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La Izquierda Diario
10 de octobre de 2018 Twitter Faceboock

10 ans après les subprimes et la chute de Lehman Brothers
Le FMI craint une nouvelle crise
Jean Beide

Dix ans après la déflagration bancaire et financière initiée par la crise des subprimes et la faillite de la banque d’investissement Lehman Brothers à l’automne 2008, le système bancaire est-il à l’abri d’un nouveau séisme ? Les gouvernements, français en tête, assurent que oui. Néanmoins, le FMI lui-même se montre circonspect quant à la prétendue sécurité du système bancaire et financier.Entre la faiblesse et les contradictions des mesures de régulation adoptées depuis 2008, le virage serré du redressement des taux directeurs conduit notamment par la FED, l’inflation galopante dans les pays émergents et la possibilité d’un ralentissement de la croissance mondiale, le cocktail pourrait s’avérer explosif.

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Des mesures contradictoires pour sauver le système capitaliste

Le FMI affirme dans son dernier rapport sur la stabilité financière mondiale que le système bancaire est renforcé. En réalité, il s’agit surtout de mesures cosmétiques visant à rajouter quelques sparadraps un système capitaliste qui n’a pas surmonté la crise de 2008.

Citons à titre d’exemple la loi emblématique de 2013 portée par le socialiste Pierre Moscovici qui visait à séparer, au sein de l’activité des banques universelles (les banques à la fois commerciale et d’investissement), les activités commerciales d’un coté et spéculatives de l’autre. En réalité, cette mesure, pourtant présentée comme une mesure phare, n’a concerné selon le patron de la société générale, Frédéric Oudéa, qu’1% des activités des banques.

L’autre élément clé du renforcement du système bancaire impose aux banques d’augmenter la part de leurs fonds propres, c’est-à-dire la part des capitaux qui leur appartiennent directement et qu’elles ne possèdent pas grâce à de la dette. Or cette logique est grevée d’une contradiction. En effet, les fonds propres d’une banque sont constitués essentiellement par ses actions. Ces mesures poussent donc les banques dans des logiques de court-termes visant à satisfaire les actionnaires, logiques qui précipitent les crises en incitant à la prise de risque, à l’activité spéculative à forte rentabilité sur de courtes périodes.

Plus encore, les mesures mises en œuvre au moment de la crise pour sauver le capitalisme n’ont en rien surmontée les contradictions passées mais n’ont fait que les accumuler. La baisse brutale des taux directeurs, négatifs dans certains pays, couplée à l’injection massive de liquidités dans l’économie pour éviter une crise bancaire généralisée a certes permis d’éviter un arrêt brutal du système capitaliste, mais il n’a fait que repousser à plus tard les contradictions.

Comme le reconnaît le FMI, les taux faibles ont surtout alimenté l’endettement des entreprises, et les montagnes de liquidités ont nourri les opérations spéculatives des banques. Aujourd’hui, ce qui inquiète le FMI, c’est qu’en cas de nouvelle crise, ces deux mesures exceptionnelles – baisser les taux et injecter de l’argent dans l’économie – se révèleraient inefficaces.

Comme l’écrit l’économiste marxiste Issac Joshua : « Les deux leviers que sont la politique budgétaire et monétaire semble hors d’usage. La politique budgétaire est compromise par les charges monstrueuses qu’on rajoute pour tenter de faire face à la crise proprement financière, et trouver des ressources pour un nouveau plan de relance apparaît comme une opération de plus en plus délicate au fur et à mesure que le déficit s’alourdit. La politique monétaire flotte dans le vide, les baisses successives du principal taux directeur de la Fed sont demeurées jusqu’à présent sans effet. »

Un renforcement illusoire et un contexte économique mondial qui pourrait se tendre dans les prochaines années

Ainsi, bien que la croissance mondiale soit repartie, portée par une croissance chinoise qui se maintient, le poids de la crise n’a pas disparu, loin s’en faut. Et la croissance économique mondiale est assise sur des bases fragiles. Ainsi, le niveau d’endettement global des entreprises non financière par rapport au PIB est plus élevé qu’avant la crise, atteignant les 167 000 milliards de dollars qui représentent 250 % du PIB contre 210 avant la crise. Or cette augmentation de la dette du secteur privé non financier progresse plus rapidement que le taux de croissance, qui pourrait d’ailleurs ralentir.

A cela il faut ajouter l’endettement des Etats qui ont largement supporté le coût du sauvetage de l’économie, à l’instar des pays dits du Sud en Europe (Espagne, Italie, Irlande, Portugal et Grèce), et qui vacilleraient d’autant plus facilement en cas de nouvelle tempête. De leur côté les pays émergents subissent le retour en force du dollar et la hausse des taux directeurs (qui rend plus difficile l’accès au crédit). Ces pays se trouvent en proie au cercle vicieux de l’inflation galopante et de la fuite des capitaux qui fragilisent d’autant plus l’économie que les investissements se restreignent. Si pour l’heure, l’économie mondiale s’en tire à bon compte, les tensions s’accumulent tandis que l’instabilité géopolitique s’accroit et que la guerre commerciale pourrait déstabiliser une croissance fragile.

Contre les illusions réformatrices, même radicales, l’abolition du système tout entier

Les désordres financiers sont tantôt perçus comme le résultat des errements moraux de certains acteurs particuliers, guidés par leur appétit irresponsable, tantôt celui d’un système insuffisamment régulé et maitrisé. Ou encore, certains opposeraient une finance « parasitaire » à une finance au service de l’économie. En réalité, cette idée reçue selon laquelle il faudrait avant tout purger, judiciairement ou politiquement, le système financier, ne prend pas en compte le lien qui unit la finance au capitalisme.

La finance mondialisée n’est pas le résultat contingent de décisions malavisées, imposées par des banquiers trop gourmands, même si leur rôle dans la dérégulation et donc l’accélération de la fréquence des crises est bien réel. La finance est là pour répondre structurellement à l’impasse historique du système capitaliste qui voit progressivement les marges de profitabilité, le taux de profit, se réduire dans tous les secteurs. Le système capitaliste trouve dans la finance un débouché pour maintenir son taux de profit en menant toutes sortes d’opérations spéculatives.
Supprimer la finance comme débouché pour du capital en quête de rentabilité plongerait le capitalisme dans une contradiction insoutenable. La laisser faire serait condamner le monde et surtout la classe ouvrière mondiale à vivre et revivre des crises semblables à celles de 2008. Dans cette perspective, s’attaquer à la finance passe nécessairement par s’attaquer aux racines du système capitaliste.

 
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