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La Izquierda Diario
26 de mars de 2019 Twitter Faceboock

Coup de comm’
Avec Pascal Canfin, Macron repeint sa liste en vert pour les européennes
Paul Morao

Aux européennes, En Marche jouera comme prévu la partition du « progressisme ». Un « progressisme » repeint en vert pour l’occasion, quitte à tordre la réalité du bilan écologique du gouvernement des riches.

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2 ans après les présidentielles : le macronisme serait-il un écologisme ?

Le 9 février 2017, WWF invitait Macron à venir présenter son programme pour l’écologie. A l’époque, l’ancien ministre de l’économie entrait en campagne pour les présidentielles avec un lourd boulet aux pieds sur les questions écologiques : la fameuse Loi Macron de 2015. Cette dernière avait été dénoncée par les écologistes sur un plan environnemental, avec en ligne de mire le choix des autocars contre le rail, le projet d’étendre les espaces disponibles à la publicité, mais également la volonté d’inscrire dans la loi la possibilité de passer outre les dispositions du Code de l’Environnement qui pourraient freiner l’activité économique.
Ce bilan n’empêchait pas le candidat de Macron de se présenter sous un jour écolo en annonçant un pot-pourri de mesures hétéroclites : fermeture des centrales à charbon, fin des nouveaux permis d’exploitation pour les hydrocarbures, protection de la biodiversité Outre-Mer, réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique, fermeture de la centrale de Fessenheim.

2 ans plus tard, le Président de WWF, Pascal Canfin vient d’annoncer qu’il quitterait l’ONG environnementale pour briguer la seconde place sur la liste d’En Marche aux élections européennes. Une surprise, plusieurs mois après la démission de Nicolas Hulot pour cause d’inaction gouvernementale, et au moment où le mouvement des Gilets jaunes perdure. Le gouvernement Macron aurait-il finalement tenu ses promesses écologiques au point de convaincre une figure des Verts ? Rien n’est moins sûr !

Un bilan écologique très loin des promesses d’un néo-libéralisme vert

A bien y regarder, le bilan du gouvernement Macron sur l’écologie est pourtant très loin des promesses bruyantes du président. Certes, sa communication lui a valu une reconnaissance mondiale, au point de se voir remettre le titre de « Champion de la Terre » par l’ONU en septembre 2018. Une récompense visant surtout l’action « diplomatique » (comprendre : les talents de communicant) de Macron et son slogan « Make our planet great again », brandi à la face d’un Trump climato-sceptique - adversaire idéal du néo-libéralisme vert incarné par le président. Pourtant, derrière les faux-semblants, la réalité est bien moins reluisante.

Comme l’a montré l’Observatoire Climat-Energie, la France connaît ainsi depuis 2016 une hausse de ses émissions de gaz à effet de serre, après plusieurs années de baisse. En 2017, les émissions de GES ont ainsi dépassé de 6,7% le budget carbone de la France, un plafond d’émission fixé en 2015 pour la période 2015-2018.

Depuis l’interdiction des néonicotinoïdes, le gouvernement est allé de renoncement en renoncement. Sur le plan du nucléaire, les objectifs fixés ont finalement été abandonnés, et seule la centrale de Fessenheim sera fermée. Les promesses d’une rénovation énergétique massive des bâtiments n’ont pas été tenues. Sur le terrain de l’agriculture, l’interdiction du glyphosate a été repoussée, de même que l’interdiction de certains ustensiles en plastique dans la Loi Pacte que le gouvernement a cherché à limiter par peur de la concurrence

En parallèle, le gouvernement n’a pas hésité à soutenir des projets particulièrement polluants, tels que la Montagne d’or, une gigantesque mine aurifère à ciel ouvert en Guyane, ou encore EuropaCity, un projet pharaonique porté par Auchan sur des hectares de terres arables à proximité de Paris.
Enfin, lorsqu’il s’est agi de trouver des fonds pour financer la « transition écologique », c’est évidemment les travailleurs que le gouvernement a ciblé avec sa « taxe carbone », élément déclancheur de la profonde mobilisation des Gilets jaunes. Un choix inégalitaire en matière d’écologie qui résume bien le positionnement du gouvernement, qui préfère appauvrir les secteurs populaires – quitte à entretenir l’opposition artificielle entre intérêts des travailleurs et écologie – plutôt que de taxer les riches ou les entreprises.

Depuis le début du mandat, le gouvernement Macron est ainsi resté fidèle à sa réputation de gouvernement des riches. Son vernis progressiste s’est heurté très rapidement à la réalité des intérêts servis, celui des grandes multinationales qui ne souffrent aucune réglementation risquant de limiter leurs profits ou de les affaiblir face à la concurrence. Ainsi, Macron aura eu la vertu de rendre explicite la contradiction manifeste entre capitalisme et écologie.

Pascal Canfin : une caution écolo pour En Marche

A la lumière de la réalité du bilan du gouvernement, Pascal Canfin apparaît donc bien comme la caution écolo d’une liste qui a choisi de se verdir pour construire son profil « progressiste », prétendument en lutte contre les tendances réactionnaires incarnées en France par le RN. Une stratégie explicite depuis plusieurs mois et que Nathalie Loiseau n’a pas tardé à mettre en œuvre en expliquant au Figaro que « battre le Rassemblement national serait la première victoire ».

Si la liste d’En Marche apparaît pour le moment comme un melting-pot sans grande cohérence, emmené par une technocrate juppéiste, on veut bien croire que le gouvernement puisse décider de mettre l’accent sur l’écologie dans sa campagne. Alors que la mobilisation climatique a mobilisé plusieurs centaines de milliers de personnes dans les rues ces dernières semaines, le thème est d’autant plus porteur pour le gouvernement qu’il apparaît beaucoup moins clivant que d’autres sujets.

Pascal Canfin, interrogé sur le risque d’être une caution écologiste du gouvernement ; a ainsi expliqué au Monde que « si j’étais tout seul, oui, et je ne serais pas là. Si l’axe numéro un du projet n’était pas l’écologie, et que cela n’irriguait pas tout, alors je serais une caution. » ajoutant que « les personnalités au profil et aux compétences écologistes seront nombreuses à être en position éligible sur la liste ».

Si la campagne de LREM se centre sur la question environnementale pour mieux afficher un profil progressiste en mettant sous le tapis vert les questions qui fâchent, Pascal Canfin aura finalement peut-être eu raison… Ce n’est pas lui qui est la caution du gouvernement, mais l’écologie elle-même.

 
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