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La Izquierda Diario
24 de juillet de 2019 Twitter Faceboock

Cherchez l’erreur
Dîners privés, dressing à 17 000 euros… De Rugy « blanchi », vraiment ?
Iris Serant

Mardi, l’assemblée nationale remettait son rapport d’enquête sur l’affaire de Rugy, ne jugeant qu’il n’y avait pas d’irrégularités, à part, peut-être, 3 dîners jugés particulièrement excessifs. De Rugy s’est exprimé dans la foulée en « homme blanchi ». Dans le même temps, Mediapart révélait de nouvelles dépenses exorbitantes…

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Une douzaine de dîners organisés dans le faste avec le cercle amical ou « de travail » selon les versions, 64 523 euros de travaux de rénovation dans leur appartement, François De Rugy a frappé fort en termes d’utilisation de l’argent public. Le ministre démissionné a eu droit à une enquête parlementaire. Le verdict de l’Assemblée nationale rendu ce mardi ne pointe cependant aucune irrégularité, attestant que sur 12 repas, 9 étaient bien liés à sa fonction, les 3 autres – dont ceux de Noël et de la Saint-Valentin – étant reconnu comme dépassant un peu les frontières de l’enveloppe ministérielle.

Promettant de rembourser les repas reconnus litigieux par ses pairs de l’Assemblée, De Rugy avait droit à son 20h sur France 2 ce mardi pour s’expliquer et tenter de se redorer le blason. « Je me présente devant vous ce soir en homme blanchi, blanchi de toutes les accusations qui ont été portées contre moi. » a-t-il commencé. Au même moment, Mediapart – que De Rugy s’évertue à fustiger – sortait un nouveau dossier démontrant que toutes ces dépenses n’avaient rien de « professionnel ».

Le placard à 17 000 euros et les dîners de luxe entre copains bien avérés

L’enquête réalisée par le secrétariat général du gouvernement (SGG) confirme le montant des travaux de réaménagement de l’appartement, s’élevant à 64 523 euros dont 17 000 euros pour un dressing grand luxe ainsi que 16 261 euros pour la peinture des moulures – cher le « rechampissage ». Ce que souligne l’enquête de Mediapart à ce sujet, photos à l’appui, c’est aussi que l’état réel du logement avant travaux n’avait rien à voir avec la « vétusté » que De Rugy avait décrite. Cet argent provient d’une « dotation de frais de représentation », sur le même modèle que l’indemnité de frais de mandat des députés, mais celle-ci va jusqu’à 150 000 euros par an pour chaque ministre.

En ce qui concerne les repas, au nombre de 12, 9 d’entre eux ont donc été considérés comme normaux, ne pouvant être « qualifiés de privés » et « les prestations culinaires étaient conformes aux normes habituelles » selon le rapport de la commission parlementaire. Il faudra revenir plus tard sur ces « normes habituelles » qui pour les ministres signifient homards et grands crus à plusieurs centaines d’euros la bouteille. Ce qui rend ces 9 repas « non-privés » c’est que les époux De Rugy mettent en avant le fait qu’il s’agissait de « soirées thématiques » autour de la culture et des médias, du numérique ou de l’université. Des « thèmes » qui, selon un second article de Mediapart recueillant plusieurs témoignages des convives, n’étaient pas si présents. Les invités quant à eux n’avaient pas besoin d’être spécialistes en la matière, mais seulement de connaître Séverine De Rugy pour se faire inviter à la table ministérielle. Enfin, plusieurs selfies montrent que le « cadre de travail » était bien festif. Et c’est sans parler des dîners professionnels… pour Noël ou la Saint-Valentin.

Et De Rugy se permet une plainte pour diffamation

C’est avec ce train de vie là, et les rapports couvrant complètement ces dépenses exorbitantes de l’argent public de la part de l’Assemblée nationale et du secrétariat général du gouvernement, que De Rugy dit haut et fort qu’il est « blanchi ». Loin d’en rester là, il a déposé une plainte contre Mediapart pour diffamation. Qualifiant le média de « journalisme de démolition », celui-ci a par la suite déclaré : « Oui au journalisme d’investigation, non au journalisme de diffamation […] La république de la délation, la république de la diffamation, ce n’est pas la République ». Un discours bien rôdé contre les médias lorsque des affaires concernant des hommes d’État éclatent, mais qui est à prendre d’autant plus au sérieux aujourd’hui, après que de nombreux médias ou journalistes d’investigation ont subi des enquêtes (les journalistes du Monde après l’affaire Benalla), perquisitions (notamment Mediapart), quand ce n’était pas directement la répression violente lors des manifestations Gilets jaunes.

Son avocat, Pierre-Olivier Sur, déclarait à RTL : « D’un point de vue juridique, rien ne lui est reproché. Aucune règle n’a été enfreinte. C’est un homme droit, honnête, et intègre. » et ajoutait – en faisant référence aux rapports du gouvernement et de l’Assemblée nationale – que « personne ne peut venir vous dire que ce n’est pas une enquête qui aurait été faite en indépendance et en intégrité ». Et on parle bien d’une enquête réalisée par les pairs de De Rugy, des personnes recevant les mêmes privilèges et passes-droits et protégeant les mêmes intérêts que ce dernier.

S’il n’y a aucune « irrégularité », c’est qu’il y a bien un problème !

Le fait que les enquêtes du gouvernement et de l’Assemblée signalent qu’il n’y a finalement aucune irrégularité dans les dépenses du couple De Rugy n’est qu’une nouvelle démonstration du problème de fond : celui de cette caste politicienne s’accordant des salaires, IRFM et autres frais de représentation se comptant en dizaines de milliers d’euros pour se permettre un mode de vie à des années-lumière des classes travailleuses et populaires, et se finançant sur le dos de ces dernières. Comme nous l’écrivions précédemment, c’est bien avec toute cette caste politicienne et ses privilèges qu’il faut en finir !

La démission de De Rugy n’a pas tardé à démontrer à quel point le gouvernement marche sur des œufs et a tenté d’éteindre au plus vite le scandale qui était en train d’éclater. Édouard Philippe s’est empressé de publier une nouvelle circulaire ce mardi sur « l’exemplarité des ministres » – notamment pour éviter que tout le gouvernement se prenne de passion pour le « rechampissage » de moulures. Les travaux dépassant les 20 000 euros (!) devront être validé par le Secrétariat général du gouvernement. Voilà de beaux « principes déontologiques d’exemplarité et de sobriété ». Les ministres seront heureusement encore assurés de pouvoir travailler dans de biens beaux bureaux lorsqu’il s’agira de dévouer toute leur exemplarité et sobriété à la précarisation des travailleurs et de la jeunesse.

Image : Nature morte au homard, Jan Fijt, Musée Boymans-Van Beuningen

 
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