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La Izquierda Diario
23 de mars de 2018 Twitter Faceboock

Il se passe quelque chose.
Les cheminots, fer de lance de la contestation contre Macron
Damien Bernard
Julian Vadis

La journée de mobilisation de ce 22 mars s’annonçait réussie. Pour autant, Macron continuait à ne pas voir de « colère » s’exprimer. Le voilà servi. Travailleurs de la fonction publique, étudiants et lycéens, salariés du privé, c’est un mouvement massif des cheminots qui a, non seulement manifesté, mais fait grève pour venir défier Macron qui pourrait bien se lever avec la gueule de bois.

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À la veille de cette journée de mobilisation, bien des éléments laissait penser que la première bataille d’envergure se profilait à l’horizon . Au lendemain de ce 22 mars, force est de constater que la mobilisation a tenu toutes ses promesses. De Paris à Marseille en passant par de nombreuses villes « moyennes », les rues étaient remplies ce jeudi. Au final, les chiffres de la mobilisation sont similaires à ceux du 9 mars 2016, qui a lancé la bataille contre la loi travail. À ce détail près que la version 2018 dispose d’un atout supplémentaire : Celui de voir un mouvement d’ensemble émerger, avec à sa tête les cheminots, un des secteurs stratégiques du mouvement ouvrier, qui se sont montrés déterminés à engager le combat contre Macron.

Fini, le fameux « état de grâce présidentiel » qui accompagne traditionnellement les premiers mois du quinquennat du président fraichement élu. Alors que sa côte de popularité est au plus bas, et qu’il démontre une certaine usure à la différence de l’année passée, Emmanuel Macron doit faire face à son premier combat social. 65 000 à Paris, 55 000 à Marseille, 25 000 à Toulouse, pour un total de 480 000 manifestants sur l’ensemble du territoire. Les chiffres sont parlant, similaire à ceux des manifestations du 9 mars 2016 qui avait lancé le printemps de lutte contre la loi travail, version El Khomri. Pourtant, ce 22 mars a un atout qualitatif supplémentaire, au-delà des chiffres. Si le printemps 2016 était avant tout été emmené par la jeunesse, la version 2018 est marquée par l’entrée en bataille immédiat de secteurs importants de la classe ouvrière, avec les cheminots comme fer de lance. Journée appelée par la fonction publique, elle a servi de jonction à l’ensemble des « colères » avec notamment la jeunesse, les secteurs de la santé, les contrôleurs aériens, les travailleurs de la RATP, etc.

Du côté des cheminots, c’est un mouvement massif qui a répondu à Macron et son plan de privatisation de la SNCF. Les médias dominants ne s’y sont pas trompés. De sorte que Les Echos parlent d’un « avertissement des cheminots à Macron » tout en jouant à la concurrence entre fonctionnaire et cheminots. Et ce sont des taux élevés de grévistes inattendus, alors que la stratégie proposée était une simple manifestation centrale à Paris, et que seul Sud Rail avait déposé un préavis de grève, ainsi que l’UNSA dans un second temps. Pour autant, les cheminots se sont saisis de cette grève massivement. Mieux, la journée du 22 mars a vu émerger, là aussi, une « pointe avancée » de la contestation du rail. Avec 500 cheminots en Assemblée Générale, les travailleurs du rail de Paris Nord ouvrent clairement une alternative à un plan de bataille de « 2 jours de grève tous les 5 jours » largement rejeté. Ainsi, les cheminots ont voté pour la grève reconductible dès le 3 avril et le retrait sans négociation du plan ferroviaire. Dernier élément qualitatif, et non des moindre, les cheminots de la gare du Nord était accompagné par les travailleurs du nettoyage des gares d’Onet, ayant mené une lutte exemplaire et victorieuse de 45 jours entre novembre et décembre dernier, et qui se sont mobilisés sur leurs revendications propre et en solidarité des cheminots. Un exemple de convergence des luttes qui doit servir pour l’ensemble du mouvement à échelle nationale, pour unifier les forces dans la bataille qui nous oppose aujourd’hui à Macron et son gouvernement.

Des « pointes avancées » qui doivent entraîner l’ensemble de la jeunesse et du monde du travail dans la bataille

Dans la jeunesse, le scénario d’une entrée en bataille plus massive est loin d’être exclu. Ce 22 mars a été le témoin d’un possible début de mouvement dans les lycées, avec blocage et cortège massif en manifestation. Dans certaines universités, les Assemblées Générales se massifient ces derniers jours, comme à Bordeaux, Nantes ou bien encore Montpellier. L’Université du Mirail à Toulouse et ses Ags régulières oscillant entre 1500 et 3000 participants a connu un véritable test ce 22 mars. Alors qu’une grande avancée a été obtenue sur la revendication locale du retrait du projet de fusion des universités toulousaines, la nomination d’un administrateur provisoire suite à l’éviction du président de l’Université et les menaces de répression policière, l’Assemblée Générale du jour a non seulement massivement reconduit le blocage, mais a posé aussi la question de l’autogestion de l’université par les travailleurs et étudiants grévistes. Ajoutez à cela la vague de solidarité à échelle nationale suite à l’annonce d’une potentielle intervention des CRS sur le campus, le cocktail pourrait s’avérer explosif dans les jours à venir. A ce titre, l’organisation d’une Coordination Nationale Etudiante à la fac du Mirail le week end prochain apparaît comme une échéance centrale, alors que la « pointe avancée » de la contestation étudiante expérimente avec succès depuis plus de deux mois une mobilisation placée sous le signe de l’auto-organisation des travailleurs et étudiants en lutte.

L’auto-organisation. Une clef indispensable pour ouvrir les portes de la victoire

Aujourd’hui, il ne fait guère de doute que la bataille ne fait que commencer. La question centrale qui se pose est-la suivante : Quelle stratégie pour gagner ?

La première des conditions, au-delà des éternelles questions de l’unité et de la convergence des luttes, résident dans le refus de toute forme de concertation ou négociation avec le gouvernement. Soyons clairs, alors que la base des travailleurs, en particulier des cheminots mais pas que, ont clairement exprimés par la rue leur désir d’en découdre, toute négociation dans les salons feutrés de Matignon ne peuvent être qu’une bouffée d’air frais pour Macron et ses sbires. Le gouvernement l’a d’ailleurs bien compris, annonçant, non sans cynisme, que de « véritables négociations » s’ouvriraient dans les prochains, validant soit-dit-en-passant le fait que les précédentes n’étaient qu’un feu de paille.

Cela amène directement à un constat qui s’apparente à une seconde condition primordiale, celle de l’auto-organisation du mouvement par l’ensemble des travailleurs en lutte, par le biais d’Assemblées Générales et de ses déclinaisons d’outils garantissant du respect démocratique des décisions, comme par exemple la mise en place de caisses de grève ou des comités de grève sous le contrôle direct des travailleurs. C’est en quelque sorte la seule façon d’imposer, par la pression à la base, l’unité au sommet des directions syndicales. En ce sens, l’exemple de l’Assemblée Générale de la gare du Nord est précieux et doit ouvrir la voie à une généralisation de ce mode de fonctionnement, en servant de point d’appui pour l’ensemble des secteurs en lutte. La question de l’élargissement de la mobilisation à des secteurs du privé se pose également, pour accroître le rapport de force en faveur des travailleurs contre Macron. Les travailleurs de PSA Mulhouse ont répondu à l’appel, offrant là aussi un exemple intéressant qui doit être revendiqué, massifié et exporté dans l’ensemble du pays.

Enfin, la bataille contre Macron va de pair avec un combat de nature politique. En effet, le simple retrait des réformes actuelles dans l’éducation, le ferroviaire ou la santé apparaît comme minimal alors que les accidents au travail, les burn-outs voire les suicides se sont multipliés au fil des contre-réformes libérales. C’est pourquoi il est indispensable de poser la question de la nature du service public que nous voulons, et de doter l’ensemble de la mobilisation d’un programme à même d’ouvrir une alternative progressiste à la situation actuelle. Dans ce cadre, le combat pour l’opinion publique et pour créer les liens avec les usagers, et la population plus en général, sera déterminant pour construire le rapport de force pour défaire Macron et ses politiques antisociales et antipopulaires.

 
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