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La Izquierda Diario
29 de juin de 2015 Twitter Faceboock

Le système contre les médias libres
Parfois l’Etat perd. Abandon des charges contre 1 74 09 99 192.168.01

Rosa P.

Suite à la manifestation du 21 février à Toulouse contre le barrage de Sivens et en hommage à Rémi Fraisse, qui s’était soldée par nombre d’arrestations de manifestants, un article fut publié sur le site IAATA (Information Anti Autoritaire Toulouse et Alentours) dans lequel furent avancés des moyens d’auto-organisation pour contrecarrer la répression policière. Le supposé auteur de ce compte-rendu, accusé de vouloir inciter à commettre des dégradations et porter atteinte à l’intégrité des personnes, a été arrêté chez lui et placé en garde à vue une journée entière, le 6 mai dernier, a subi nombre de pressions des autorités, et comparaissait ce lundi 29 juin au tribunal de grande instance de Toulouse.

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Retour sur un contexte répressif


Après la mort de Rémi Fraisse, jeune écologiste d’une vingtaine d’année dans la nuit du 25 ou 26 octobre 2014, sur le site de Sivens, une série de manifestations a eu lieu dans la ville rose. A l’issue d’un hiver particulièrement répressif, ce sont 70 arrestations, 53 condamnés à ce jour avec pour certains de la prison, et des milliers d’euros d’amende, qui témoignent de la volonté du gouvernement de passer en force en faisant de la justice le relais local de la sa politique. Cette contestation importante contre un projet inutile et surtout contre l’impunité des responsables de la mort de Rémi a rapidement dépassé les autorités. C’est alors à grands coups de déploiements policiers disproportionnés que l’Etat a essayé de museler les manifestants.

Présentés par les médias dominants comme des assistés ou des « casseurs », ces derniers, issus aussi bien de partis réformistes que du mouvement ZAD ou à tendance libertaire, ont du subir coups de matraques, gaz lacrymogènes, grenades, ainsi que pressions et humiliations pour les inculpés. De mèche avec les petits commerçants du centre ville toulousain, la Préfecture profita au printemps dernier du mouvement anti-barrage pour systématiser la délocalisation de toutes les manifestations politiques (issues des milieux militants de gauche, bien entendu) dans la périphérie de la ville ainsi que prolonger la militarisation de l’espace public débutée en novembre. Désormais, pour la ville passée à droite avec l’élection de Moudenc, il faut faire en sorte qu’aucune contestation un tant soit peu sociale et politique, défendant les droits des femmes ou des opprimés, ne nuise gravement à l’économie et à l’image de Toulouse.

La manif’ du 21 février et la publication d’un compte-rendu sur IAATA


C’est dans ce contexte de criminalisation des mouvements sociaux que s’est déroulée la manifestation du 21 février contre« l’agriculture intensive et le monde des bétonneurs » ainsi qu’en mémoire de Rémi Fraisse, rassemblant plus de 400 personnes. Jets de peinture contre gaz lacrymogènes. Très vite, certains manifestants ont exprimé leur rejet du système capitaliste et de son bras armé, la police, en brisant quelques vitrines de banques ou de boutiques pour bobo friqués aimant claquer un smic en une journée.

Bien évidemment plutôt que de faire droit à la contestation politique des manifestants, les médias bourgeois préfèrent montrer, bien hypocritement, à quel point il est plus juste moralement de s’offusquer pour trois vitrines brisées d’une des rues les plus cossues de Toulouse que du décès d’un jeune militant, mort pour ses idées. A ce titre, souvenons-nous des propos de Thierry Carcenac, président du conseil général du Tarn et accessoirement membre du PS : « Mourir pour des idées, c’est une chose, mais c’est quand même relativement bête ». On ne s’étonnerait presque plus de grand-chose vu le degré de droitisation du parti socialiste, tant dans sa politique extérieure que par les lois répressives qu’il adopte, avec en tête, celle sur le renseignement. Le respect des libertés fondamentales, de mouvement et d’expression, n’est à présent plus un obstacle pour le Big Brother du ministère de la Défense, car la lutte contre le terrorisme, qu’est censée faciliter la loi sur le renseignement, se double bien évidemment de la lutte contre toute opposition réelle de gauche.

5 ans de prison et 40000 euros d’amende pour un compte-rendu de manif’ ?

Le site IAATA, site collaboratif anti-autoritaire toulousain, se propose notamment de relayer les luttes en cours de la région et surtout revendique d’être un média libre et indépendant dénonçant ce que les autres dissimulent. Et en l’occurrence, la violence policière y est dépeinte par ceux qui la vivent. Le 1er mars le site publie un article qui fait le bilan de la manifestation du 21 février, et prodigue quelques conseils en matière d’auto-organisation et de défense contre les violences et charges policières. Un homme est arrêté pour ce délit d’opinion le 6 mai, chez lui, à 6h30 du matin, au motif qu’un traçage informatique aurait conduit à l’identifier comme l’auteur du texte. Il est accusé, en réalité, sans preuve d’être l’administrateur d’IAATA (d’autant plus qu’il s’agit d’un site participatif sans « administrateur ») et d’être à l’origine de ce brûlot prônant les dégradations volontaires et l’atteinte aux représentants de « l’ordre public ».

La liberté d’expression est belle et juste pour Charlie Hebdo, quand elle participe à l’identification de l’ennemi du dehors, le dhjiadisme, et implique l’unité nationale en gommant tout antagonisme de classes. En revanche, lorsqu’elle est saisie par les opposants politiques de l’intérieur, qui dénoncent le gouvernement et ses manœuvres, l’histoire n’est plus la même. Des droits oui, mais quand ils servent l’idéologie dominante.

Forte mobilisation pour le procès du 29 juin

1 74 09 99 192.168.01 – c’est ainsi que l’accusé se présente publiquement – insiste sur le caractère honteusement arbitraire et politique de cette arrestation : aucune preuve tangible ne l’incrimine ni comme auteur de cet article, ni comme administrateur du site. Et c’est à ce titre que furent abandonnées, lors de son procès ce lundi 29 juin, toutes les charges contre lui, pour vice de procédure. Dossier vide et forte mobilisation devant le tribunal (plus d’une centaine de personnes) permirent à 1 74 09 99 192.168.01 de ressortir libre. La disproportion objective des moyens mis en œuvre pour cette arrestation face au « délit » invoqué relevait tout simplement du ridicule : le parquet s’en est très certainement rendu compte, puisque lors de l’audience aucun motif n’a été explicité pour l’abandon des charges.

Outre l’« heureux dénouement » de cette affaire, ce qui ressort également de cette journée c’est la diversité des soutiens témoignant d’une réelle convergence des luttes. Ainsi, furent présents à ce rassemblement aussi bien des enseignants du collège Bellefontaine (sévèrement réprimés par leur hiérarchie pour fait de grève), la caisse d’autodéfense juridique (CAJ), Riposte radicale, ou encore la CREA qui réquisitionne des logements vides.


Aujourd’hui c’est moi, demain ce sera peut-être toi

Le délit politique existe bel et bien en France aujourd’hui. Cet exemple illustre parfaitement la stratégie de la peur et de la dissuasion dorénavant adoptée par le gouvernement. Frapper arbitrairement, même sans réelle preuve, pour intimider et limiter la contestation : voilà ce que va notamment encourager la loi sur la surveillance. Comme le soutient à juste titre 1 74 09 99 192.168.01, la répression s’abat où elle veut et surtout, peut viser toute personne susceptible un jour de manifester son désaccord face à l’État, que ce soit en manifestation ou par la rédaction d’un simple article.

Le rassemblement de ce 29 juin témoigne donc bien de l’impérieuse nécessité de populariser les luttes et surtout de les fédérer afin de répondre efficacement à la répression lorsqu’elle s’abat gratuitement et abusivement sur quiconque s’oppose à la politique droitière du gouvernement.

Enfin, même si 1 74 09 99 192.168.01 n’a pas été condamné, c’est tout de même plus de 1000 euros qu’il a été obligé de débourser pour ses frais d’avocat. N’hésitez pas à le soutenir financièrement par l’intermédiaire de la CAJ.

 
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