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La Izquierda Diario
14 de mars de 2018 Twitter Faceboock

Quels enjeux ? Quel programme ?
Bataille du rail. Comment envoyer valser Macron et ses réformes ?
Julian Vadis

Dans le cadre du « cheminot bashing » orchestré par le gouvernement et relayé par les médias, la question de la dette de la SNCF est agitée pour justifier la liquidation de l’ensemble des acquis sociaux glanés durant des décennies de luttes par les cheminots. Quelles réponses, par la positive, peuvent être apportées à cette question ?

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50 milliards d’euros. C’est le total de la dette de la SNCF, qu’Edouard Philippe, son gouvernement, les éditorialistes et, plus globalement, l’ensemble des médias dominants agitent comme un argument imparable pour détruire les acquis sociaux des cheminots et libéraliser le service public du rail. Une intox totale, comme nous l’explique Mathieu, cheminot et délégué Sud Rail à Strasbourg, puisque ce sont avant tout les politiques systématiques de l’état-major de la SNCF et les réformes des gouvernements successifs avec un point d’orgue en 2014, qui ont patiemment creusé la dette pour faire apparaître comme inéluctable la libéralisation d’un service public jugé trop coûteux. Un mensonge éhonté, consistant à faire endosser aux cheminots, et leurs soi-disant « privilèges », la responsabilité de la dette, qui se creuse d’année en année, alors que la SNCF fait des bénéfices ! Ainsi, en 2017, ce sont 1,33 milliards d’euros qui sont rentrés dans les caisses !

Défendre la SNCF telle qu’elle est aujourd’hui ou imposer une alternative ?

Mais en ces heures ou la pression monte chez les usagers et les cheminots - une consultation interne a mis en avant que plus de 90% des cheminots sont prêts à entrer dans la bataille et qu’une large frange de cadres seraient également disposés à entrer en grève – plusieurs questions se posent : Doit-on restreindre la lutte aux simples revendications défensives du retrait des réformes préconisées par le rapport Spinetta ? Quel service public ferroviaire, largement amoché par des années de réformes libérales, veut-on ? Comment régler définitivement la question de la dette, source des multiples restrictions d’effectif et de casse des acquis sociaux des cheminots ?

Par-delà l’écran de fumée des prétendus « avantages et privilèges » des cheminots, la réalité des travailleurs du rail est tout sauf idyllique. Burn-out du au sous-effectif, suicides, conditions de travail exécrable et accidents démultipliés, voilà quelles sont les conséquences des réformes menées jusqu’alors, et qui vont aller crescendo avec la libéralisation du rail. Cette terrible réalité a encore frappé, avec la mort début mars d’un ouvrier sur les voies du RER A à Paris. A l’évidence, il est vital (au sens strict du mot) d’exiger non seulement que le statut de cheminot soit étendu à l’ensemble des travailleuses et travailleurs du rail, et ce jusqu’au personnel assurant le service de nettoyage des rames et des gares, mais aussi qu’un plan d’embauche massif, réglant les problèmes de sous-effectif, soit mis en place.

Le rapport Spinetta préconise la suppression de 56 lignes et de 190 gares sur l’ensemble du territoire, point sur lequel le gouvernement, conscient qu’une telle mesure pourrait permettre une unité cheminots/usagers, a, sur la forme, reculé. Une opération d’enfumage car Philippe et sa clique entendent opérer un transfert de la gestion de ces lignes et gares jugées non rentables aux régions, que l’on sait dans l’incapacité financière d’opérer de telle gestion, et qui conduira donc naturellement à des fermetures différées. Mais ce sont bel et bien des centaines de lignes et de gares qui ont été, ces dernières décennies, fermées ou renvoyées à un service plus que minimal, sans agents sur place et avec une poignée de trains desservant les petites communes et les villages, souvent à des horaires inappropriés aux besoins des usagers. Loin d’une exclusive sauvegarde de ces lignes, c’est bel et bien à un re-maillage intégral du territoire, l’ouverture (et réouverture) de gares et une desserte sérieuse des « petites gares », adaptée aux besoins de la population, qu’il s’agit de revendiquer.

« Mais cela va faire exploser la dette ! Ce programme est totalement utopiste ! » s’écrieront les idéologues libéraux et autres responsables politiques, incapables de raisonner en dehors des logiques de rentabilité, à grand renfort de chiffres grandiloquents. Ceci est tout à fait vrai, si l’on reste sous le prisme de leur mode de gestion du rail et, plus largement, de la société. En effet, un tel programme, répondant aux besoins du terrain et de l’ensemble des usagers, ne peut passer du papier à la réalité que par une série de mesures renversant totalement la gestion du rail français. D’une part, la reprise intégrale de la dette par l’État français et sans intérêts, par la mise en place d’un monopole bancaire placé sous le contrôle direct des travailleurs et de la population. D’autre part, il s’agit de fusionner l’ensemble des EPIC, sortant ainsi du schéma absurde où la SNCF, par un jeu de filiation, paye pour faire circuler ses propres trains sur ses propres lignes. Enfin, il s’agit que cette nouvelle SNCF soit évidemment nationalisée et sous contrôle direct des travailleurs et des usagers. Après tout, ce sont des décennies de gestion « responsable » qui ont méthodiquement conduit le service public ferroviaire dans le mur. Cela n’a rien d’étonnant puisque celles et ceux qui connaissent réellement le terrain (les cheminots) et celles et ceux qui connaissent au plus près leurs besoins (les usagers) sont systématiquement réduits au silence tandis que ce sont des PDG, qui n’ont pas les mêmes intérêts, qui prennent l’ensemble des décisions, comme c’est le cas de Guillaume Pepy et de ses 450 000€ de salaire annuel.

Bien sûr, l’imposition de ce programme ne passera pas par des négociations dans les doux fauteuils de Matignon. C’est par le blocage total du trafic, dans la grève dure et reconductible jusqu’à l’obtention de l’ensemble des revendications, qu’il sera possible de renverser la table. Un combat qui, pour être à la hauteur des enjeux, devra être celui de l’ensemble des usagers et, plus largement, celui de l’ensemble de la classe ouvrière.

 
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