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18 de octobre de 2018 Twitter Faceboock

Vu sur un blog Médiapart
L’histoire à l’école revue (et pas tellement corrigée) par S. Bern

L’histoire vue par S. Bern distribuée en 50 000 exemplaires à l’école : c’est la nouvelle opération de communication réussie par un animateur télé (ni historien ni enseignant) avec la bénédiction de l’autorité de tutelle.

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Source : Blog Médiapart Histoire, Ecole et cie

« Commençons par réviser ensemble notre histoire de France avec les rois qui y ont régné l’espace d’un millénaire. » Imaginée par S. Bern, la leçon d’histoire aux enfants des écoles ne cache pas son objectif : l’histoire est d’abord et uniquement celle de la France, l’histoire est celle des têtes couronnées, l’histoire de France et des têtes couronnées sont donc logiquement « notre » histoire. L’histoire des hommes, l’histoire du monde qui sont aussi et d’abord « notre » histoire attendront.

Distribué à 50 000 exemplaires dans les écoles primaires, sur financement en partie public (La Poste), « Le temps des rois » replonge le lecteur dans le roman national (le « mythe national » analysé par Suzanne Citron) un récit historique partiel, partial, daté, servi comme un bréviaire à des générations d’écoliers et dont on s’étonne quand même qu’il puisse servir de référence après plus d’un siècle de travaux et de recherches d’historiens, de renouvellement épistémologique, de réflexions sur la pédagogie de l’histoire et sur la finalité de son enseignement.

Un renouvellement qui ne semble pas concerner Bern, même de loin : « Si je n’en parle pas, dit-il avec sa modestie coutumière, qui le fera ? Aujourd’hui, tout un courant de pensée estime qu’il faut apprendre l’histoire des idées et pas celles des grands hommes. Mais avant 14 ans, comment intéresser les jeunes avec ça ? » Outre le fait que ce courant de pensée ne date pas d’aujourd’hui mais remonte au début du 20e siècle, il ne concerne pas spécialement une « histoire des idées » (on se demande bien ce que Bern entend par là) mais il s’est affiché dès le départ comme la remise en cause d’une histoire purement politique et militaire, étroitement événementielle et nationale, qui était alors la norme : l’histoire, autrefois limitée à celle des états nationaux, des batailles, des conflits et de leurs acteurs, a changé d’échelle. « Notre histoire », ce n’est pas celle de Clovis ou de Jeanne d’Arc mais des humains qui vivent sur Terre depuis les origines et contrairement à ce que prétend Bern, avec la suffisance de ceux qui n’ont jamais mis les pieds dans une salle de classe, les moins de 14 ans, écoliers et collégiens sont tout à fait ouverts à une histoire et à des activités qui ne les cantonnent pas au rôle d’auditeurs passifs d’un récit édifiant qu’on accepterait passivement sans le moindre regard critique.

« Et aujourd’hui, le rôle de ces rois est gommé à l’école » : avec cette affirmation péremptoire, dans la ligne des polémiques lassantes qui traînent depuis des décennies sur l’enseignement de l’histoire, Bern confirme sa méconnaissance totale du sujet. Non seulement l’histoire des rois n’a jamais été « gommée » à l’école mais, de façon significative, le titre de son bouquin , « Le temps des rois », est également celui de toute une partie des programmes officiels d’histoire de l’école élémentaire (cycle 3 : « le temps des rois »)… Mais comme beaucoup de ceux pour qui l’école est d’abord un sujet de polémique facile, Bern n’a manifestement pas consulté le programme. Pas consulté non plus les travaux et enquêtes conduites ces dernières années pour tenter d’évaluer les connaissances des élèves en histoire, qui restent massivement organisées, notamment à l’école élémentaire autour de l’histoire nationale et de ses prétendus « grands hommes » (1).

Bern conseiller pédagogique ? Cette fâcheuse initiative éditoriale, bien dans l’air du temps, ne risque pas de contrarier les autorités de tutelle : Blanquer, tout comme la présidente du CSP (Conseil supérieur des programmes) ont déjà eu l’occasion de préciser leur vision de l’histoire à l’école, à forte connotation identitaire, dominée par le souci de « faire aimer la France » aux élèves. Mais on ne dit jamais de quelle France il s’agit.

(1) - Le récit du commun, une enquête menée auprès de 7000 élèves (sous la dir. de F. Lantheaume et J. Létourneau, Presses universitaires de Lyon, 2016), fait ressortir la galerie très traditionnelle des personnages historiques mentionnés par les élèves : Louis XIV, Napoléon, Charlemagne, Louis XVI, Clovis, De Gaulle, Hitler, Sarkozy (l’enquête s’est déroulée pendant la campagne électorale de 2012...), César, Vercingétorix.

 
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