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La Izquierda Diario
4 de décembre de 2019 Twitter Faceboock

Conférence-meeting contre la réforme des retraites
Bordeaux. A la fac de la Victoire, la convergence des luttes se construit
Jade Ruiz

Mardi 3 décembre au soir, une conférence a réuni dans les murs de la faculté de la Victoire à Bordeaux des étudiants, cheminots, postiers, ainsi que le candidat à la présidentielle pour le NPA, et ex-travailleur de Ford Blanquefort, Philippe Poutou. L’événement organisé à l’initiative du NPA Jeunes se voulait être un appui aux différentes cadres permettant la construction du « tous ensemble » contre la réforme des retraites que souhaite imposer le gouvernement.

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A Bordeaux, plusieurs AG interprofessionnelles ont eu lieu lundi soir afin de préparer la convergence des différents secteurs de la jeunesse et du monde du travail lors de la très attendue journée du 5 décembre, point de départ d’une possible mobilisation d’ampleur contre la réforme des retraites, mais aussi et surtout, contre la politique néolibérale du gouvernement. Lundi soir, des AG se tenaient à la fac de la Victoire et à Blanquefort, en présence d’étudiants, de syndicalistes, d’enseignants, et de gilets jaunes. Une nouvelle AG inter-professionnelles aura lieu mercredi 4 à 17h30 à la fac de la Victoire.

Mardi soir, réunis en conférence à la faculté de Bordeaux Victoire, étudiants et salariés discutaient de comment construire la mobilisation au-delà des corporations, contre un projet de loi qui précarisera et assombrira l’avenir de la grande majorité de la société : les travailleurs et la jeunesse.

Le 5 décembre, le début d’une mobilisation d’ampleur ?

La conférence s’est ouverte sur l’intervention de Willy, salarié à la Poste, qui est revenu sur l’aggravation des conditions de travail dans l’entreprise, alors que la direction en demande toujours plus aux salariés à travers la restructuration des postes, et réprime durement toute tentative de contestation. La politique de la direction est en effet de tenir les salariés à travers des primes, si le salarié a tenu l’année sans arrêt maladie ni jour de grève, disposant d’un puissant levier dans un secteur précaire où les problèmes de souffrance au travail et les maladies professionnelles sont quotidiens. Willy a également dénoncé l’acharnement de la Poste à l’égard des militants syndicalistes, à l’image de Gael Quirante, militant de Sud PTT en Ile-de-France, licencié après avoir remis en cause la politique de la direction. Malgré tout, le 5 décembre qui s’annonce très suivi à la Poste, pourrait être une base d’appui importante pour relever la tête et construire la mobilisation.

Du côté de la SNCF, la journée du 5 décembre s’annonce d’ores et déjà comme une date historique dans l’un des principaux secteurs stratégiques de l’économie française, notamment chez les techniciens et les mécanos, avec quasiment la majorité des travailleurs en grève. Et pour cause, les cheminots ont de nombreuses raisons de se mobiliser contre le gouvernement ; des techniques de management inhumaines mises en place par l’entreprise publique, jusqu’à la suppression du statut de cheminot pour les nouveaux entrants. Pourtant, loin d’être une grève corporatiste comme cherche à le faire croire le gouvernement, Lionnel, conducteur à la SNCF, rappelle qu’il s’agit d’une mobilisation pour l’ensemble de la population.

Lionnel a également tenu à souligner l’impact de la réforme sur l’aggravation des inégalités hommes/femmes. Alors que celles-ci touchent des salaires et des retraites considérablement moins élevées, la réforme va toucher en particulier les travailleuses aux carrières précaires et hâchées, ainsi que les mères de famille. Un argument de plus, s’il en fallait encore, pour construire une mobilisation d’ensemble dans tous les secteurs du monde du travail et dans la jeunesse. A ce titre, Lionnel expliquait que les travailleurs de la SNCF sont très attentifs aux dynamiques de mobilisation dans les autres secteurs, et invite à participer à l’AG des cheminots de samedi, pour construire la reconductible !

De son côté, Antonin, étudiant à la faculté de sciences sociales de la Victoire est revenu sur les dynamiques de la mobilisation chez les étudiants. A la suite de l’événement tragique survenu à Lyon, où un jeune étudiant et militant syndicaliste s’est immolé pour dénoncer ses conditions de précarité, les étudiants de diverses universités en France ont commencé à s’organiser, visibilisant le tabou de la pauvreté chez les jeunes, loin de s’appliquer à des cas isolés. Si la mobilisation est pour l’instant moins importante du côté des facs, la discussion politique s’est rapidement portée sur la question de la réforme des retraites dont les jeunes seront les principales victimes.

Quelles revendications ? Que faire pour construire largement la mobilisation des étudiants le 5 décembre et au-delà ? Si des questions demeurent ouvertes, la problématique de la précarité, du travail en parallèle des études, amènent à discuter de mesure d’urgence, comme des allocations permettant à tous les jeunes de pouvoir étudier librement, sans pression financière, en allant chercher l’argent là où il est : chez les riches et le patronat. Alors que le gouvernement cherche à faire croire depuis plusieurs années qu’il y aurait trop de jeunes dans les facs, appliquant des mesures en restreignant l’accès aux classes populaires, Antonin souligne « il n’y a pas trop de jeunes à la fac, la vérité c’est qu’il n’y a pas assez de places sur le marché du travail capitaliste ! […] On nous fait croire que la précarité, c’est une étape de passage pendant les études, mais on nous prépare à travailler dans des conditions de misères le reste de notre vie. » La mobilisation du 5 décembre sera peut-être l’occasion pour le mouvement étudiant de rentrer dans la danse, déclencher un déclic et lui permettre de jouer le rôle d’étincelle que la jeunesse a, à de nombreuses reprises, joué dans l’Histoire. D’ici là, il s’agit de construire la mobilisation, en lien avec tous les secteurs, et de la pérenniser.

« On doit organiser cette confrontation entre deux camps sociaux amorcée par les gilets jaunes »

Enfin, Philippe Poutou est revenu sur la situation politique en France et dans le monde, où des révoltes font trembler les gouvernements néolibéraux sur plusieurs continents. Le 5 décembre en France est en effet l’aboutissement d’un processus politique profond, ouvert le 17 novembre 2018 par la radicalité des gilets jaunes : « Depuis un an, l’actualité sociale est différente, on discute du ras-le-bol générale, de la souffrance et la colère qui touche largement les gens. Il y a eu des contestations de longues dates dans de nombreux secteurs ; les urgences, les étudiants, les postiers, la SNCF… mais peut-être que ce qu’ont permis les gilets jaunes c’est de donner confiance, ils ont confirmé qu’il fallait relever la tête, poser la question de notre dignité et redonner courage dans la lutte collective.  »

« La question qu’on se pose tous c’est est-ce que le 5 décembre sera un tournant, initiera une mobilisation profonde ? Cela devra passer par la grève reconductible, le blocage de l’économie. Peut-être que la RATP ou la SNCF pourrons être les secteurs qui jouerons un rôle pour lancer les autres, bien que tout ne doive pas reposer sur eux. Mais l’attitude des dirigeants syndicaux de la SNCF ne va pas dans le sens de construire la lutte, et l’important c’est ce qui se passera au niveau des équipes militantes, syndicales, dans les AG de bases, et peut-être reproduire une dynamique comme celle de 1986, avec l’alliance entre les étudiants et les cheminots. L’enjeu c’est le « tous ensemble », au-delà des métiers, des âges. Le mouvement des gilets jaunes peut également apporter cette colère qui vient d’en dehors des villes.  »

« La lutte et la grève payent : il faut remettre au goût du jour l’importance de la lutte collective, après 30 ans de politiques et discours néolibérales. Il faut discuter de l’urgence sociale et climatique. Peut-être que ce système est en train de craquer : l’ensemble des continents connait à l’heure actuelle de profondes contestations politiques et sociales, qui s’affrontent à des répressions dures comme en Haiti, en Bolivie ou au Chili. On le sait, ce qui se joue aujourd’hui ce n’est pas uniquement la lutte contre la réforme des retraites, mais pour les salaires, les services publiques… bref pour la vie. Et c’est une confrontation contre cette classe de parasites qui exploitent la grande majorité de la population et dont le gouvernement représente les intérêts. Nous devons discuter d’une nouvelle répartition des richesses, reprendre ce qu’on nous a volé : et ça nécessite une confrontation sociale, ce qu’on espère construire à partir du 5 décembre par la grève et les blocages. On se lance dans un bras de fer, et il faudra discuter de la violence, pas celle des vitrines cassées mais des vies brisées. En ce sens, c’est scandaleux que les directions syndicales et notamment Martinez de la CGT cherchent à négocier avec ce gouvernement. Il disait « le gouvernement, s’il le veut, peut éviter la confrontation : mais nous on veut cette confrontation ! Il faut qu’on règle nos comptes, et ils se règlent par la lutte sociale ! Il n’y a pas de compromis possible, ils nous ont trop pris. On doit organiser une lutte d’ampleur, cette confrontation entre deux camps sociaux qui a été amorcée par les gilets jaunes  »

«  Le chemin qu’il reste à parcourir pour nous, c’est de lier cette mobilisation à notre objectif final : changer les rapports de force dans cette société, poser la question du pouvoir.  »

 
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