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La Izquierda Diario
17 de septembre de 2015 Twitter Faceboock

Il y a dette et dette
Patrick Drahi, requin de la finance, poursuit sa conquête de l’empire du câble

Claire Manor

Après une croissance fulgurante en France, Benelux, Portugal, Afrique de l’Est, Israël, le patron du groupe français Altice, Patrick Drahi, poursuit son assaut en direction des Etats Unis. Il règle 17,7 milliards de dollars pour racheter Cablevision, quatrième câblo-opérateur américain. Cette nouvelle acquisition est financée pour partie par un nouvel endettement de 7,7 milliards qui vient s’ajouter à une dette déjà abyssale. Pourtant les financiers n’hésitent pas et le titre Altice bondit en bourse.

Ce qui prouve que les opérateurs financiers savent distinguer les dettes à faire payer aux populations comme en Grèce et les dettes des investisseurs qui parient sur des secteurs prometteurs.

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La construction méthodique d’un empire capitalistique

Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure des Télécom et après avoir travaillé cinq ans chez Philips, Patrick Drahi entreprend une carrière d’investisseur professionnel. Il fait fortune en France d’abord, et à l’étranger ensuite, en appliquant un technique particulière de gestiond’investissements avec effet de levier : s’endetter fortement pour acheter une entreprise cible, puis la restructurer pour accroître les profits financiers, et rembourser les emprunts par ponction sur sa propre trésorerie.

La méthode étant définie, il reste à choisir le bon secteur et à se déployer. Dès 2003, il mise tout sur le secteur du câble et détient, en l’espace de quatre ans, 99% des réseaux câblés en France. Le processus se poursuit ensuite en visant des proies de plus en plus importantes et de plus en plus étendues dans le monde.

Rien qu’en 2014 et 2015 il a réalisé pas moins de quatre grosses acquisitions - en dehors de celles d’un certain nombre de médias dont l’Express et Libération - pour une valeur totale de presque 50 milliards d’euros : SFR raflé au nez et à la barbe de Bouygues Télécom, puis Portugal Télécom, Suddenlink, et enfin Cablevision, 4ème opérateur américain, son dernier trophée. De quoi faire passer l’échec de sa tentative de rachat de Bouyges Télécom.

Outre les Etats-Unis, il a entrepris depuis 2011 de se déployer sur le territoire d’Israël, dont il est ressortissant, en déployant la fibre optique avec son câblo-opérateur Hot. Sans oublier l’importance économico-politique du secteur des médias, puisqu’il a décidé, en collaboration avec le conseiller en communication de De Villepin, alors premier ministre, de financer une chaîne d’information continue israélienne.

La planque des bénéfices dans les paradis fiscaux

Pour faire bonne mesure, Patrick Brahi, cumule les vices des capitalistes ; à son profil de boulimique de rachats, il ajoute celui de fraudeur fiscal contre lequel Arnaud Montebourg, alors ministre du redressement productif, est monté au créneau lorsque Vivendi a annoncé la mise en vente de sa filiale SFR. Deux candidats repreneurs étaient en présence, Bouygues et Altice dirigé par Patrick Brahi. Les préférences du gouvernement allant nettement à Bouygues, Montebourg a jugé opportun d’examiner la situation fiscale de Brahi. Il a déclaré sur Europe 1 : « Numericable a une holding au Luxembourg, son entreprise est cotée à la bourse d’Amsterdam, sa participation personnelle est à Guernesey dans un paradis fiscal de sa majesté la reine d’Angleterre, et lui-même est résident suisse ! Il va falloir que Monsieur Drahi rapatrie l’ensemble de ses possessions et biens à Paris. Nous avons des questions fiscales à lui poser ».

Bien que détenteur de 24,6 milliards, 3ème fortune en France, il dit, en réponse aux « questions » de Montebourg, ne plus être Franco-Israélien. D’après son avocat, la perte de la nationalité française lui serait définitivement acquise et il serait simplement israélien.

Une dette faramineuse qui ne semble pas inquiéter les financiers

L’opération de rachat de Cablevision va encore grossir la dette d’Altice qui, évaluée à environ 30 milliards d’euros au début de l’été passe à près de 40 milliards. Comment expliquer que malgré une telle dette la bourse lui fasse confiance. Deux raisons à cela : Altice bénéficie de taux d’intérêts bas et d’une grande tolérance des marchés vis-à-vis de l’endettement des câblo-opérateurs et surtout, Drahi est connu comme un « cost killer » impitoyable, capable de baisser drastiquement les charges pour dégager des bénéfices et rembourser les emprunts. On imagine bien que c’est largement sur le dos des salariés que ces réductions de charges se font.

A l’échelle des entreprises dans lesquelles il investit, l’insatiable Drahi pressure les travailleurs et fait régner une austérité qui relève des mêmes lois capitalistes que celles que la BCE et les investisseurs étrangers font peser sur les populations des pays endettés auxquelles leurs gouvernements font rendre gorge.

Les deux faces d’une même médaille

L’histoire de Drahi, bien que particulièrement spectaculaire, n’est finalement que l’histoire du capitalisme ordinaire. Sa boulimie sans limite d’acquisitions toujours plus fracassantes, sa volonté implacable de mettre en œuvre sa stratégie d’investissement miracle dénommée « LBO », la guerre impitoyable qu’il mène pour accumuler toujours plus de profits, en font un personnage remarqué, mais surtout envié par ses pairs qui souhaiteraient l’égaler ou le dépasser.

Face à ce capitalisme débridé, comment ne pas être encore plus révolté en voyant le sort que les puissances européennes dominantes font subir à la population grecque, chaque jour un peu plus étranglée et pillée pour alimenter la machine à profit des banques et des investisseurs.

 
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