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La Izquierda Diario
10 de août de 2018 Twitter Faceboock

Exemplaires, de leurs privilèges
Après Benalla, l’affaire Kohler : la « moralisation » avec Macron
Iris Serant

Alors que l’affaire Benalla est loin d’être close avec son lot de copinages et de barbouzeries, les conflits d’intérêts menaçant le n°2 de la campagne LREM, Alexis Kohler, pourraient approfondir la crise politique que traverse Macron.

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Crédit photo : Sipa

Le macronisme s’était notamment construit sur les ruines supposées de « l’ancien-monde », celui des Filloneries, des conflits d’intérêts et de la corruption qui avait permis à Macron de ratisser une bonne partie de l’électorat de droite. Jouant ainsi la carte de la moralisation politicienne et de l’exemplarité, Macron peine à masquer ce qui crevait déjà les yeux : les grands privilèges de la caste politicienne, entremêlés de très près et protégeant ceux du patronat.

« L’exemplarité » en mauvaise passe

Passons donc les « petites » affaires de milliers d’euros investis en maquillage, vaisselle et piscine pour s’arrêter sur une des premières vraies crise du macronisme et de son récit d’exemplarité : celle de Benalla, barbouze de Macron s’entraînant à ses heures perdues à casser du gauchiste, montant une petite police parallèle pour le président, bénéficiant d’avantages matériels et financiers en plus de privilèges judiciaires ostentatoires – des congés payés comme sanction et des déplacements de preuves à charge sans grands soucis –, en plus d’avoir eu droit à son petit 20h à TF1 pour expliquer que vraiment, il ne faisait que son devoir de citoyen en cassant la gueule de plusieurs manifestants, et surtout, que son copain Macron n’avait vraiment rien à voir là-dedans.

Dès les révélations du Monde, cette affaire a pris une très grande ampleur, nationalement et internationalement, sans que pour autant Benalla ait à subir ce que subissent tous ceux qui ne font justement pas partie de cette caste de politiciens et d’heureux propriétaires – des licenciements, des sanctions et autres peines de prison –, ceux qui n’ont pas d’immunité ouvrière, ceux qui se prennent en place face cette justice de classe, raciste et patriarcale. Si Macron, après plus d’une semaine de silence, avait tenté le tout pour le tout en se déclarant seul responsable et en lançant un « Qu’ils viennent me chercher » en tentant ainsi de ne pas paraître déstabilisé, cette affaire a porté un grand coup au macronisme en manque de fondement. « L’affaire Kohler » n’est pas nouvelle, mais au moment où celle de Benalla est loin d’être tassée, celle-ci resurgit et ne fait qu’enfoncer le clou sur la réalité de la Macronie : les « affaires » font système et l’exemplarité n’est que chimère.

Kohler, n°2 de la campagne LREM dans conflits d’intérêts

Médiapart avait déjà révélé début mai les accointances entre Alexis Kohler, exerçant à plusieurs reprises des fonctions de haut fonctionnariat et la société n°2 mondiale du fret maritime, MSC, dont le PDG n’est autre que le cousin de la mère de Kohler. Ces révélations de conflits d’intérêts et trafic d’influences avait été suivies d’une plainte portée par l’ONG Anticor, alors qu’une deuxième vient tout juste d’être déposée ce mercredi. C’est que l’affaire Kohler est un long récit. Ayant suivi le parcours classique Science Po – Ecole de commerce – ENA, Alexis Kohler s’est retrouvé à plusieurs reprises à exercer des postes de haut-fonctionnariat en étroite collaboration avec la même société de fret, MSC et à lui prodiguer de nombreux avantages, sans que ses liens familiaux soient exposés. D’un côté, Kohler n’avait pas révélé ses liens familiaux, mais en plus de ça, il ne se serait ou n’aurait pas été retiré des dossiers traitant avec MSC, alors même que ses nouveaux supérieurs, dont Macron en personne, étaient au courant. C’est pourquoi l’ONG Anticor porte plainte pour « prise illégale d’intérêts » et « trafic d’influence ».

Aujourd’hui, secrétaire général de l’Élysée, il est devenu l’un des principaux interlocuteurs de Macron. Et Macron est directement impliqué, puisque, comme nous l’écrivions cette semaine, « Face à ces faits, le Parquet national financier (PNF) s’est demandé comment Alexis Kohler, vu les étroits liens familiaux et professionnels avec MSC, est parvenu en 2016 à rejoindre l’armateur après avoir occupé une place d’agent public. La réponse est simple, en 2016, l’actuel secrétaire général de l’Élysée a obtenu le feu vert de la commission déontologique grâce à Emmanuel Macron. » Macron est donc doublement affecté par cette affaire, de par la position qu’a Alexis Kohler dans son gouvernement qui démontre le genre d’exemplarité relative aux politiciens, et par une implication directe dans l’affaire.

Des affaires qui font système

Le président des riches, qui ne s’est jamais caché de faire des cadeaux au grand patronat, est donc empêtré dans une nouvelle affaire qui démontre que les privilèges « légaux » de propriété, de profits et d’exploitation passent par d’autres avantages qu’il est moins bon de faire apparaître aux yeux du grand publics : ceux des magouilles politiques en tout genre, des « conflits d’intérêt » et autres corruptions dont ils usent fréquemment. Le quinquennat de Macron est déjà semé de ce genre de révélation : des financements de campagne pas si net que ça pour LREM, une affaire de corruption du côté de Nicolas Hulot, ou encore de favoritisme du côté de Muriel Pénicaud.

Ministres et autres adjoints ne sont pas privés pour autant de leur haute fonction, et Muriel Pénicaud, pour ne citer qu’elle, a ainsi tous les loisirs de continuer à démanteler code du travail et protection sociale, sans que personne ne regarde ses comptes. Contrairement à tout le mirage politicien qui voudrait faire croire qu’il est possible de « moraliser » la vie politique quand la démocratie est bourgeoise et qu’elle sert de fait les intérêts patronaux, c’est justement la question de la représentativité et de la transparence qui démontre la nature de leur système.

Nous écrivions lors de l’affaire Fillon : « Car ce régime fait de 49.3 et de « fillonneries » n’a rien d’une démocratie, et une démocratie digne de ce nom n’existera de toute façon pas tant que ce ne sera pas les travailleurs organisés par eux-mêmes qui auront pris les affaires en main. Dans l’immédiat, pour s’attaquer à la caste, il faudra le faire par ses racines : les privilèges et l’impunité dont elle bénéficie. Pas une seule rémunération d’élu au-dessus du salaire moyen, et possibilité de révoquer tout élu s’étant rendu coupable de la moindre malversation ou ne respectant pas le mandat que lui ont confié ses électeurs. Voilà deux « petites » mesures, inspirées de l’expérience de la Commune de Paris, qui seraient d’une grande actualité aujourd’hui »... et qui le sont tout autant à l’heure du macronisme.

 
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