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La Izquierda Diario
6 de août de 2015 Twitter Faceboock

Lutte pour le salaire minimum aux Etats-Unis
15 dollars de l’heure. Nouvelle victoire dans l’Etat du New York

Une commission consultative a recommandé que l’Etat du New York augmente le salaire minimum à 15 dollars de l’heure pour les travailleurs de la restauration rapide. Le mouvement national pour les $15 a, ces derniers mois, remporté d’importantes victoires dans plusieurs villes et prend de la vitesse à travers le pays. Néanmoins, d’importantes questions sur le potentiel du mouvement restent toujours sans réponse.

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Juan Cruz Ferre, correspondance de New York

Une commission consultative nommée par le gouverneur Andrew Cuomo recommande l’instauration d’une augmentation du salaire minimum à 15 dollars de l’heure pour les travailleurs des fast-food. La commission, composée par le maire de Buffalo Bryon Brown, par le secrétaire-trésorier de l’Union internationale des employés des services (SEIU) Mike Fishman et par l’entrepreneur Kevin Ryan, a rendu public sa décision, mercredi 22 juillet. Le commissaire au travail de l’Etat s’apprête à accepter cette recommandation et une nouvelle réglementation est en cours de préparation.

L’augmentation salariale ne prendra pas effet immédiatement, cependant. La commission propose de l’introduire progressivement sur une période de trois ans pour la ville de New York où les 15$ seront atteints fin 2018. Dans le reste de l’Etat, le salaire minimum s’élèverait à 15 dollars le 1er juillet 2021.

Cette augmentation constitue une victoire importante pour les travailleurs de la restauration rapide, seulement 3 ans après leur première grève à New York City. Après le premier débrayage, d’autres actions ont été entreprises dans d’autres villes, faisant de la lutte pour les $15 un véritable mouvement national ; un mouvement qui a réussi à construire un rapport de force obligeant certains démocrates à accepter la proposition d’augmentation.

Pourtant, cette dernière concession dans l’Etat du New York laisse de côté des pans entiers des travailleurs à bas salaire : serveurs dans les restaurants, employés dans la grande distribution, aides soignantes à domicile, entre autres. Selon James Parrott du Fiscal Policy Institute, 50 000 travailleurs de New York City bénéficieront du salaire minimum augmenté, mais environ 1,25 million de personnes en dehors de la restauration rapide gagneront toujours moins de 15 dollars de l’heure.

L’écart salarial subi par les travailleurs sans papiers, qui gagnent en moyenne moins de la moitié du salaire minimum actuel, est encore plus important et aucune mesure n’est proposée pour y remédier.

Toutefois les 180 000 personnes qui travaillent dans la restauration rapide dans l’Etat du New York vont voir leurs salaires augmenter plus de 70 %, une véritable bouffée d’oxygène pour l’un des secteurs les plus exploités de l’économie états-unienne. Les effets de l’augmentation se répercuteront probablement sur la restauration traditionnelle et d’autres secteurs à bas salaires dans l’Etat puisque ceux-ci disputent en grande partie la même main-d’œuvre non qualifiée.

Une vague nationale

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Le mouvement pour le salaire minimum à 15 dollars de l’heure a considérablement grandi et commencé à gagner d’importantes batailles. Il a remporté sa première victoire à Seattle, l’été dernier. Défendu par la conseillère municipale socialiste Kshama Sawant, un projet d’ordonnance locale sur l’augmentation du salaire minimum a été voté. La victoire la plus récente a été obtenue à Los Angeles où le Conseil municipal a voté pour augmenter le salaire minimum de manière graduelle sur une période de 5 ans.{{}}

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Mi-juillet, un groupe de sénateurs avec Bernie Sanders à leur tête a présenté un projet de loi augmentant le salaire minimum national ($7,25 à l’heure actuelle) à $15 de l’heure devant le Sénat. Même s’il est très peu probable que ce projet soit voté, son introduction met la question sur le devant de la scène nationale. Elle dévoile par ailleurs la vraie nature de ces Démocrates qui ne sont pas prêts à empiéter sur les bénéfices des capitalistes, même dans leur discours.{{}}

Evolution de la productivité et des salaires depuis 1948
Evolution de la productivité et des salaires depuis 1948 Evolution de la productivité et des salaires depuis 1948.

Le salaire minimum national n’a pas été réévalué depuis 2009. A une échelle plus large, depuis 1968, les maigres augmentations salariales n’ont pas suivi l’augmentation de la productivité. Cela signifie que les bénéfices vont de plus en plus dans les poches du patronat alors que la part du revenu national détenue par le monde du travail n’a cessé de diminuer au cours des 35 dernières années. C’est un aspect central de l’accroissement de l’inégalité économique aux États-Unis. Si le salaire minimum avait suivi les gains de productivité depuis 1968, il s’élèverait à plus de 26 dollars de l’heure aujourd’hui. C’est en ce sens également que l’idée selon laquelle les employeurs ne pourraient pas supporter un salaire minimum augmenté à l’échelle nationale est totalement fausse.{{}}

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Le SEIU et le potentiel du mouvement pour les $ 15

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Le SEIU joue un rôle central dans l’organisation de la lutte pour les $ 15. Le « FightFor15 », soutenu par le SEIU, est une organisation au cœur de la campagne et constitue un exemple dont s’inspirent d’autres groupes qui se battent pour des augmentations salariales. Le droit de se syndiquer fait également partie des revendications du SEIU.{{}}

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Le SEIU est l’un des seuls syndicats dont les adhésions augmentent sans cesse depuis 10 ans. La syndicalisation des travailleurs des fast-food renforcerait sans doute le mouvement ouvrier et servirait d’exemple pour d’autres salariés précaires. Cependant, le SEIU n’a rien à voir avec un syndicat démocratique au sein duquel les membres de base sont encouragés à débattre de l’orientation de l’organisation, prennent les décisions sur les campagnes à mener ou encore élisent de manière démocratique tous leurs représentants.{{}}

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Certains activistes et des militants de l’extrême-gauche dénoncent l’organisation verticale de la campagne « Fight for 15 ». Plutôt que de construire un militantisme de base sur les lieux de travail, la stratégie adoptée par le SEIU vise plutôt à dégrader l’image de marque de telle ou telle entreprise auprès des clients afin d’obliger les patrons à s’asseoir à la table des négociations avec les représentants syndicaux. {{}}

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Certains estiment néanmoins qu’il s’agit au moins d’une moins mauvaise approche que celle de l’AFL-CIO pour arrêter la fuite de militants : pendant l’augmentation salariale à Los Angeles, la fédération a aspiré – après avoir défendu l’augmentation – à en exempter ses membres dans une tentative peu scrupuleuse d’encourager les patrons à signer des conventions collectives.

Il est peu probable que les stratèges du SEIU acceptent une augmentation sans un syndicat pour les salariés des fast-food. Le syndicat a dépensé des millions de dollars pour organiser et soutenir le « Fight for 15 ». La bureaucratie syndicale n’aurait pas agi ainsi si elle ne s’attendait pas à une éventuelle rentrée de nouveaux membres et de nouvelles cotisations.

Les mots doux de Cuomo pour le SEIU pendant son annonce mercredi dernier, le discours de Hillary Clinton devant la convention du FightFor15 à Détroit montrent par ailleurs que le syndicat fera tout pour travailler au service du Parti démocrate en vue des prochaines élections. Pourtant, conquérir des droits syndicaux pour des millions de travailleurs constituerait une véritable victoire. Le salaire minimum à $15 est devenu la revendication qui peut unifier les travailleurs à bas salaires à travers le pays et ces récentes victoires peuvent encourager de plus en plus de travailleurs à lutter.

Reste à savoir si les travailleurs de la restauration rapide gagneront non seulement de meilleurs salaires, mais aussi un syndicat ; et si cette victoire pourrait redynamiser le mouvement ouvrier aux Etats-Unis, ou si une fois le droit de se syndiquer obtenu, la direction du SEIU essaiera d’enrégimenter ses encartés sur son modèle verticaliste d’organisation. Il existe cependant la possibilité que les secteurs les plus exploités de l’économie états-unienne, encouragés par cette victoire, décident de revendiquer plus encore, et décident d’aller plus loin.

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