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La Izquierda Diario
20 de juin de 2019 Twitter Faceboock

Interview
Grèce. Syriza au pouvoir a contribué à discréditer l’ensemble de la gauche radicale et anticapitaliste
Philippe Alcoy
Paul Morao

A l’approche des élections générales en Grèce nous avons interviewé des membres de NAR, qui participe au front anticapitaliste Antarsya, sur la situation du pays, de la classe ouvrière et les défis de la gauche anticapitaliste.

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A l’approche des élections législatives en Grèce nous avons interviewé des membres de NAR (Nouveau Courant de Gauche pour la Libération Communiste), qui participe au front anticapitaliste Antarsya, sur la situation du pays, de la classe ouvrière et les défis de la gauche anticapitaliste.

Quatre ans, presque jour pour jour, après le tournant néolibéral de Syriza en Grèce, le pays s’apprête à célébrer des élections générales législatives anticipées. Révolution Permanente a interviewé Pavlos Antonopoulos et Yorgos Michailidis, membres de la direction de NAR, l’une des principales composantes du front anticapitaliste Antarsya.

Les désillusions créées par le tournant néolibéral de Syriza et la baisse dans le niveau de lutte de classes ont ouvert une situation très difficile pour l’intervention des forces anticapitalistes. A cela il faut ajouter le discrédit qu’un gouvernement faussement libellé de « gauche radicale » a pu jeter sur l’ensemble des courants se revendiquant de la « gauche », y compris les courants anticapitalistes qui se sont opposés à Syriza et sa politique dès le début. En ce sens, il nous semble important pour les travailleurs et jeunes en France de présenter le point de vue d’une organisation anticapitaliste grecque.

RP : Les récentes élections européennes et locales ont signifié un important revers pour Syriza. Comment vous voyez la situation actuelle en Grèce et quelles sont vos perspectives pour les élections générales législatives du 7 juillet prochain ?

Il ne fait aucun doute que Syriza a essuyé une grande défaite lors des dernières élections. En effet, la seule raison pour laquelle le résultat de Syriza n’a pas été encore plus bas a été la peur d’une grande partie de la société vis-à-vis du parti de droite, Nouvelle Démocratie (ND), et son agenda réactionnaire. La Grèce traverse une douloureuse période d’austérité et de restructuration néolibérale depuis dix ans maintenant. Il s’agit d’une attaque permanente contre les acquis que le peuple a obtenu dans le passé à travers l’activité et les luttes du mouvement ouvrier et des partis d’avant-garde. Cette attaque ne peut pas être arrêtée avec les structures existantes, avec les outils et les méthodes habituelles, même si le peuple a lutté courageusement pendant des années. Plusieurs gouvernements se sont succédés tout au long de ces années de crise, mais aucun n’est allé au-delà du cadre imposé par le FMI et l’Union Européenne.

L’application de cette politique, qui fait aussi appel au capital grec, est le principal facteur qui explique la rapide décadence de tous les pouvoirs politiques qui ont gouverné la Grèce depuis 2008. Le peuple a été déçu par les partis traditionnels de la droite ou de la gauche social-démocrate mais aussi, comme ces élections l’ont démontré, par les nouveaux partis d’extrême-droite qui ont surgi durant la période de crise économique. Cependant, ce que le gouvernement de Syriza a apporté c’est premièrement la perte de l’avantage moral de la gauche en Grèce, qui n’avait jamais gouverné auparavant et qui semblait à l’écart des affaires de corruption et des stratégies anti-populaires, et deuxièmement l’abaissement des attentes populaires.

Par conséquent, aujourd’hui, alors que l’on approche de la date des élections nationales, nous notons que les gens votent par mécontentement ou par peur, mais sans aucune perspective réelle de changement. Et ceci est une des plus affreuses « réalisations » de ce premier gouvernement de gauche en Grèce…

De notre côté, à travers notre participation dans la coalition anticapitaliste Antarsya, nous essayons de briser ce climat de soumission et de renoncement en affirmant que quel que soit le nouveau gouvernement, c’est seulement la réaction du peuple et la réémergence d’une politique de classe et de la lutte de classes qui peut améliorer notre situation.

RP : Sous le gouvernement de Syriza, la Grèce a connu une montée du nationalisme avec, notamment, des manifestations réactionnaires contre l’accord sur le nom de la Macédoine, et la montée d’un nouveau mouvement d’extrême-droite lors des élections. Comment pouvez-vous expliquer ce phénomène ? Quelles sont ses perspectives ?

Pour nous ce n’est pas surprenant que la politique de Syriza ait fait monter le nationalisme et le populisme. Le peuple grec, notamment dans le nord du pays, a subi un lavage de cerveau systématique par l’Etat et les institutions depuis le début de la Guerre Froide. Ce lavage de cerveau est revenu en force au début des années 1990, et cela que ce soit sous les gouvernements de droite ou sous ceux de la social-démocratie. Ainsi, le terrain avait déjà été préparé et cela a été relativement facile pour l’extrême-droite d’en tirer profit ou, pour le dire d’une autre façon, de surfer sur la vague. Cependant, cela n’est qu’une partie du tableau.

En effet, les principaux objectifs du gouvernement de Syriza, au moins en ce qui concerne sa politique étrangère, se sont en grande partie alignés derrière les priorités de la bourgeoisie et de l’Etat. Si vous entendez les ministres de Syriza défendre le « Traité de Prespa » sur les relations entre la Grèce et la Macédoine du Nord vous verrez que leur principal argument a été de dire qu’ils ne sont pas allés au-delà des « lignes rouges » établies au début des années 1990 par la politique de l’Etat grec. Au contraire, ils ont déclaré qu’ils ont fait en sorte de promouvoir les intérêts de l’Etat grec dans les Balkans en repoussant la Turquie de la région et en plaçant la Grèce dans une position de leader régional en accord avec les priorités de nos principaux alliés. Et cela est vrai. Ce n’est pas un hasard que pendant les discussions bilatérales sur la question du nom [de la Macédoine], Syriza ait bénéficié du soutien d’un grand nombre de dirigeants de la droite, d’universitaires conservateurs et d’importants hommes d’affaires en Grèce mais aussi des Etats-Unis et de l’UE.

Donc, de notre point de vue, cette année nous avons vu la montée d’un nationalisme à double visage. L’un, plus traditionnel, brutal, raciste, un nationalisme conservateur qui s’est exprimé dans les mobilisations nationalistes au sujet de la Macédoine. L’autre, un nationalisme masqué, cosmopolite qui a réussi à promouvoir les intérêts de l’Etat et du capital grec dans la région.

Cependant, les résultats des élections mais aussi certains sondages montrent que Syriza n’a pas perdu une partie importante de ses voix à cause de sa position vis-à-vis de la question de la Macédoine. Même dans le Nord du pays, où les citoyens sont de loin plus sensibles à cette question, c’est sa politique économique et le non respect de ses promesses qui ont rendu Syriza impopulaire. Aussi, la montée de l’extrême-droite est un phénomène qui trouve sa source non dans la politique nationale de Syriza mais dans son total alignement derrière l’UE et le FMI et sa capitulation par rapport à ses promesses et objectifs du début.

Malheureusement, la plupart de la gauche en Grèce s’est trouvée plus ou moins alignée derrière l’une ou l’autre forme de nationalisme : soit en dénonçant l’Accord de Prespa comme dicté par l’OTAN, mais sans mentionner les intérêts spécifiques et les avantages de l’Etat et du capital grec ou le droit de nos voisins de choisir le nom de leur Etat, de leur langue et de leur nation ; soit en soutenant l’Accord de Prespa comme un coup décisif contre le nationalisme grec tout en ignorant qu’il s’agissait d’un premier pas pour l’application de l’agenda impérialiste dans notre région et l’imposition des intérêts de l’Etat et du capital grecs sur nos voisins les plus faibles.

Ici aussi nous, le NAR et Antarsya, aux côtés d’autres forces d’extrême-gauche, avons essayé d’exprimer une ligne différente, qui, tout en s’opposant à l’intervention de l’OTAN et de l’UE dans la région, s’opposait également au nationalisme grec et aux plans de l’Etat et des capitalistes grecs (ou, pour utiliser la terminologie de Syriza : la « re-balkanisation » des affaires grecques après huit ans de crise). Bien sûr nous avons dénoncé les mobilisations nationalistes et avons participé aux manifestations antifascistes. En plus de cela, nous avons essayé de donner un exemple différent en organisant des débats publics sur la Macédoine, parfois avec la participation de camarades venus de la République de Macédoine.

RP : NAR fait partie d’Antarsya, un front anticapitaliste qui existe depuis 2009. Comment vous expliquez qu’Antarsya n’ait pas réussi à capitaliser la déception vis-à-vis de Syriza et ses politiques néolibérales ? Quelle est la situation à l’intérieur d’Antarsya et dans la gauche anticapitaliste en Grèce ?

Syriza est passé de 3% de voix à 36% en trois ans, en se présentant comme une force de la gauche radicale avec un programme contre les mémorandums, en promettant d’appliquer des mesures pour soulager le peuple face à des mesures d’austérité permanentes et face au chômage. Syriza apparaissait aussi comme une force pouvant défier la Troïka et en profitant de leur présence au parlement, ils ont gagné la majorité dans les élections parlementaires de 2015 (une différence importante avec Antarsya qui a très peu de chances de s’adresser aux larges masses malgré le fait de participer à chaque lutte sociale ou ouvrière).

Une fois au gouvernement, Syriza a appliqué toutes les politiques qui dérivaient des mémorandums et en a signé un troisième au nom de la gauche radicale. Ils sont passés outre le résultat du référendum [de juillet 2015] et ont passé un accord avec l’UE et le FMI en appliquant des coupures budgétaires encore une fois sur les retraites et salaires, notamment parmi les jeunes. La déception du peuple vis-à-vis de la politique néolibérale de Syriza a laissé son empreinte sur toute la gauche et a ainsi renforcé la désillusion et le conservatisme.

Un autre point central est l’arrêt du mouvement ouvrier qui s’était développé jusqu’à l’arrivée de Syriza au pouvoir. Tout d’abord, les syndicalistes de Syriza mais aussi ceux du Parti Communiste (KKE) ont montré une grande réticence pour construire un mouvement ouvrier et populaire par en bas tant que Syriza était au pouvoir. C’était le « gouvernement de gauche » qui allait résoudre tous les problèmes et il ne devait pas être perturbé. Cela a amené à une paralysie du mouvement ouvrier et des mouvements sociaux.

En ce qui concerne la situation à l’intérieur d’Antarsya, malheureusement elle n’est pas bonne. Les tentatives d’intervenir et de changer la situation dans les difficiles conditions actuelles ont conduit à offrir des réponses différentes. Cela est dû en partie aux différentes histoires des organisations qui composent Antarsya mais aussi aux cultures qu’elles ont développées pendant la période précédente. Des questions centrales concernant notre politique de front restent ouvertes, même si le programme d’Antarsya a été voté par 90% des délégués lors de notre conférence nationale l’année dernière. Juste après cela, de nouvelles approches et tactiques ont commencé à être testées par des partis de l’intérieur de la coalition et cela malgré le fait qu’elles aillent à l’encontre de nos décisions et notre programme. Cependant, Antarsya a décidé de participer aux élections parlementaires du 7 juillet prochain car nous considérons que la présence d’une liste du front anticapitaliste est d’une grande importance.

RP : Quelles relations entretenez-vous avec l’ancienne plateforme de gauche de Syriza, désormais Unité Populaire ? Quelle est sa politique dans la situation actuelle ?

L’ancienne plateforme de gauche de Syriza a pris une bonne décision lorsqu’elle a quitté le parti et le gouvernement Syriza mais elle aurait dû partir avant, et pas deux mois après la trahison du référendum par le gouvernement de Tsipras. Malgré tout, ce qu’il est important de noter c’est qu’ils ne sont pas allés au bout de cette rupture avec Syriza.

Même si l’ancienne Plateforme de gauche a uni ses forces à d’autres organisations anticapitalistes et communistes, sa logique reste la même, à savoir la logique qui a mené à l’échec de Syriza. Quatre ans plus tard, ils n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur un programme clair pour faire face à l’Union Européenne et au système capitaliste. Pour l’essentiel, leur bilan consiste à affirmer que le combat que menait Syriza était juste mais a été trahi par certaines personnes. Ils ne croient pas qu’il en aurait été de même pour tout autre projet réformiste ou social-démocrate qui essaie de changer les choses sans toucher au cœur du problème que sont l’UE, l’Etat et les rapports de production. Ils continuent d’entretenir le mythe de la possibilité d’un changement par la mise en place d’un bon gouvernement, vraiment à gauche, qui réussirait à répondre aux intérêts nationaux par une politique étrangère plurielle avec des partenaires divers. En même temps ils reproduisent toujours les mêmes méthodes de travail désuètes dans le mouvement ouvrier, les conseils municipaux, etc.

Selon eux, il faut aujourd’hui construire une gauche large à partir d’un mouvement patriotique et démocratique, et non un pôle anticapitaliste comme nous le défendons. En outre, l’année dernière Unité Populaire a eu une position très floue à l’égard les manifestations et les discours nationalistes [autour de l’opposition à l’accord sur la Macédoine]. Pour être plus précis, l’ancienne Plateforme de gauche a salué les participants à ces rassemblements, et certains de ses membres ont même pris part à ces évènements et largement repris les principaux concepts nationalistes sur leur site internet : le nom de « Macédoine » appartient à la Grèce, il n’y pas de nation Macédonienne, pas de langue macédonienne, pas de minorité ethnique macédonienne en Grèce, tout en ne voyant dans cette question que de l’irrédentisme Macédonien contre la Grèce.

Pour nous, il était clair qu’après tout cela il n’y avait pas de place pour un rapprochement avec l’Unité Populaire, même si une partie de ses forces à rejoint Antarsya dans son action contre les nationalistes. Après son importante défaite aux élections européennes, Unité Populaire a conservé une politique ambiguë. D’un côté ils cherchent à coopérer avec Antarsya mais, dans le même temps, ils vont chercher du côté de ce qu’on appelle les forces patriotiques qui n’ont pas de positions claires sur différents problèmes sociaux et maintiennent des positions nationalistes sur la question macédonienne et l’antagonisme gréco-turc.

RP : L’ancien ministre des finances d’Alexis Tsipras : Yannis Varoufakis a repris sa carrière politique et son parti a eu un score relativement bon aux dernières élections. Certaines personnes de la gauche modérée et même radicale en Grèce et en Europe tendent à voir Varoufakis comme un « résistant » du tournant néolibéral du gouvernement Syriza. Qui est Varoufakis et qu’a-t-il réellement fait durant son mandat de ministre et de négociateur principal avec la Troïka ?

Yanis Varoufakis se présente comme un européiste radical et présente son mouvement : DiEM25, comme le front patriotique des européistes « désobéissants raisonnables ». Ce qui est central dans sa position c’est qu’il considère que s’il met une pression sur l’Europe par une « désobéissance raisonnable » à ses directives, il mènera l’Europe vers un chemin différent, répondant aux aspirations des masses populaires. En ce sens, il prétend qu’il est prêt à risquer une possible sortie de l’espace Schengen et de la devise européenne. Il a présenté un programme composé de sept mesures majeures pour la politique économique qui est opposé à l’actuelle politique suivie par l’Europe. Son projet est de construire un front de tous les européens sur cette base.

Cependant, l’idée d’une « version honnête de Syriza » sonne comme une blague en Grèce. L’expérience de Syriza, comme nous l’avons décrite plus haut, ressemble de très près aux alternatives actuelles des programmes de gauche en Europe, comme ceux de Corbyn et Mélenchon ou celui de Sanders aux Etats-Unis. De notre point de vue, nous avons besoin d’être clairs là-dessus : la gauche du XXIème siècle, et en particulier dans les pays centraux du capitalisme mondialisé actuel, ne peut être construite à l’intérieur des vieilles organisations réformistes qui ont toujours servi à canaliser la colère des travailleurs (comme le Parti Démocrate aux Etats-Unis et le Labour en Grande-Bretagne), ni en imitant leur projet. Il s’agit de se confronter à leurs politiques et à leurs programmes, pour leur disputer les travailleurs radicaux qui pourraient les suivre.

Dans ce cadre, la première priorité devrait être l’autonomie et l’indépendance de la gauche anticapitaliste afin d’être capable de diffuser largement le discours anti-UE, anti-système et anti-capitaliste. Ainsi, Varoufakis se présente, après Tsipras, comme le nouveau messie qui aurait la recette du succès entre ses mains. Il y a comme un goût de déjà-vu. Pour les forces de gauche qui ne souhaitent pas, ou sont incapables, de construire un mouvement populaire et un nouveau parti des travailleurs ; mais aussi pour les masses qui cherchent encore un moyen de sortir facilement du capitalisme totalitaire dans lequel nous vivons, par une révolution sans effort, Varoufakis est une nouvelle carte à jouer. Mais pas pour nous. Nous le voyons comme une nouvelle recette pour l’échec, un autre messie qui décevra ceux qui croient encore en la gauche.

RP : Pour les élections législatives prochaines, une victoire des conservateurs du parti Nouvelle Démocratie est fort possible, quelles pourraient être les conséquences du retour de Syriza à l’opposition, politiquement et pour la lutte des classes ?

Pendant son mandat Syriza a joué un rôle décisif, en coopération avec le parti Nouvelle Démocratie qui était dans l’opposition, dans la destruction du mouvement ouvrier qui s’était développé dans la précédente période. Avec un usage judicieux de la bureaucratie syndicale, le gouvernement a réussi à empêcher le mouvement ouvrier de continuer la lutte des années 2010-2014. Durant les quatre dernières années, il a entretenu la déception et le désespoir des masses travailleuses et ainsi pu voter toutes les réformes réactionnaires et néolibérales du troisième mémorandum ainsi que les mesures contre le droit à la sécurité sociale sans provoquer une réaction forte d’en bas.

Désormais, la volonté des cadres du pouvoir est de reconstituer un système d’alternance où les deux pôles (ND et Syriza, peu importe qui gouverne et qui est dans l’opposition) se mettront d’accord, en substance, sur les politiques fondamentales qui seront suivies tout en détruisant la résistance du peuple. C’est ici que la gauche anticapitaliste et communiste, et plus particulièrement Antarsya, doit jouer un rôle décisif. Nous devons aller de l’avant et commencer à reconstruire, presque à partir de zéro. Nous devons contribuer à la réorganisation du mouvement populaire, en brisant les illusions réformistes et électoralistes qui ont prévalu jusqu’ici à gauche. Notre première priorité doit être l’unité de la classe ouvrière et de l’ensemble des classes populaires et leur ralliement autour d’une logique et d’un programme anticapitaliste. Nous estimons que Syriza ne jouera pas un rôle favorable dans cette perspective, étant donné qu’il s’agit d’une force déshonorée, qui n’est plus respectée par l’avant-garde de la classe ouvrière.

RP : Quels seront les principaux défis du NAR dans la période qui vient ? Quelles sont vos perspectives au sein d’Antarsya ?

Si on regarde de près les derniers évènements, Antarsya doit jouer un rôle décisif et d’avant-garde. Ce front doit se tourner vers le pôle anticapitaliste qui attirera les gens, étant donné que toutes les autres possibilités pour une politique alternative ont été détruites par l’échec de Syriza.

Pour y arriver, nous devons dépasser certains éléments du passé et élargir notre front pour inclure les nouveaux éléments et militants internationalistes, anticapitalistes et communistes de la gauche. Nous avons besoin de tracer la route de la rupture et de la libération de notre pays de l’Union Européenne, mais avec une vision internationaliste. De la même façon, nous devons construire un fort mouvement antimilitariste et anti-impérialiste dans le but de pousser le désengagement de la Grèce de l’Otan et faire évoluer nos relations avec les pays voisins afin de faire gagner la paix et la solidarité dans la région et de créer une coordination des travailleurs dans les Balkans.

En outre, Antarsya doit continuer à se lier à la cause antifasciste, pour faire obstacle à Aube Doré et au danger fasciste qui est le résultat des politiques réactionnaires des partis bourgeois et des institutions internationales. L’absence d’un front révolutionnaire, qui incarnerait, à travers son activité et son programme, une politique différente, doit être comblée le plus vite possible, étant donné que c’est le seul moyen d’empêcher le virage à droite que l’on peut observer en Grèce et dans toute l’Europe.

Aujourd’hui, le moment est venu pour Antarsya. Ce front anticapitaliste doit réussir à attirer tous les courants politiques, les organisations et même les militants indépendants de gauche. Il y a des milliers de militants qui comprennent la nécessité de créer une alternative anticapitaliste. Mais Antarsya doit aussi améliorer son fonctionnement démocratique, c’est le seul moyen de proposer une autre voie, qui ne rejoue pas les anciens modes d’organisation des masses. L’avant-garde de notre société est à la recherche d’une organisation qui fonctionne de façon ouverte et démocratique, et à laquelle elle pourra contribuer de manière essentielle. Voilà un autre défi pour Antarsya.

RP : Comment concevez vous l’articulation entre votre programme communiste et la politique à l’intérieur d’Antarsya ?

Le NAR et NKA [NdT : l’organisation de jeunesse du NAR] contribueront aux tâches mentionnées plus haut avec tous leurs alliés. Or, nous pensons que l’ouverture de la discussion pour un programme et un parti communiste contemporain jouera un rôle décisif pour la refondation d’Antarsya et de la gauche anticapitaliste en Grèce. Cette nécessité dérive de notre expérience d’une décennie de fortes luttes sociales et politiques. Alors qu’il y avait assez de conflits dans les rues, dans les entreprises, etc.lI manquait une proposition stratégique nouvelle contre le mémorandum et la politique du capital. Nous avons également senti l’absence d’une organisation qui serait, de même que le communisme, un outil matériel et subversif entre les mains des masses. Les nombreuses élections n’ont pas permis au NAR de dérouler toutes les mesures nécessaires que nous avons édictées dans notre Conférence Programmatique de décembre 2018. Après les élections, alors que la discussion sur le futur de la gauche anticapitaliste devrait devenir brûlante, nous aspirons à intervenir dans ce sens. Dans cette perspective, votre visite au festival Anaireseis cette année était également fructueuse et constructive.

Propos recueillis par Pablo Morao et Philippe Alcoy
Traduction : Philippe Alcoy et Nora Pardi
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