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La Izquierda Diario
24 de mai de 2018 Twitter Faceboock

L’unité oui, mais l’unité pourquoi faire ?
Le 26 mai, manifestons pour construire un « tous ensemble » par la grève
Damien Bernard

Près de 2 mois après le début du mouvement de grève des cheminots, cette semaine s’annonce être un moment charnière de la mobilisation. Toujours inflexible, le gouvernement joue plus que jamais la montre en pariant sur l’essoufflement du mouvement. C’est dans ce contexte que s’inscrit la manifestation dite « marée populaire », ce samedi 26 mai. Appelée par la CGT, Solidaires, la FSU et l’UNEF, ainsi que LFI, le NPA, le PCF, Générations et LO, cette journée de manifestation, une nouvelle fois un week-end, se devrait de se donner comme principaux objectifs : le durcissement du mouvement de grève des cheminots ainsi que la nécessité de généraliser la grève à d’autres secteurs. En somme, la préparation de la construction d’un « tous ensemble » par la grève qui est seule à même de construire le rapport de force.

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Macron a fait de la « bataille du rail » l’un des combats centraux de son quinquennat. Au travers cette attaque quasi-frontale contre le « statut » cheminot et en imposant l’ouverture à la concurrence, le gouvernement compte bien imposer une défaite sur le terrain de la lutte de classes contre l’un des secteurs les plus organisés du mouvement ouvrier. Une façon pour Macron de se donner les coudées franches pour faire franchir un saut qualitatif à ses attaques contre le monde du travail et la jeunesse. Avant la casse du système des retraites et des aides sociales, le gouvernement se met déjà en ordre de bataille pour démanteler le statut de la fonction publique, tout en enterrant la politique la plus minimale en direction des quartiers populaires dans le même temps que s’approfondit la répression systématique et raciste dans ces mêmes quartiers.

Le 22 mai, fonctionnaires, cheminots et étudiants, une pression à la convergence à la base

Gel du point d’indice, recours massif aux contractuels, plan de départ « volontaire » de 120 000 fonctionnaires, les attaques sont massives et concentrées. A contrario de la réforme du ferroviaire, le gouvernement tente de radoucir son discours en essayant de déminer le terrain : « Nous ne toucherons pas au statut des fonctionnaires », assurait le secrétaire d’Etat Olivier Dussopt, à la veille de la journée de grève et de manifestation du 22 mai. Pourtant, la méthode ne semble pas prendre, en témoigne le niveau de mobilisation important ce 22 mai. Dans plus de 130 manifestations, on a aussi pu observer une forte volonté de convergence entre les différents secteurs, postiers, hospitaliers, égoutiers, professeurs, étudiants et cheminots. Cette pression à la convergence à la base commence à s’installer dans les AG cheminots, où secteurs en lutte et étudiants ont l’habitude de se retrouver.

Combattre le corporatisme pour construire un « tous ensemble » par la grève

Après la manifestation du 10 octobre, c’était la deuxième fois sous le quinquennat Macron que les neuf syndicats de la fonction publique appelaient unanimement à faire grève et à défiler ce mardi 22 mai. Si l’on peut se féliciter de cette unité syndicale dite « historique » depuis 2010, on ne peut cependant qu’interpeller les directions syndicales de la fonction publique qui préfèrent, comme le 22 mars dernier, que les cheminots ne se mettent pas en grève à leurs côtés car ils feraient de « l’ombre » à leurs revendications « sectorielles ». De la même façon, on peut questionner les directions syndicales formant l’interfédérale cheminote qui, à l’exception de Sud-Rail, n’ont pas appelé à faire grève avec les agents de la fonction publique, ni même le 26 mai. C’est à l’initiative de l’inter-gare, rejointe par Sud-Rail, que près de 600 cheminots, en grève ce 22 mai, ont manifesté de Paris Gare du Nord à République pour rejoindre le cortège de la fonction publique exprimant cette volonté d’une convergence à la base.

Une « marée populaire » au service d’un bloc populiste ?

Pour cette journée de manifestation du 26 mai qui se déroule, une nouvelle fois, un week-end, il est à remarquer que rarement l’on avait vu tant d’entrain de la part de la France Insoumise à tenter de décoller son étiquette de cette « marée populaire ». Et pour cause, la majorité des organisations politiques et associatives ayant appelé au « pot-au-feu » du 5 mai a perçu comme « une OPA » l’opération politique de La France Insoumise sur la manifestation dénaturant par la même l’initiative « citoyenne » de Ruffin et Lordon. Pour autant, le fond du problème ne se situe pas tant dans l’opération politique, qui de plus était prévisible, que dans la stratégie que Mélenchon essaye d’imprimer au mouvement social avec notamment sa généralisation des manif’ le week-end, tout en affirmant lundi matin sur RTL vouloir désormais construire un « Front Populaire » qui « décloisonne le syndicalisme, la politique et le monde associatif ». Une façon, en somme, de diluer le rôle central que joue la classe ouvrière et ses méthodes de lutte, pour intégrer ensuite les syndicats derrière son projet populiste et de conciliation de classe.

Mélenchon n’aime pas la grève générale

« Vous pourriez avoir un mot d’ordre de grève générale ? », telle est la question pour le moins équivoque que RTL a posé à Mélenchon. « RTL veut appeler à la grève générale ? (…) Ça ne fait pas partie de mes messages », répond-t-il sur la défensive. Cette déclaration n’est pas un scoop tant La France Insoumise ne cesse de le répéter, sa stratégie est celle d’une « révolution par les urnes ». « Notre tactique, c’est que quand la société se met en mouvement, nous proposons des issues positives », explique-t-il. Même si le parallèle historique est « rapide », ces déclarations ont le mérite de la cohérence avec le « Front Populaire » auquel il fait référence. En effet, le « Front Populaire », en 1936, s’était mis en branle pour désamorcer une situation révolutionnaire où le mouvement ouvrier avait, par ses méthodes de luttes, réussi à imposer la grève générale à ses organisations, le tout en échange de l’octroi de quelques concessions pour sauver le système capitaliste. Par opposition, donc, cette « grève générale » ne semblerait pas être une issue positive pour Mélenchon.

Construire et préparer la « grève générale », ça passe d’abord par durcir la grève des cheminots !

Après avoir mis Macron sur la défensive, le 3 avril, suite au démarrage puissant du mouvement de grève des cheminots, force est de constater que la stratégie de l’interfédérale qui « cumule 20 jours de grève n’a rien permis pour l’heure d’obtenir », explique la motion votée par les près de 350 cheminots réunis en rencontre inter-gare ce 22 mai. Les cheminots « déterminés à faire retirer la réforme » y appellent l’Interfédérale « à réagir d’urgence et à bouger le calendrier ». Ils exigent aussi « un nouveau plan de bataille pour donner un second souffle » au mouvement. Cela passe notamment par la nécessité d’« un appel ferme à la grève le 26 mai prochain pour la manifestation « marée populaire » de la part de l’Interfédérale. Un mouvement de grève que les cheminots réunis en inter-gare ont appelé à durcir : « Ce n’est pas en ajoutant 12 jours supplémentaires en juin avec des taux plus faibles que nous allons faire reculer le gouvernement ».

Et si l’on mettait les forces du 26 mai pour appeler à une journée de grève sur le calendrier cheminot ?

Pour les initiateurs de l’appel à la manifestation du 26 mai, dite « marée populaire », l’enthousiasme est de mise. Selon certains organisateurs, c’est la première fois « depuis des décennies » que des partis politiques de gauche, des syndicats, dont la CGT, et des associations appellent ensemble à une journée d’action. Rarement l’on a ainsi vu tant de prises de position d’organisations politiques revendiquer cette unité « historique » comme le résultat de leur politique. Mais l’unité pour quoi faire ? Pour nous la seule unité qui vaille, c’est celle où l’ensemble des forces en présence peut peser réellement dans le rapport de force construit par les cheminots, avec leur méthode, la grève, depuis près de 2 mois, malgré les limites de la tactique de la grève « perlée » de l’interfédérale.

Ainsi, pour que cette « marée populaire » n’annonce pas une prochaine « marée sans cheminots en grève », il est indispensable que l’ensemble des organisations syndicales, au premier titre la CGT, formations et partis politiques, collectifs et associations, appellent à la construction d’une nouvelle journée de grève et de manifestation nationale sur le calendrier des cheminots en grève. Ce serait le seul moyen d’assurer un soutien à même de réellement peser dans le mouvement de grève en cours car c’est par la grève et par sa généralisation dans un « tous ensemble » qu’il sera possible de stopper le rouleau compresseur du gouvernement et de passer à la contre-offensive.

Pour frapper ensemble, il faut frapper : faire grève et se mobiliser avec et aux côtés des cheminots !

Photo : O Phil des Contrastes

 
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