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La Izquierda Diario
12 de janvier de 2019 Twitter Faceboock

Première massification du mouvement
Acte 9 : L’intimidation n’aura pas marché : ces nouveaux manifestants qui rejoignent les Gilets Jaunes
Nina Kirmizi

Si même BFMTV le dit… La mobilisation des Gilets Jaunes est en hausse, et la radicalité qui la sous-tend est toujours présente. La manifestation du 12 janvier pourrait même, pour certains, être la plus forte depuis le début du mouvement. Arrestation de Christophe Dettinger, polémique de la cagnotte lancée par Schiappa, ultime provocation de Macron, semblent avoir été les ingrédients pour convaincre ces soutiens des Gilets Jaunes, jusque là hésitants, à rejoindre les rangs des manifestants.

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Crédits photo : Tweeter

Même s’ils minorent les chiffres, les médias dominants reconnaissent la progression du nombre de manifestants pour cet acte 9 des Gilets Jaunes. Entre Bourges, capitale d’un jour du mouvement des Gilets jaunes où Priscillia Ludoswki et « Fly Rider » alias Maxime Nicolle avaient appelé à manifester, et Paris, lieu de manifestation appelé par Eric Drouet, c’est surtout dans toutes les grandes villes de France que les Gilets Jaunes sont descendus dans les rues : Bordeaux, Strasbourg, Montpellier, Toulouse, Lille, Rouen, Saint-Etienne, Lyon, Nantes ont également été le théâtre de cette « marée jaune » que la France connait depuis 9 semaines.

Dettinger, Schiappa, Macron… des provocations qui poussent dans la rue
Le gouvernement comptait sur le lancement du « grand débat national » pour faire rentrer la mobilisation dans le rang. Dans sa stratégie de « normalisation », il a de nouveau tenté, la semaine dernière, d’exploiter les images du boxeur Christophe Dettinger pour diviser les Gilets Jaunes entre les « manifestants légitimes » et les casseurs. Vu la popularité qu’a subitement rencontré Dettinger et l’émoi suscité par son arrestation, l’opération a été un échec. Et force est de constater que ce samedi, les rangs des manifestants se sont gonflés.

A Rennes, un néo-manifestant se confie à Libération : « Je soutiens le mouvement depuis le début mais je suis tout particulièrement venu aujourd’hui après les provocations de Macron, de Castaner et d’Edouard Philippe » explique Philippe, ambulancier de 58 ans.

Comme Philippe, des soutiens des Gilets Jaunes ont franchi le cap d’aller en manifestation pour la première fois. Après les discours martiaux de Christophe Castaner et d’Edouard Philippe, beaucoup s’inquiètent des attaques sur le terrain des droits démocratiques et du non respect du droit de manifester. Si une nouvelle fois, les manifestations de Paris et de Bourges ont été déclarées, la radicalité des Gilets jaunes est toujours présente comme en témoigne à Paris la volonté malgré l’interdiction de manifester sur les Champs Elysées, ou encore à Bourges, où des Gilets Jaunes ont finalement investi le centre-ville, en dehors du parcours de manifestation déposé.

Mais il y a eu les provocations qui ont mis le feu aux poudres : celle de Schiappa qui s’en est pris à la cagnotte Leetchi en soutien à Christophe Dettinger ( en réponse de laquelle une autre cagnotte Leetchi – « pour que Schiappa se la ferme »- a été ouverte) ; mais surtout celle d’Emmanuel Macron qui s’en est pris, ce vendredi, aux gilets jaunes en pointant du doigt « nos concitoyens [qui] pensent qu’on peut obtenir sans effort ». Ultime marque de mépris à laquelle la massification de la mobilisation de ce samedi vient répondre…

Une Gilet Jaune présente à Paris pour sa deuxième manifestation

Même relatif, un « retour » des militants syndicaux et politique

L’autre symptôme de cet élargissement de la mobilisation est le retour, après la « pause » des vacances, de certains militants ou secteurs traditionnels du mouvement social qui sont de nouveau dans les cortèges. Si la confédération Solidaires a appelé à manifester ce 12 janvier de même que les samedis suivants, il n’y avait pas de cortège organisé et le syndicat n’a pas, pour l’heure, enclenché de dynamique à la grève. Ou encore, plus nouveau, l’appel de la CGT Paris à Hôtel de Ville, rassemblement peu nombreux.

Si l’on peut s’en réjouir, on est encore loin de la convergence concrète et cela reste très en retard, relativement au niveau de mobilisation des Gilets jaunes et en rapport à la détermination des Gilets jaunes dont le rapport à la violence et à la répression est semble-t-il bien plus avancé que le milieu militant traditionnel, quelque peu parti en vacances pour les fêtes… pendant que les Gilets jaunes maintenaient un niveau de mobilisation relativement important en rapport aux fêtes. Une des conditions qui a permis un rebond important des Gilets jaunes dès l’acte 8.

A Lille, ce sont quelques chasubles rouges de la CGT qui ont fait surface. Le plus souvent, les militants syndicaux se rangent derrière le gilet fluo comme à Saint-Etienne : « il y a des militants CGT mais ils sont là en tant que Gilet Jaune » atteste Q. militant de la Jeunesse Communiste stéphanoise. Mais ce sont alors les drapeaux syndicaux qui flottent au vent.

A Paris, des chasubles orange, aux couleurs de la SNCF, attestaient la présence de cheminots. Ils rappellent les initiatives lancées conjointement, au mois de décembre à Paris, par un secteur de cheminots regroupés lors de la bataille du rail du printemps dans le « collectif Intergare » et le comité Adama, ayant eu force d’entrainement sur le milieu traditionnel de la gauche militante. Ou encore les initiatives de jonction lancées depuis la CGT PSA pour rejoindre la manifestation du samedi 1er décembre.
Pour la première fois, à La Souterraine, dans la Creuse, « une dizaine de gilets jaunes creusois et autant de militants syndicaux ont manifesté, ce mercredi 9 janvier […] côte à côte » nous dit France 3, pour soutenir les salariés du Leader Price menacé de fermeture. Une région qui avait déjà défrayé la chronique avec la lutte exemplaire des ouvriers des GM&S contre la fermeture de leurs usines en 2017.

A Paris et à Annecy, le Nouveau Parti Anticapitaliste a défilé derrière une banderole aux couleurs du partis d’Olivier Besancenot et de Philippe Poutou aux côtés des Gilets Jaunes.

Stylos rouges et Gilets Jaunes

Au niveau national, le collectif des stylos Rouges – qui regroupe des enseignants du primaire et du secondaire contre les réformes Blanquer et pour des revalorisations salariales – qui a fait beaucoup parler de lui ces derniers jours - n’a pas officiellement appelé à rejoindre les Gilets Jaunes. Pourtant, à Paris comme à Lille, une partie d’entre eux ont décidé de se joindre à la mobilisation en cours. Aucune hostilité vis-à-vis des organisations syndicales de leur côté puisque la plupart de ses animateurs sont des militants syndicaux de divers horizons (FSU, FO, CGT, SUD, Unsa…). La démarche exprime un certain ras-le-bol face à la frilosité de leurs directions syndicales à prendre le train de la mobilisation en marche. Si une partie des Stylos Rouges ne souhaite pas encore « se diluer dans les Gilets Jaunes », beaucoup, s’ils ne l’ont déjà fait, veulent se joindre à leurs mobilisations. Une partie d’entre eux l’ont fait ce samedi dans des cortèges enseignants.

A Paris, une enseignante de lycée professionnel dans le Loiret, chasuble fluo sur le dos et sticker du collectif dans le dos, est dans la manifestation parisienne. « Je suis déjà gilet jaune depuis plusieurs semaines » raconte-elle. Avec la création du collectif il y a peu, elle a spontanément rejoint la mobilisation des « Stylos Rouges ». « on pense d’abord à nos élèves avec des classes surchargées et une réforme de l’enseignement professionnel sur laquelle nous n’avons aucune information pour septembre prochain » explique-t-elle.

En s’inscrivant dans la durée, en résistant aux injonctions gouvernementales, la mobilisation des Gilets Jaunes a un véritable effet d’entraînement. Plus encore, si le gouvernement et les grands médias expliquent que le mouvement n’est plus « violent » et est devenu plus raisonné, ce n’est pas tant lié à une « déradicalisation » des Gilets jaunes qu’à de moins nombreuses provocations policières étant donné le rapport de force et la masse des Gilets jaunes jamais aussi nombreux sur Paris, ou encore sur Bourges.

De plus, non seulement sur ses 60% de soutiens qui se maintiennent dans l’opinion, jusqu’alors hésitants à franchir le pas de la manifestation. Mais aussi sur un ensemble de secteurs du mouvement social, rendus atones par des directions syndicales complaisantes, qui commencent à s’emparer du mouvement. Une nouvelle preuve qu’à seulement quelques jours du lancement du « grand débat national » de Macron, sa stratégie de normalisation prend l’eau. Et que la mobilisation des Gilets Jaunes reste imperméable aux provocations policières et politiques d’un exécutif aux abois.

 
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