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La Izquierda Diario
24 de octobre de 2019 Twitter Faceboock

« Cadeau » empoisonné
Les mesures « gilets jaunes » seront financées par la sécurité sociale
Inès Rossi

Les députés ont tranché dans la nuit de mardi à mercredi : le coût des mesures « gilets jaunes » de Macron sera à la charge de la sécurité sociale.

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Crédits photo : AFP Photo / Patrick Kovarik

Mesures « gilets jaunes » : donner d’une main et reprendre de l’autre

Fin 2018, le gouvernement Macron avait décidé, dans l’espoir d’apaiser la colère des gilets jaunes, de prendre une série de mesures dites d’urgence pour le pouvoir d’achat, dont l’annulation de la hausse de la Contribution Sociale Généralisée pour près de 4 millions de foyers de retraités, et l’exonération des charges sociales sur les heures supplémentaires.

Or ces décisions ont contrarié les plans du gouvernement, qui comptait sur la hausse de la CSG pour combler le trou de la sécu. Et selon la loi Veil de 1994, « toute mesure d’exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale relative à la sécurité sociale, donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l’Etat pendant toute la durée de son application ».

En clair, l’État se doit, normalement, de compenser dans le budget de la sécu le coût de ces deux mesures. Mais, dans la nuit de mardi à mercredi, l’Assemblée nationale a voté en faveur d’une dérogation à cette loi. La sécurité sociale devra donc prendre en charge le coût de ces mesures, soit près de trois milliards d’euros de dépenses en plus.

Le gouvernement se défend de vouloir faire couler la sécu : « Quand bien même nous aurions retiré cette non-compensation (du projet de loi), il n’y aurait pas eu la [résorption] du trou de la sécurité sociale », a déclaré Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics.

Le « trou » de la sécu : la faute aux gilets jaunes ?

Alors que le gouvernement fanfaronnait il y a moins d’un an en parlant de retour à l’équilibre du budget de la sécu, il l’aggrave aujourd’hui : la non-compensation des mesures « gilets jaunes » représente environ la moitié des cinq milliards de « trou » prévus. « Trou » qu’il s’agirait évidemment de combler à tout prix sur le dos des plus précaires, en s’attaquant toujours plus au système de protection sociale. Et dans la même logique, pour ces détracteurs de la sécurité sociale, quel meilleur discours que d’imputer aux gilets jaunes le déficit qui se creuse ?

En un clin d’oeil, le gouvernement fait donc peser la responsabilité du déficit de la sécu sur le mouvement des gilets jaunes. Et manifestement, le tour de passe-passe fonctionne : « Le trou de la sécu de retour après les gilets jaunes » titre par exemple le journal Le Figaro.

Et qui dit aggravation du trou de la sécu dit économies. La sécurité sociale comprend quatre branche en France. La branche maladie, localement cela correspond à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). La branche famille avec les Caisses d’allocations familiales (CAF). La branche recouvrement l’Urssaf et la branche vieillesse. Le gouvernement va donc directement taper dans ces branches pour faire des économies. On peut s’attendre à des baisses d’allocations et encore plus de contrôle pour faire baisser le nombre de bénéficiaire. Les mesures « gilets jaunes » impacteront sans doute l’ensemble des aide ce qui va peser lourd dans les portefeuilles.

Le déficit qui se creuse : une aubaine pour défendre la réforme des retraites

Autre avantage de la non-compensation pour le gouvernement : le déficit de la sécu est un argument en or pour défendre sa réforme des retraites. En effet, le rapport Delevoye prévoit le respect de la « règle d’or » qui va piloter le nouveau système en lui interdisant tout déficit, alors même que dans le cas actuel, le déficit est en partie créé de toutes pièces par le gouvernement !

Cette fameuse « règle d’or » indique que les comptes doivent être à l’équilibre tous les cinq ans. Pour cela, les paramètres s’ajusteront au fil de l’eau, comme l’âge du taux plein qui serait ajusté en fonction de l’espérance de vie ou encore la conjoncture économique, ou la part du PIB consacrée aux retraites.

Le déficit de la sécu aggravé par cette décision sert donc à justifier un contrôle strict et austéritaire sur les retraites ; or, à budget constant, le montant des pensions va donc mécaniquement subir une baisse tendancielle étant donné que la part des retraités va augmenter en proportion de la population totale.

Rappelons que, comparé aux 5 milliards de déficit de la sécu, la fraude aux cotisations, c’est-à-dire la fraude patronale, elle, s’élève à plus de 20 milliards d’euros…

La décision de non compensation a d’ailleurs fait débat au sein de la majorité elle-même : une poignée de députés LREM s’est prononcée contre, avant de se ranger et de voter la dérogation ; mais les dissensions se font de plus en plus forte du côté des partisans de Macron, dont la majorité est de moins en moins solide à l’approche des prochaines élections.

La sécurité sociale ne devrait en aucun cas avoir pour objectif de générer du bénéfice, contrairement à ce que cherchent à faire croire le gouvernement et ses alliés qui aimeraient bien voir disparaître ce système de solidarité. D’autant que le déficit de la sécurité sociale, ce fameux « trou » fantasmé, n’est pas causé par les plus précaires et les Gilets jaunes mais bien par les multiples cadeaux faits aux patrons, les réels assistés du gouvernement.

À l’approche de la grève du 5 décembre, qui pourrait être le fer de lance d’un mouvement de convergence, cette décision ne manquera pas de renforcer la colère sociale, que ce soit du côté des gilets jaunes, des secteurs de la santé en lutte ou des opposants à la réforme des retraites.

 
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