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La Izquierda Diario
19 de juillet de 2015 Twitter Faceboock

Après le vote de mercredi
En Grèce, Tsipras a le vent en poupe. Jusqu’à quand ?
Ciro Tappeste

Selon les derniers sondages d’opinion, si les Grecs devaient retourner aux urnes, ils seraient 42,5% à voter Syriza. Le parti d’Alexis Tsipras obtiendrait ainsi 165 sièges à la Vouli, par rapport aux 149 actuels, soit quatre de plus que le seuil requis pour avoir la majorité. Ce sont les conclusions que tire le quotidien indépendant Efimireda. Ce même journal souligne par ailleurs que 70% des Grecs et 62% des électeurs de Syriza soutiennent Tsipras et sa politique vis-à-vis de la Troïka et souhaitent rester dans la zone euro. Fort de ce soutien, le Premier ministre essaie de passer à la vitesse supérieure. Mais combien de temps va durer cette « nouvelle lune de miel », d’autant plus que la situation grecque, tant sur le plan politique, économique que sociale, reste des plus tendues.

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Elections anticipées ?

Tsipras pourrait en effet choisir le chemin des élections anticipées, qu’il serait censé gagner haut la main selon les dernières enquêtes d’opinion. Mais sur le papier, uniquement. En effet, il se trouve face à un parti complètement fragmenté. Pour se faire une idée, il suffit de penser qu’il est impossible à ses partisans, à l’heure actuelle, de convoquer un nouveau Comité Central de Syriza, après le vote de défiance de mercredi 15 juillet. Selon les calculs de Tsipras, mieux vaut, à l’heure acuelle, gouverner avec un cabinet minoritaire, en s’appuyant sur l’opposition pro-Troïka, que de risquer d’aller à des élections, immédiatement, avec un parti divisé. Il procède donc, en solitaire, avec l’équipe resserrée de collaborateurs qui l’entoure, en s’appuyant sur les sondages, en accélérant la cadence, avec l’espoir d’éreinter la gauche du parti qui a perdu un temps précieux avant de rompre (ou se faire débarquer) avec le gouvernement.

Pas de temps à perdre

De façon expéditive, les nouveaux ministres et secrétaires d’Etat ont prêté serment, au lendemain des dix démissions volontaires ou forcées du gouvernement Tsipras 1, à laquelle il faudrait ajouter le débarquement de Yanis Varoufakis, après le référendum du 5 juillet. En se débarrassant des « frondeurs », Tsipras espère réduire considérablement leur influence au sein de l’opinion publique et faire taire les voix dissidentes, condamnées, pour la plus connue d’entre elles, celle de Varoufakis, à tirer à boulets rouges contre les réformes gouvernementales « condamnées à l’échec », selon lui, mais à partir des ondes de la BBC. La seule qui, pour l’instant, n’a pas été déboulonnée, est la présidente du Parlement, Zoé Konstantopoulou, mais Tsipras laisse à ses porte-flingues la tâche de l’attaquer à longueur de journée, par médias interposés, attendant une meilleure occasion pour la faire sauter.

Ordre et mesurettes de « gauche »

Olga Geraovasili, la nouvelle porte-parle du gouvernement, remplace Gabriel Sakellaridis, pourtant très modéré dans sa « fronde ». C’est elle qui a posé, samedi, en conférence de presse, le nouveau cadre du gouvernement Tsipras 2 : « le défi que nous avons face à nous consiste à retourner la situation et que les citoyens se sentent rassurés et surs, avec le gouvernement Syriza ». Une véritable déclaration de droite, ont noté plusieurs journalistes politiques grecs.

Pour continuer à manœuvrer et à pouvoir présenter son gouvernement comme un véritable « cabinet de gauche et de résistance », Tsipras doit, néanmoins, réaliser quelques concessions de forme. L’énorme incendie qui a menacé la proche banlieue d’Athènes, samedi, a été l’occasion pour lui d’être devant les caméras et de multiplier les déclarations. Les prochaines mesures que devrait adopter le Parlement dans le cadre de l’accord avec la Troïka sont potentiellement moins impopulaires que les précédents dans la mesure où elles concernent, notamment, la redistribution des fréquences de télévision, dossier sur lequel se sont cassés les dents l’ensemble des prédécesseurs de Tsipras et qui font se dresser tous les magnats de la presse et des médias, qui hurlent au « péril soviétique ». Il s’agit là d’une occasion en or, pour Tsipras, pour affirmer que « ceux qui n’ont jamais payé vont également commencer à contribuer à l’effort national ». Il en va de même pour les questions de corruption et d’évasion fiscale, « un incendie qui n’a jamais été éteint, dans le pays », selon le Premier ministre, qui promet de s’atteler à la question.

Devant les Grecs, il s’affiche comme celui qui a sauvé le pays d’un Grexit catastrophique, qui a été celui qui va rouvrir les banques, à partir du lundi 20 juillet, et qui réussit même à louvoyer avec les exigences de la Troïka. Pour ce qui est des hausses de TVA sur les produits de première nécessité qui devraient entrer en vigueur dès le 20, on songera au fait que la féta et l’huile d’olive continueront à être taxées à 13%, alors que seule la féta râpée (que personne n’utilise en Grèce) ou l’huile de Tournesol (qu’aucune ménagère n’achète), passeront à 23%. Il s’agit là d’entorses minimes aux engagements du gouvernement, que Tsipras prétend faire passer comme d’énormes concessions, en espérant que les contrôleurs de la Troïka feront semblant de ne voir que du feu.

Jusqu’à quand ?

C’est sur cette base que le Premier ministre espère capitaliser la situation post-« accord » avec la Troïka, en essayant de tirer un maximum de profit des difficulté des opposants à l’austérité à cristalliser un front oppositionnel, en partie pour des questions de calendrier estival, en partie en raison du temps perdu par la gauche de Syriza et en raison du sectarisme du KKE et du PAME qui refusent de poser la question du front unique, en partie également dans la mesure où la majorité du front du « non » continue à poser l’alternative en termes de « rester dans la zone euro ou en sortir », et non en termes de classe et d’affrontement.

Mais jusqu’à quandTsipras va pouvoir conserver la main ? C’est la question que les plus lucides, au sein de son staff, se posent, bien conscients qu’un parti fragmenté et qu’un retour en force des manifestations contre l’austérité et les mesures du troisième Mémorandum pourraient rapidement changer la donne.

 
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