licenciements économiques, des aides couvrant les dépenses alimentaires familiales pour les femmes sans emploi, des crédits logements à taux zéro, etc.

    Nous affirmons que s’ils touchent à une seule d’entre nous, nous nous organiserons par milliers ; dans ce but nous avons impulsé la création de comités de femmes dans tous les lieux de travail, d’étude et dans les quartiers. Nous souhaitons développer des mouvements de lutte des femmes indépendants de l’État et des partis politiques du régime capitaliste. C’est l’unique solution qui nous reste en tant que femmes pour affronter et stopper la violence machiste.

    Droit à l’avortement libre, sûr et gratuit !

    Dans de nombreux pays les femmes n’ont pas le droit de décider quand et comment être mères. L’interdiction de l’avortement, cependant, n’empêche pas qu’ils se produisent dans l’insécurité et la clandestinité, entraînant la mort des plus pauvres. Celles qui ont la chance de survivre à cette situation dramatique souffrent ensuite de séquelles sanitaires. Bien que nous n’ayons pas le droit à l’avortement libre et gratuit, réalisé dans des conditions d’hygiène dignes et par un personnel médical qualifié, l’accès aux contraceptifs continue à être difficile.

    C’est pour cela que nous crions : Stop aux violences contre les femmes ! Pas une de plus ! Nous voulons continuer à vivre ! Nous exigeons des pouvoirs publics la mise en œuvre de tous les moyens nécessaires pour pallier les conséquences de la violence machiste et empêcher les féminicides : des refuges pour les victimes, le maintien du salaire lors des licenciements économiques, des aides couvrant les dépenses alimentaires familiales pour les femmes sans emploi, des crédits logements à taux zéro, etc. Nous affirmons que s’ils touchent à une seule d’entre nous, nous nous organiserons par milliers ; dans ce but nous avons impulsé la création de comités de femmes dans tous les lieux de travail, d’étude et dans les quartiers. Nous souhaitons développer des mouvements de lutte des femmes indépendants de l’État et des partis politiques du régime capitaliste. C’est l’unique solution qui nous reste en tant que femmes pour affronter et stopper la violence machiste.

    Alors que nos enfants sont une « gêne » pour les patrons qui ne mettent à disposition aucune crèche dans les entreprises et les usines, refusent de payer des charges sociales ou licencient des femmes enceintes, ce qui est sûr, c’est qu’à travers la famille, l’État, l’Église et l’éducation, on nous martèle que nous ne sommes pas de vraies femmes si nous ne devenons pas mères.

    Nous exigeons les crèches gratuites à la charge du patron et de l’État dans les entreprises, 24 heures sur 24. Les pleins droits pour les femmes travailleuses enceintes et mères. Nous luttons pour une éducation sexuelle afin de pouvoir décider, la contraception gratuite pour ne pas avoir à avorter, le droit à l’avortement, sûr et gratuit pour ne pas mourir. Nous exigeons la séparation totale et effective de l’Église et de l’État.

    Place aux femmes travailleuses !

    L’augmentation de la féminisation de la force de travail, surtout dans les postes précaires, de moindre qualification avec un salaire plus faible, ainsi que les fortes inégalités, amplifient les conditions d’oppression des femmes. Avec des salaires inférieurs aux hommes, des conditions de travail très dures, exclues pour la majorité des organisations syndicales pour lutter pour nos droits au travail, nous, les femmes travailleuses, constituons l’un des secteurs les plus exploités de la classe ouvrière mondiale. Dans ces conditions d’exploitation, nous sommes victimes de harcèlement sexuel et moral dans nos lieux de travail. Nous n’avons pas le même droit d’accès à un poste de travail digne, ou à des promotions, simplement parce que nous sommes des femmes. La discrimination commence dès l’embauche, les hommes devant seulement montrer leurs compétences et expériences, alors que nous devons montrer notre corps, dire que nous ne voulons pas d’enfants ou cacher leur existence, quand nous n’avons pas à nous soumettre aux pires humiliations.
    Cette oppression est amplifiée pour les femmes migrantes : aux États-Unis comme en Europe de l’Ouest, les femmes latino-américaines, africaines, asiatiques ou d’Europe de l’Est souffrent des conséquences des lois xénophobes, de l’immigration, de la persécution policière et d’une exploitation plus importante pour les pires postes de travail, alors que l’extrême-droite raciste et xénophobe progresse.
    Les femmes des peuples indigènes, les femmes noires, sont aussi les plus exploitées et les plus opprimées dans leurs propres pays. Les femmes lesbiennes et trans sont discriminées au travail, subissent les persécutions policières et institutionnelles et l’exclusion sociale, même si dans certains pays les lois contre les discriminations avancent, 29 comme le mariage pour tou-tes ou concernant l’identité de genre. Mais cette égalité devant la loi ne signifie pas l’égalité devant la vie.
    C’est pour cela que nous luttons pour la fin du travail précaire. Pour un CDI et la titularisation de toutes les travailleuses et travailleurs. À travail égal, conditions, droit et salaires égaux. Égalité de promotions. Répartition du travail entre toutes et tous pour en finir avec le chômage, sans perte de salaire. Nous exigeons la création de commissions de femmes dans tous les lieux de travail et organisations syndicales. Assez des discriminations !

    Mais en même temps, le capitalisme qui pousse les femmes vers le travail productif, n’enlève pas à celles-ci la responsabilité de la reproduction de la force de travail, qui se fait dans le foyer, qui n’est pas rémunéré, condamnant les femmes à une « double journée de travail. » Bien que dans les pays plus développés et les centres urbains il y a une tendance à ce que certains salariés embauchent des travailleuses domestiques (elles aussi des femmes, et pour la plupart migrantes) pour s’occuper de ces tâches, le travail domestique est loin d’être éliminé à une échelle globale. Dans les secteurs les plus paupérisés, 30 ainsi que dans les pays plus arriérés et à la campagne, le travail domestique repose sur les femmes et les filles. La raison est précisément que le travail domestique non rémunéré, est fondamental aux profits des capitalistes. Il les dispense de payer les travailleurs et travailleuses pour les tâches qui concernent leur propre reproduction quotidienne comme force de travail (alimentation, vêtements, etc.) et la force de travail considérée comme improductive par le capital (comme les femmes au foyer, les demandeurs d’emploi, la future génération de travailleurs et travailleuses ou la génération antérieure qui a déjà été « écartée » de l’exploitation salariale). Encourager et soutenir la culture patriarcale ancestrale, selon laquelle les tâches ménagères sont des tâches qui incombent « naturellement » aux femmes, permet que ce « vol » par les capitalistes reste invisible.

    Nous savons que l’oppression patriarcale existe depuis les temps anciens, bien avant que le système capitaliste ne se développe. Cependant, aucun autre système social que le capitalisme n’a donné au patriarcat de telles conditions, non seulement pour exister, mais aussi pour renforcer l’oppression de millions des femmes dans le monde entier et, paradoxalement, creuser sa propre tombe en élargissant les rangs de la classe ouvrière, avec des millions des femmes poussées à travailler en dehors de leur domicile.

    Par conséquent, nous ne pouvons pas dénoncer l’oppression de genre sans souligner que l’immense majorité de l’humanité appartient aux classes exploitées et que cette oppression renforce encore plus l’exploitation capitaliste des femmes.
    Pan y Rosas soutient que ce sont les femmes et les hommes qui produisent toute la richesse sociale, expropriée par les capitalistes, qui peuvent mettre fin à ce système d’exploitation et d’oppression. Et que, dans sa lutte contre l’exploitation, la classe ouvrière trouvera un allié parmi celles et ceux qui cherchent à s’émanciper du joug de l’oppression qu’ils subissent à cause de la couleur de leur peau, leur sexualité, leur genre, ou leur origine ethnique. C’est cette alliance, dirigée par la classe ouvrière, qui peut blesser mortellement le capitalisme, contrairement à des « alliances politiques d’opposition » aux gouvernements, dirigées par des secteurs « progressistes » représentant les intérêts d’autres secteurs du patronat, et qui vivent aussi de l’exploitation de notre force de travail.

    C’est pourquoi nous soutenons qu’il est nécessaire de s’organiser indépendamment des capitalistes, de leur État, leurs partis politiques qui défendent leurs intérêts ; mais également indépendamment de ceux qui disent représenter la classe ouvrière et qui vivent pourtant des avantages de l’État ou du patronat, et qui ne font que trahir les luttes de la classe ouvrière. Autrement dit, nous revendiquons l’indépendance politique de la classe ouvrière et encourageons toutes les mesures prises à cet égard.

    Notre lutte pour l’émancipation des femmes fait partie de notre lutte pour la construction d’un parti révolutionnaire de la classe ouvrière dans chaque pays et au niveau international, avec un programme anticapitaliste, ouvrier et révolutionnaire, conduisant à la révolution socialiste, dans le but d’instaurer un gouvernement ouvrier, qui sera, à son tour, une tranchée dans la lutte pour mettre fin au système capitaliste et toutes les formes d’exploitation et d’oppression.

    Vive la lutte des femmes, pour notre émancipation, pour se battre sur un pied d’égalité avec tou-tes les opprimé-es et exploité-es, dans la voie de la révolution sociale ! Vive la révolution sociale qui va jeter les bases de la libération définitive des femmes, et de toute l’humanité, des chaînes qui nous oppriment !

    Construisons l’organisation internationale de femmes Pan y Rosas !

    1 Nous nous référons à l’Occident parce que le processus est différent dans les pays d’Orient ou du Nord de l’Afrique.

    2 Bien que nous soyons critiques de ces courants féministes radicaux qui, dans leur majorité, opposent les femmes aux hommes, la période fut un concentré de débats sur la question de savoir si la base de l’oppression féministe a son origine dans l’appropriation et le contrôle de la capacité reproductive des femmes par une partie des hommes ; si les hommes exploitent le travail non rémunéré des femmes de toutes couches sociales – y compris leur affection, leurs sentiments – et s’approprient le produit de leur travail, etc. Les Féministes socialistes, de leur côté – reprenant la méthode du matérialisme historique et les élaborations de Marx et Engels – mirent en avant, dans ces débats, l’inextricable relation entre l’oppression patriarcale actuelle et le mode de production capitaliste, où le travail domestique tient un rôle fondamental dans la reproduction gratuite de la force de travail.

    3 Les organisations qui composent la Fraction Trotskyste – quatrième Internationale sont Revolutionäre Internationalistische Organisation (RIO) en Allemagne, Partido de los Trabajadores Socialistas (PTS) en Argentine ; Liga Obrera Revolucionaria por la Cuarta Internacional (LOR-CI) de Bolivie ; Movimento Revolucionário de Trabalhadores (MRT) du Brésil ; Partido de Trabajadores Revolucionarios (PTR) au Chili ; Corriente Revolucionaria de Trabajadores y Trabajadoras(CRT) de l’Etat Espagnol ; Left Voice aux Etats-Unis ; Courant Communiste Révolutionnaire (CCR) du NPA en France ; Movimiento de los Trabajadores Socialistas (MTS) au Mexique ; Liga de Trabajadores por el Socialismo (LTS) au Venezuela et FT-CI en Uruguay. Ces groupes animent le réseau international de quotidiens en ligne « La Izquierda Diario », dont fait partie le site d’information Révolution Permanente en France.

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