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La Izquierda Diario
7 de août de 2019 Twitter Faceboock

En défense du service public
Les pompiers du Val d’Oise sévèrement sanctionnés pour avoir porté un brassard « en grève »
Frédéric Mizumschi

Alors que le mouvement des sapeurs-pompiers revendique plus de moyens et d’effectifs ainsi que la revalorisation de leur prime de risque, dans le Val d’Oise, la direction des pompiers sanctionne ceux qui portent des brassards « gréviste ».

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Crédit photo : Thibault Chaffotte

7 syndicats de pompiers ont appelé à un mouvement national de grève depuis le 26 juin. Ce mouvement doit durer jusqu’au 31 août. Les grévistes exigent de meilleures conditions de travail. Celles-ci ont été dégradées à cause du manque de matériel et de personnel formé. Ils réclament également la revalorisation de la « prime de feu ».

Comme les urgentistes, les pompiers ont un droit de grève limité en tant que chargés de service public et doivent respecter un minimum de temps de garde, même dans un contexte de sous effectifs. Les pompiers continuent donc d’assurer leur travail et trouvent des moyens pour maintenir la communication sur leurs revendications, comme porter un brassard « gréviste » ou poser des banderoles sur les véhicules et les bâtiments.

Mais la direction des pompiers du Val d’Oise a estimé que ces gestes étaient déjà de trop. À la date du 4 août, elle avait lancé pas moins de vingt blâmes et deux demandes d’exclusion d’un jour, sur un total de 150 pompiers professionnels en grève, soit une répression menée contre plus de 15 % des grévistes – et ce seulement pour avoir exprimé des revendications.

Exemple d’une lettre reçue par un gréviste du Val d’Oise.

Comme le précise Peter Gurruchaga, secrétaire général de la CGT du SDIS (Service Départemental d’Incendie et de Secours), la sanction a été lancée non pas pour port de brassard, mais pour « pour refus d’obéissance suite aux ordres de retirer ce brassard ». « Tout le monde est choqué de ces méthodes pour casser la grève » souligne un pompier. La direction censure leur grève, sous prétexte de « devoir de réserve, un devoir de neutralité », soi-disant car « écrire sur des banderoles : population en danger, c’est manquer de respect à la population ».

Mais ce qui est un « manque de respect » à la population c’est surtout le désengagement de l’État qui a provoqué le manque d’effectifs et le manque de moyens, par le biais d’une baisse croissante des dotations budgétaires envers les collectivités. Celles-ci n’ont plus les moyens à échelle départementale de financer les SDIS, ce qui conduit à des situations comme en Côte d’Or, où les pompiers assurent des gardes de 10 à 12h, non rémunérées de minuit à 7h du matin, et se retrouvent face à une direction qui peu disposée à prendre en compte leurs revendications.

Faire taire ceux qui revendiquent du matériel et des effectifs n’a rien de neutre : c’est casser une grève au profit de ces politiques, qui s’appliquent qui plus est dans un secteur vital et à risque. Alors que la CGT évalue ainsi un manque de plus de 160 agents professionnels dans le Val d’Oise, passer outre ces revendications ne peut conduire qu’à l’augmentation des drames humains. À l’inverse des zones à niveau de vie élevé, où les habitants aisés bénéficient non seulement de structures opérationnelles mais peuvent si besoin se payer des services d’assistance supplémentaires ; ce sont principalement les classes les plus précaires, qui n’ont ni les conditions sociales ni les moyens nécessaires, qui en subissent en premier les préjudices.

Photo Thibault Chaffotte

Les pompiers, roues de secours

Alors qu’en moins de quinze ans, le secours des victimes a concerné plus de deux millions de personnes supplémentaires, les syndicats pointent des interventions qui se complexifient et craignent également un recours toujours plus accru à des personnels contractuels et sans formation. Et pour cause, les effectifs sont restés à peu près constants avec une moyenne de 40 000 pompiers professionnels et 195 000 pompiers volontaires. Les gouvernements successifs, qui se font pour tâche de réduire l’entretien des services utiles à la population, se sont ainsi désinvestis du secteur public en se reposant sur du personnel bénévole, disponible pour exercer gratuitement en parallèle de leur emploi principal, mais non qualifié pour les interventions à risque.

Et non seulement les pompiers sont confrontés à la demande croissante de la population, mais ils sont aussi de plus en plus réquisitionnés par d’autres services comme le SAMU afin de pallier aux carences d’ambulances privées, et vont même jusqu’à suppléer tant bien que mal là où les médecins ne sont plus, c’est-à-dire dans les zones rurales et en particulier dans les plus pauvres et périphériques. Ces sollicitations, qui peuvent gravement entraver les secours en cas d’intervention simultanée plus urgente, montrent que la situation des pompiers est liée aux autres crises qui touchent le reste des structures sociales et médicales et qui sont le fait des politiques libérales qui favorisent la rentabilité des marchés privés et isolent les classes précaires.

Une grande porte a été enfoncée dans les services publics depuis l’offensive de Sarkozy qui a acté le non-remplacement d’un poste de fonctionnaire sur deux, ce que les choix du gouvernement Macron viennent étendre avec la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires d’ici la fin du quinquennat. Dans la continuité, les grévistes dénoncent le projet de loi Dussopt dans la fonction publique, votée à l’assemblée nationale en mai dernier, et qui prévoit entres autres la suppression du régime spécial de retraite des pompiers avec le départ fixé à 64 ans au lieu de 57. Mais plus largement cette loi vise à diminuer le nombre de fonctionnaires et en terminer avec le statut de la fonction publique pour en transférer les secteurs vers le privé – santé et social compris.

La répression de la part de la direction des pompiers est donc bien l’expression d’une volonté politique d’assujettir le secteur à ces restructurations sans accorder le moindre centime, quand bien même il s’agit de ceux qui servent déjà de roue de secours aux manquements délétères de l’état. Les casernes maintiennent leur grève et les pompiers continuent d’organiser des actions symboliques pour se faire entendre :

 
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