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La Izquierda Diario
29 de avril de 2019 Twitter Faceboock

Élection législative dans l’État espagnol
Que signifie le renforcement électoral des indépendantistes catalans ?
Sadek Basnacki

Les élections législatives dans l’État espagnol montrent la crise dans laquelle le pays est encré depuis plusieurs années. Elles confirment la crise du bipartisme avec les résultats du PP mais surtout elles voient l’entrée de l’extrême droite aux Cortès et un renforcement des indépendantistes catalans. Des indépendantistes qui pourraient même former une coalition avec le PSOE, Podemos et les indépendantistes basques.

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Crédit photo : Lluis Gene / AFP

Le taux de participation aux élections législatives anticipées dans l’État espagnol a été plus élevé que lors des dernières élections en 2016 avec 75,75 % de voix exprimées.

Le PP confirme son déclin avec un score historiquement bas avec seulement 66 députés. Le centre droit Ciudadanos a quant à lui confirmé sa montée avec 57 sièges. Le fait inquiétant est l’entrée de l’extrême droite avec Vox qui rentre aux Cortès avec 24 députés. Une première depuis la fin de la dictature franquiste, dans un pays où la droite traditionnelle avait réussi à contenir toutes les tendances de droite en son sein.

C’est une défaite pour la droite qui ne peut reprendre la main au PSOE qui obtient à lui seul 123 sièges. Insuffisant pour atteindre la majorité absolue. Le parti socialiste devra probablement faire des alliances. Podemos a déjà expliqué qu’ils sont prêts à former une coalition avec les sociaux-libéraux. Cela n’étant pas suffisant, le PSOE devra soit compter sur Cuidadanos, soit sur les nationalistes catalans et basques. Ils pourraient également décider de diriger sans majorité. C’est du moins ce qu’a laissé entendre José Luis Ábalos, Secrétaire à l’Organisation du Parti socialiste ouvrier espagnol, en affirmant que "l’ambition" du leader socialiste, Pedro Sánchez, a toujours été de gouverner en minorité.

L’Esquerra Republica de Catalunya (ERC) a obtenu 15 sièges et devient la première force de la Catalogne. C’est la première fois depuis des décennies que la formation républicaine remporte les élections législatives espagnoles dans les quatre provinces catalanes. L’ERC prend donc le leadership devant le parti de Carles Puigdemont, Junts per Catalunya (JxCat, centre-droit), qui n’a obtenu que 7 sièges.

Les indépendantistes catalans auront donc 22 sièges aux Cortès. Cependant 5 des ces élus ne pourront siéger puisqu’ils sont en prison en attente de leur procès pour tentative sécession. Oriol Junqueras de l’ERC, vice-président du gouvernement catalan, est le principal accusé du procès. Le parquet a requis une peine de 25 ans de prison contre lui.

Cette victoire de l’ERC peut s’expliquer par sa position plus d’ouverture avec le PSOE. JxCat a fait campagne en rejetant une alliance avec le PSOE tandis qu’Oriol Junqueras avait annoncé dès le début de la campagne qu’il se poserait en rempart contre la droite. De fait, son groupe ne s’opposerait pas à l’investiture d’un nouveau Premier ministre issu du parti socialiste. Des sources internes de JxCat expliquent à El Confidencial que « tout ce que JxCAT fait, est décidé par Waterloo [lieu d’exil de Puigdemont], personne d’ici ne décide quoi que ce soit et Carles Puigdemont, pour le moment, n’est en accord avec personne ». Puigdemont s’aligne davantage sur les thèses les plus radicales de la CUP, de la CDR ou de l’Assemblée nationale catalane (ANC), qui préconise le blocage systématique du Congrès et le boycott de toute institution espagnole.

Alors que les Catalans ont démontré qu’ils souhaitaient exercer leur droit à l’autodétermination, on pourrait trouver étrange de voter majoritairement en faveur d’un parti prêt à donner son aval à un gouvernement socialiste qui ne reconnaît pas le droit à l’autodétermination.

Mais cela serait ne pas prendre en compte ce nouveau phénomène politique morbide qu’est VOX. On l’a vu, Cuidadanos est prêt à diriger l’Andalousie avec ce parti ultraréactionnaire. Alors, pourquoi PP, Ciudadanos et VOX ne s’entendraient-ils pas pour gouverner l’ensemble de l’État espagnol ? C’est cette pression à un gouvernement réactionnaire allié à des ultra nationalistes espagnolistes qui a sans doute poussé les Catalans à donner leurs votes à l’ERC.

Le parti indépendantiste doit néanmoins jongler comme il peut afin de ne pas se mettre à dos sa base. Ainsi, le journal El Confidencial cite une source au sein de l’ERC : « Notre priorité est d’empêcher les socialistes de s’abandonner dans les bras de cette force [Cuidadanos NDLA] qui marche vers l’extrême droite et qui peut rentrer au gouvernement par notre omission. Chacun est responsable de ses actes par action ou par omission. Et dans ce cas, nous assumons que nous n’en serons pas responsables par omission. […] l’investiture ne peut pas être laissée à la droite ». De l’autre côté Junqueras de sa prison a déclaré « nous devons être forts et obliger le PSOE à respecter la Catalogne ». C’est à dire acquérir une position forte pour avoir la supériorité morale en soutenant le PSOE et ainsi être en position d’exiger des concessions à Madrid.

Un soutien de l’ERC à Pedro Sanchez n’est pas exempt de contradictions pour les sociaux-libéraux non plus. Ce parti qui s’est aligné derrière le roi et l’unité de l’Espagne contre le droit à l’auto-détermination, en s’appuyant sur le soutien de la formation catalane pourrait renforcer l’opposition ultra-nationaliste mais aussi décevoir une partie de sa base opposée à l’indépendance catalane.

Si les Catalans ont voté pour l’ERC plus conciliant avec le PSOE, il faut voir que dans l’ensemble c’est un vote massif pour l’indépendantisme qui a primé. Tout comme au Pays-Basque où le PNV a augmenté de 1 à 6 ses députés. Podem qui a refusé d’appeler à la mobilisation du peuple catalan, qui a de fait légitimé le procès fait aux indépendantistes et s’est allié au PSOE l’a payé cher. Ils ont vu leur nombre de député diviser en deux, passant de 14 députés en 2016 à 7 ce week-end.

Cependant il ne s’agit pas d’une carte blanche que le peuple catalan a donnée à l’ERC. C’est un vote largement guidé par la peur de la monté de Vox et les forces de droite qui pourraient rendre encore pire la situation vis-à-vis de la Catalogne. La crise politique de l’État espagnol ne s’est pas refermée au contraire. Cependant, les aspirations démocratiques et sociales des classes populaires restent prisonnières des politiciens de la « caste » et des capitalistes.

 
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