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La Izquierda Diario
28 de décembre de 2018 Twitter Faceboock

Retour de flamme de 2011
Tunisie : un journaliste s’immole par le feu pour « commencer une révolution »
Rafael Cherfy

"Pour les fils de Kasserine qui n’ont pas de moyens de subsistance, aujourd’hui, je vais commencer une révolution, je vais m’immoler par le feu. » Ce sont les paroles d’Abdel Razzaq Zorgui, issues d’une vidéo tournée 20 minutes avant son passage à l’acte, lundi 24 décembre.

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L’immolation. Un geste d’une violence inouïe qui témoigne d’une détresse sans précédent. Dans sa vidéo, Abdel explique les raisons de son désespoir, une bouteille d’essence à la main. Pendant 4 minutes, il dénonce le chômage et la précarité que subissent les habitants de Kasserine. Lui même les qualifie de « gens vivants qui sont morts en réalité ».

« Pendant 8 ans j’ai tenté de trouver un travail, mais année après année, rien n’a marché. Tout n’est que mensonge ». On peut déjà saisir l’ampleur de sa détresse par cette simple phrase. Mais Abdel Razzaq Zorgui va plus loin et dénonce les manœuvres des dirigeants tunisiens qui répriment durement tout mouvement de contestation sociale : « On descend dans la rue pour demander le droit au travail, on nous sort le terrorisme. Cela veut dire : taisez vous et crevez de faim ».

Pris en tenaille, sans perspectives, à tel point qu’il en vient à parler de « faire la révolution seul », de s’immoler « en espérant que l’Etat s’intéresse à Kasserine ». Une détresse incommensurable qui illustre l’état du pays et la souffrance de ses habitants.

Loin d’être le premier à faire ce choix, son geste fait tristement écho aux multiples exemples du même genre en Tunisie. Il renvoie en particulier à l’immolation du jeune marchand ambulant Mohamed Bouazizi qui, il y a près de 7 ans, avait déchaîné la colère des tunisiens et lancé les premiers soubresaults du printemps tunisien. Son geste avait été « l’élément déclencheur » d’une révolte qui, en à peine un mois, avait fait fuir le dictateur Ben Ali du pays. Par la suite, des dizaines de jeunes à travers le monde arabe avaient suivi cette « voie », ouvrant sur le désormais célèbre « printemps arabe ». Si le dictateur Ben Ali n’est plus à la tête du pays, force est de constater que les conditions économiques et sociales, un des piliers des revendication de 2011 forgées sur le « pain et la liberté » n’ont guère changées. Elles se sont mêmes aggravées. Que la révolution sociale a été avortée. Et que du point de vue politique, ce sont les anciennes figures du régime précédents, telles que le président Béji Caïd Essebsi, refont surface.

L’immolation est un cri politique de désespoir, qui s’emploit à dénoncer la répression policière et l’extrême pauvreté qui touchent les jeunes tunisiens.

Déja en 2010, Kasserine était une des premières villes mobilisée pour protester contre la pauvreté. Aujourd’hui elle est encore « à l’avant garde » de la colère sociale qui gronde dans le pays. Dans la nuit de lundi à mardi, suite au passage à l’acte du journaliste tunisien, des affrontements ont éclatés dans la ville. Au cours de la semaine, ils se sont étendus dans différentes villes du pays comme Jbeniana, Terbourba... Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a, de son côté, appelé à une grève nationale de la « dignité » le 14 janvier, jour anniversaire de la révolution de 2011.

Le pouvoir tunisien ne cache pas son inquiétude. L’exemple français du mouvement des gilets jaunes se propage déjà bien au delà de ses frontières. Les revendications qu’il porte sur la précarité et les questions démocratiques pourraient trouver un écho mondial sans précédent. En Tunisie des appels aux « gilets rouges » (couleur du pays) ont déjà été lancés. En réponse, le pouvoir tunisien s’est empressé de restreindre la vente de gilets aux entreprises en plus d’en retirer 50 000 de la circulation...

 
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