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La Izquierda Diario
29 de mai de 2019 Twitter Faceboock

Des milliers de victimes morts sous les armes françaises
Guerre au Yémen : les dockers de Marseille-Fos « ne chargeront aucune arme »
Gabriella Manouchki

Suite aux révélations de Disclose concernant l’imminente livraison par cargo d’armes françaises à l’Arabie Saoudite dans le but de poursuivre la guerre au Yémen, les dockers de Marseille-Fos s’engagent dans un communiqué à ne charger « aucune arme, aucune munition pour quelle guerre que ce soit ». Une prise de position inspirante pour lutter contre les politiques impérialistes discrètement menées par l’État français à l’étranger.

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photo : Disclose

La politique impérialiste opaque de la France au Yémen

En avril dernier, alors que le gouvernement affirmait encore qu’aucune arme française n’était utilisée dans la guerre au Yémen, le média indépendant Disclose avait révélé au contraire que des armes françaises allaient être livrées à l’Arabie Saoudite et aux Émirats arabes unis dans le cadre de ce conflit. Ces deux États, historiquement soutenus par la France et par les États-Unis, sont alliés au sein d’une coalition militaire contre les rebelles soutenus par l’Iran dans la guerre au Yémen, guerre qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts et ravagé le pays depuis 2015. On peut souligner ici que ces révélations avaient valu à trois journalistes de ce nouveau journal d’investigation d’être convoqués à la DGSI. D’après Disclose, dont les révélations s’appuient sur une fuite de documents confidentiels, la France aurait signé, en décembre 2018, dans la plus grande discrétion, un nouveau contrat d’exportation d’armes, fabriquées par l’entreprise française Nexter, avec l’Arabie Saoudite. Parmi ces armes, on trouve notamment le canon Caesar, suspecté de faire feu sur des zones habitées par des centaines de milliers de civils au Yémen. « Pas moins de 129 canons caesar devraient être expédiés vers le royaume saoudien d’ici à 2023 », selon Disclose.

Des révélations qui ont de quoi embarrasser le gouvernement au moment où, d’après l’ONU, le Yémen fait face à « l’une des plus graves crises humanitaires au monde ». En effet, 28 millions de Yéménites vivent toujours sous les bombardements et plus de 8 300 civils ont perdu la vie au cours des seules frappes aériennes de la coalition, dont 1 283 enfants d’après un recensement du Yemen data project. Dans un communiqué, le cabinet du premier ministre se contente alors de répondre que « la France est un partenaire responsable et fiable » et « entretient un dialogue constant avec ces partenaires pour répondre à leurs besoins de défense », affirmant en guise de justification du contrat de vente d’armes que « les armes françaises dont disposent les membres de la coalition sont placées pour l’essentiel en position défensive ». Pour la ministre des armées Florence Parly, il n’y a « pas de preuves » que les armes françaises tuent des civils au Yémen.

Le rôle des dockers contre la livraison d’armes

Étant donnée la position floue volontairement maintenue par le gouvernement quant à la vente d’armes françaises aux États qui font la guerre au Yémen, les syndicats de dockers alliés à un certain nombre d’associations et d’organisations politiques ne peuvent que se montrer vigilants vis-à-vis du chargement de cargos à destination de l’Arabie Saoudite.

Le 8 mai dernier, un rassemblement d’une centaine de personnes sur le port du Havre avait permis d’empêcher un cargo saoudien d’accoster et, de ce fait, de bloquer la livraison d’armes en Arabie Saoudite. Dès le lendemain, cette politique impérialiste dès lors révélée au grand jour était en toute impunité « assumée » par Macron au nom, bien sûr, de la "sacro-sainte" lutte contre le terrorisme.

Le lundi 27 mai, Disclose révèle qu’un nouveau chargement d’armes, plus précisément de munitions destinées à l’usage des canons Caesar, devrait avoir lieu le lendemain à Marseille. Plusieurs représentants politiques et associations régissent à cette annonce, à l’image d’Amnesty International appelant à bloquer le départ de ce « bateau de la honte ». Le syndicat CGT des dockers du Golfe de Fos publie alors un communiqué dans lequel il s’engage à ne charger aucune arme. Les dockers affirment : « Fidèles à notre histoire et nos valeurs de paix, votre syndicat combat toutes les guerres du globe, nous nous battons contre l’impérialisme, contre la déstabilisation de certains pays, contre le pillage des ressources premières, contre toutes ces guerres géopolitiques ». Contacté par téléphone, le secrétaire général CGT des dockers de Fos Laurent Pastor confirme : « Nous n’embarquerons jamais d’armes destinées à tuer des civils ». D’après lui, le syndicat fera toutes les vérifications possibles : « Nous avons demandé au consignataire et au fournisseur, des documents officiels qui attestent que nous chargerons du matériel civil, destiné aux civils, et en aucun cas du matériel militaire ».

Finalement, les munitions à destination de l’Arabie saoudite ne seront pas chargées au port de Marseille-Fos ce mardi 28 mai. D’après Disclose dans un dernier communiqué publié sur Facebook, les munitions ont été redirigées vers une destination inconnue, « du matériel uniquement civil sera donc embarqué demain matin ».

Le jour-même, la ministre des armées interpellée à l’Assemblée Nationale déclare que des vérifications sont en cours et qu’il n’y aurait rien d’étonnant à ce qu’elles confirment la livraison d’armes française à l’Arabie Saoudite étant donné le « partenariat » qui lie les deux pays. Que le gouvernement l’assume à demi-mots ou non, la France se rend complice des crimes de guerre perpétrés par l’Arabie Saoudite au Yémen en lui livrant des armes. Il s’agit là d’une politique impérialiste inscrite dans une longue tradition française tachée de sang pour le contrôle des ressources au Moyen-Orient, qui ne saurait être justifiée par l’argument dogmatique et stérile de la « lutte contre le terrorisme ». On ne peut alors que saluer le travail d’investigation de Disclose ainsi que la prise de position des dockers contre l’impérialisme. La force de frappe anti-guerre donne une idée de la capacité qu’aurait la classe ouvrière, si le mouvement s’étendait à une plus large échelle, sinon d’imposer la paix, mettre une véritable épine dans le pied aux marchandes de canons et aux désastres humanitaires qu’elle génère.

 
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