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La Izquierda Diario
16 de août de 2018 Twitter Faceboock

Silence ! Faut pas en parler
L’avortement en Algérie, où en est t-on ?
Fadou

Alors qu’en Amérique Latine le mouvement pour la légalisation de l’avortement s’étend et se renforce, malgré le passage du non au sénat argentin, qu’en est-il de la légalisation dans d’autres pays ? Comme la majorité des pays islamiques, l’Algérie dispose de textes prohibant l’avortement qui est une pratique damnée par la religion musulmane.

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C’est tout d’abord dans l’article 82 du projet de la loi relatif à la santé que l’on voit que l’interruption volontaire de grossesse est envisagée « lorsque l’équilibre physiologique ou psychologique et mental » de la mère est gravement menacé. Le ou les médecins spécialistes concernés, « en accord avec le médecin traitant, doi(ven)t informer la mère et entreprendre avec son consentement, toute mesure médicale thérapeutique dictée par les circonstances ». Toutefois cet article, extrait d’une nouvelle loi datant de 2015 et prise en compte par la législation, n’est pas très explicite, notamment concernant « l’atteinte à l’équilibre physiologique ou psychologique et mental ».

Mais à sa sortie, cet article a suscité une vive polémique au sein de plusieurs partis islamiques qui considèrent cette pratique comme contraire à la religion : « ce sont les vrais perdants, ceux qui par sottise et par ignorance, tuent leurs enfants et qui inventent des mensonges à propos d’Allah, interdisent la nourriture qu’Allah leur a dispensée, ces gens là s’égarent et ne suivent point le droit chemin » (Coran, al-an’am 6.140).

Dans la charia, l’avortement est permis avant quatre mois de grossesse et uniquement dans les cas où la grossesse représenterait un réel danger pour la mère. Les avortements suivant un viol ne sont pas autorisés, sauf dans le cas particulier d’un viol commis dans le cadre d’un acte terroriste, mesure qui a été adoptée suite aux cataclysmes de la décennie noire (guerre civile algérienne).

Alors que les femmes d’autres pays ont légalisé l’interruption volontaire de grossesse et que d’autres luttent pour avoir ce droit, l’Algérie punit même ceux qui cherchent à défendre ce droit, ceux qui « mènent des discours proférés dans les lieux ou réunions publics, soit par la vente, la mise en vente ou l’offre, même non publique, ou par l’exposition, l’affichage dans les lieux publics ou par distribution à domicile, la remise sous bandes ou sous enveloppe fermée ou non fermée à la poste ou à tout agent de distribution ou de transport, d’imprimés d’annonces, d’affichages, dessins, images et d’emblèmes, soit par la publicité de cabinet médicaux » (art310).

Cette criminalisation peut se traduire par des peines d’emprisonnement et des amendes. Les articles 304 à 310 du Code pénal, qui portent sur l’avortement, condamnent quiconque cherche, à travers aliments, breuvage, médicaments, manœuvres, violences ou par tout autre moyen, à provoquer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte, qu’elle y ait consenti ou non, à une peine d’un à 5 ans d’emprisonnement, et à une amende de 5000 dinars (37€) à 10000 dinars (74€). Et dans le cas où la grossesse aurait effectivement été interrompue via ces actes, la peine de réclusion peut aller de 10 ans à 20 ans de prison.

Les femmes aussi subissent la répression liée aux tentatives d’avortement : une femme qui cherche à interrompre sa grossesse encourt elle-même une peine de 6 mois à 2 ans de prison.
La rigueur et la sévérité de la loi ont eu pour conséquence le recours à des méthodes clandestines, qui sont souvent mises en œuvre par des personnes non qualifiées pour des sommes allant jusqu’à 150000 dinars (1100€). La majorité de ces interruptions de grossesse sont liées aux agressions sexuelles, les viols, et les incestes. Criminaliser l’interruption volontaire de grossesse ne réduit pas le taux d’avortement. Selon l’association algérienne de la planification familiale (AAPF), le nombre d’avortements par an est de 500 enregistrés par la gendarmerie, un chiffre qui ne reflète pas la réalité de la situation clandestine non traitée par la justice.

Face à cette interdiction de l’interruption volontaire de grossesse, les femmes algériennes se retrouvent dans une situation complexe où elles sont considérées comme coupables. Condamnées par la société (coutumes et mœurs), elle sont en effet considérées comme fautives et responsables dans une logique toute patriarcale.

L’avortement reste aujourd’hui en Algérie un sujet tabou, mais il est urgent de regarder la vérité en face, d’arrêter de se voiler la face et de prendre comme une évidence que cela existe. Aujourd’hui il est impératif que les femmes algériennes s’organisent massivement contre toutes les lois qui les condamnent afin de revendiquer leurs droits les plus légitimes.

 
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