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La Izquierda Diario
19 de février de 2018 Twitter Faceboock

Le 22 mars ne sera pas suffisant !
Spinetta : la colère monte chez les cheminots et les usagers !
Imrane Mylhane

Alors que le rapport Spinetta a été révélé publiquement depuis ce jeudi, l’indignation et la colère ne cessent de grandir et de se propager chez les cheminots, mais également dans les associations d’usagers. Spinetta sera-t-il le détonateur de la grève générale à la SNCF ?

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« Spinetta, Spinetta, Spinetta » : depuis quelques jours, c’est le nom qui est dans la bouche de tous les cheminots ; à la cantine, à la relève, dans les dépôts, les ateliers de maintenance, il n’y a pas un instant dans leur journée, depuis sa lecture, où les cheminots n’ont pas parlé de ce rapport, qui vise à mettre à la poubelle le service public ferroviaire et les cheminots avec. Les médias dominants ont compris très rapidement l’enjeu de ce rapport, adaptant leurs programmes pour laisser place à des débats entre cheminots et économistes néo-libéraux autour de l’avenir du rail en France. Les syndicalistes s’accordent pour dire que cela fait plusieurs années qu’ils n’ont pas senti une telle colère et une envie d’en découdre chez les cheminots. Un délégué CGT Cheminot explique que « même lors de la réforme du ferroviaire en 2014 ou encore pendant la bagarre pour le RH077 on n’avait pas senti autant de colère en amont ». Il ajoute que « la différence avec les mouvements précédents, c’est la prise de conscience de nombreux cheminots, qui d’habitude ne s’intéressent à aucune grève ni réorganisation, et qui là nous en parlent d’eux même ». L’ambiance est donc très chaude dans l’entreprise, mais on le voit également sur les réseaux sociaux ou les médias, avec des articles, des pétitions, des vidéos, partagés largement. Les cheminots sont très nombreux à vouloir réagir dans les médias, à interpeller l’opinion publique sur le désastre à venir si ce rapport devenait un projet de loi, avec comme conséquence non pas seulement la fin du « Statut » des cheminots mais la suppression de nombreuses gares et lignes régionales jugées non rentables pour la SNCF. Certains pointent également une donnée que beaucoup n’abordent pas : la suppression de nombreuses lignes régionales et de fret créeront un plan social massif à la SNCF.

Les associations d’usagers, solidaires des cheminots !

Fait rare : les associations d’usagers qui d’habitude sont plutôt enclines à attaquer la SNCF ou les grèves de cheminots, se sont cette fois-ci complètement solidarisées pour la plupart, de la gronde chez les cheminots contre le rapport Spinetta. Qui aurait cru que l’ancien PDG de Air France, allait réunir contre lui les cheminots et les usagers ? Bien sûr en ligne de mire des usagers ce n’est pas le transfert des cheminots ou encore la perte de leur Statut, mais bien la suppression des milliers de kilomètres de lignes très peu empruntées, mais utiles chaque jour pour tous ceux qui les empruntent afin de se rendre au travail dans les grandes agglomérations. L’ouverture à la concurrence et la privatisation massive inquiètent également les usagers, craignant fortement de voir, à l’image des réseaux ferrés des pays voisins, comme en Grande Bretagne, les prix des billets devenir hors de prix (le cout du transport ferroviaire en Grande Bretagne représente 14% à 20% du budget mensuel des anglais). Autre élément d’inquiétude, notamment avec l’augmentation du nombre d’incidents graves dans le ferroviaire ces dernières années, les associations d’usagers craignent avec la diminution des budgets pour l’entretien des voies que prévoit le rapport Spinetta, une utilisation de voies jusqu’à leur pourrissement augmentant considérablement les risques sur la sécurité des voyageurs. On se rappelle notamment de l’accident en gare de Bretigny, qui a mis en cause le manque d’entretien et l’allongement des délais de visite des éclisses, suite aux réductions d’effectifs.

Enfin, des associations de défense de l’environnement, dénoncent une nouvelle casse du fret ferroviaire, reportant de fait des wagons du rail vers la route, créant une augmentation du nombre de camions avec les conséquences sur l’environnement qui vont avec. (Des rapports chiffrent la dégradation du routier sur l’environnement et la santé à environ 100 milliards par an pour le contribuable).

Le 22 mars ne sera pas suffisant !

Si le rapport Spinetta n’est pour le moment qu’au stade de simple rapport, le fait d’avoir commandé cette soi-disante « expertise » à l’ancien patron d’Air France – KLM, laisse penser que ce rapport va être vite transformer en projet de loi qui vraisemblablement passera par ordonnance comme le fait depuis le début de son quinquennat le président jupiterien.

C’est dans cette optique que les cheminots se mettront en mouvement pour montrer leur opposition farouche à ce projet, au côté de la santé, la fonction publique et la jeunesse, le 22 mars 2018 pour une première date de convergence. Pour l’heure la CGT à la tête du mouvement appelle déjà les cheminots depuis le report de la manifestation du 8 Février, UNSA et FO se joignant à l’appel. SUD-Rail qui a lancé la consultation de l’ensemble de ses militant donnera sa position dans 3 jours, mais tout porte à croire que vue l’ampleur du projet la fédération SUD-Rail sera dans la construction du 22 Mars, le syndicat annonce déjà que s’il appelle ce sera à la grève et non à une simple manifestation. La CFDT Cheminot a quant à elle déjà fait savoir qu’elle n’appellera pas au mouvement de grève unitaire, à l’image également de la CFDT Fonction Public qui a claqué la porte de l’intersyndicale s’il y avait une convergence de lutte. Ce syndicat reste en tout cas dans sa droite ligne de syndicat réformiste, comme en 2014 participant, à la casse des grèves contre la réforme ferroviaire, ou encore à l’image du « Colloque de la CFDT » qu’avait organisé le syndicat pour parler casse du service public invitant les politiques, comme le sénateur Hervé Maurey coauteur d’une proposition de loi sur la libéralisation du transport ferroviaire, ou encore les patrons de la SNCF et de l’UTP (Union des patrons du transport public ). On se doute quand on entend Laurent Berger dire à la tribune de ce colloque « Le ferroviaire est confronté à de nouveaux défis, les modes de transports et les usages évoluent. Ce n’est pas en prônant le statu quo qu’on pourra relever les défis », que la CFDT n’a nullement l’intention de construire la riposte contre le rapport Spinetta.

C’est donc dès le 22 mars prochain que les choses commencent, mais une manifestation ne changera pas la donne. Beaucoup critiquent les termes employés par la CGT Cheminot, pour contrer le rapport Spinetta, on parle de « Manifestation » et non de « Grève ». Les cheminots souhaitent néanmoins se saisir de cette date comme un tremplin à la construction d’un mouvement plus fort, mais ils n’enchaineront pas les journées dispersées et les grèves « saute-mouton » comme en ont trop pris l’habitude les directions syndicales ces dernières années. Du côté de la direction de la CGT, il serait grand temps de préparer un vrai plan de bataille pour renouer avec la perspective d’une grève générale et reconductible.
C’est uniquement à travers la grève générale et le blocage de l’économie que les gouvernements ont reculé par le passé, et toutes les organisations syndicales le savent. Si la CGT n’appelle pas en tant que première organisation syndicale en France à un vrai plan de bataille qui puisse déboucher sur une généralisation de la grève, la défaite sera inévitable.

Les organisations syndicales vont devoir se dépêcher de profiter de l’engouement médiatique et de la colère chez les cheminots, pour proposer un calendrier offensif très rapidement, avec la construction de piquets de grève et d’assemblées générales, dans tous les chantiers de la SNCF pour mettre à terre le gouvernement. Déjà de nombreux délégués du personnel organisent des HIS (Heure d’information syndicale) de manière unitaire, pour sensibiliser et mobiliser les cheminots pour le 22 mars prochain.

Les cheminots n’auront pas d’autre joker, si le rapport Spinetta se transforme en loi, c’est une contre révolution à la SNCF, sans précédent depuis sa création.
Espérons donc que le « Rapport Spinetta » provoque autant de colère et de détermination dans la grève que le « Plan Juppé » en 1995, qui comportait un certain nombre de similitudes avec le projet d’aujourd’hui.

Crédit photo : LOIC VENANCE / AFP

 
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