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La Izquierda Diario
8 de mai de 2018 Twitter Faceboock

Racisme et violence d’État
Réfugiés sahraouis à Bordeaux : après l’incendie de leur squat, la violence policière
Armand Bonneto

Vendredi 4 mai, près de 200 réfugiés Sahraouis ont été délogés par les forces de l’ordre d’un camp de fortune qu’ils avaient construit au Parc des Angéliques à Bordeaux. Ils avaient déjà été victimes d’un incendie dans leur principal squat ce premier mai, y perdant affaires et logement.

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Rapide retour sur l’histoire et la situation des Sahraouis

En 1975 le Sahara occidental, ex-colonie de l’Espagne, est envahi par l’armée Marocaine avec notamment la prise de Laâyoune, la plus grande ville de la région. Cette offensive Marocaine est accompagnée de bon nombre d’assassinats, d’actes de torture, de bombardements au napalm et au phosphore sur des camps sahraouis. Des actes qui sont pour beaucoup similaires à ceux que les puissances impérialistes, à commencer par la France, ont elles-mêmes commis au Maroc sous « protectorat » – un euphémisme pour évoquer la colonisation – tout au long de la première moitié du XXème siècle, des pays occidentaux. Une partie des Sahraouis cherchant à éviter le conflit ont alors entamé un exode massif.

L’occupation marocaine du territoire va subir une forte contestation et entraîner une réponse armée de la part du peuple sahraoui. Le 17 février 1976, la République arabe sahraouie démocratique est proclamée et l’armée de Libération Populaire Sahraouie commence à mener des actions militaires, sous l’égide notamment du Front Polisario. Malgré tout, le conflit s’éternise et les forces marocaines s’installent durablement sur le territoire.

En 1980, le Maroc se lance dans la construction du « mur marocain » qui englobe au départ les villes de Laâyoune, Smara et Boucraa qui sont des villes à fortes activités économiques. Par la suite, le Maroc étend son emprise sur le pays en construisant de multiples murs entre 1982 et 1987, qui encadrent de plus en plus le Sahara Occidental. Dans cette situation, la volonté presque affichée du Maroc est la colonisation du territoire en procédant à la construction de ces murs, qui offrent une sécurité aux colons marocains pouvant ainsi s’installer sur le territoire.

Par la suite, face à la gronde grandissante contre cette colonisation, le Maroc propose à plusieurs reprises la tenue d’un référendum sur l’auto-détermination du peuple Sahraoui. Un référendum qui sera éternellement repoussé et ne trouvera pas d’issue.

Aujourd’hui encore la protestation face à l’emprise marocaine sur la région continue et la répression qui en découle est autrement plus forte. Plusieurs échéances de négociations, entre le Front Polisario et les autorités marocaines, sur le futur de la région ont lieu depuis plusieurs années dans le cadre des organisations multilatérales internationales mais ne débouchent sur rien de consistant. Le Maroc n’ayant aucune volonté de relâcher sa main-mise sur le territoire, le conflit persiste encore aujourd’hui avec plus ou moins de radicalité.

Ce très bref retour sur l’histoire de la colonisation du Sahara Occidental par le Maroc permet de comprendre pourquoi la France a vu affluer un grand nombre de réfugiés Sahraouis durant ces 40 dernières années.

La situation des Sahraouis à Bordeaux : la violence de l’État face à un peuple en détresse

Depuis près de 10 ans des réfugiés Sahraouis, dont des enfants en bas âge, vivent dans une situation plus que précaire à Bordeaux. Délaissés par la Mairie et les autres institutions publiques de la ville, les Sahraouis présents à Bordeaux n’ont pas d’hébergement décent et ont été victimes de plusieurs incendies dans les multiples camps de fortune qu’ils ont pu constituer. Les conditions de vie dans de tels squats sont extrêmement précaires, deux toilettes pour 200 personnes, un tuyau d’eau pour seule douche, des difficultés pour rassembler des vivres, quasi-impossibilité de laver les vêtements ou de trouver des soins, etc.

La situation devient des plus critiques depuis que leur principal squat, celui des quais Deschamps, a été incendié ce premier mai 2018. Leur principal point fixe ayant été détruit ainsi qu’une grande partie du peu d’affaires qu’ils avaient pu rassembler, les Sahraouis se sont installés provisoirement dans le Parc des Angéliques. Mais dès le lendemain matin, ils sont été réveillés par une escouade de police venue pour les déloger.

Malgré la manière dont a officiellement été médiatisé l’événement, celle d’une évacuation sans violence, la réalité fut tout autre. Bai nous raconte que les policiers ont employé la force pour les évacuer, entre bousculades et forte pression verbale. De plus, les policiers étaient accompagnés d’agents de nettoyage de la ville et de leur benne, dans laquelle les affaires des réfugiés furent jetées sans sélection. Plusieurs d’entre eux ont donc perdu leur sac de couchage et leurs affaires personnelles mais aussi leurs papiers d’identité, ce qui révèle une volonté des forces de police et des représentants d’État de restreindre encore plus la capacité des Sahraouis à se sortir de leur situation.

La violence physique subie par les Sahraouis a été redoublée d’une violence symbolique au vu du fait que les agents de nettoyage, après avoir négligé et embarqué leurs affaires, ont nettoyé l’herbe sur laquelle ils étaient installés. Encore une fois, la volonté d’effacer toute présence des réfugiés de la part des institutions de la ville est évidente.

Depuis lors, les réfugiés ont été obligés de se diviser dans plusieurs endroits de la ville afin de prévenir une nouvelle intervention policière. En effet, ils veulent éviter tout rassemblement trop nombreux afin de dissuader les forces policières d’intervenir. Ainsi ce sont près de 5 lieux de la ville qui sont investis par les Sahraouis dont un gymnase qui a été ouvert pour eux. Nombre d’entre eux refusent toutefois l’hébergement dans le gymnase, car il n’est que temporaire et ne permet pas une installation pérenne.

Une peur constante de se faire déloger par les forces de l’ordre plane chez les réfugiés, qui évitent de se charger de trop d’affaires pour ne pas se les faire détruire et n’osent pas monter une tente par peur de se faire dénoncer.

Cette situation est des plus déplorables et les agissements de la mairie et des forces de répression ne fait que révéler une fois de plus le visage éminemment raciste de l’État. D’autant plus qu’une certaine partie des réfugiés sont des demandeurs d’asile mais que seules 40 places en CADA (Centre d’Accueil pour Demande d’Asile) leur sont proposées. D’autant plus que ces 40 places ne se situent pas toutes à Bordeaux même, mais dans toute la région ce qui vise encore une fois à disperser le groupe de réfugiés.

Dans la précarité de leur situation, les Sahraouis ont donc besoin d’un soutien matériel fort. Ils demandent, à quiconque pouvant leur venir en aide, un apport de couvertures, de sacs de couchage, de tentes, de bâches, de bouteilles de gaz pour camping… Ils ont également besoin de vivres (Consommation pique-nique uniquement) mais aussi d’un soutien plus « technique » comme l’accès à des douches.

Face à la violence physique et symbolique de l’État, le soutien aux réfugiés Sahraouis doit être inconditionnel, à l’instar du droit à l’auto-détermination des peuples. Il doit s’accompagner d’une dénonciation systématique des velléités coloniales Marocaines en Sahara Occidental, ainsi que la complicité de tous les gouvernements occidentaux qui ne reconnaissent pas leur État.

 
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