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La Izquierda Diario
28 de septembre de 2015 Twitter Faceboock

Produit dans les rues de Seine-Saint-Denis
Brooklyn, le film. La banlieue s’exprime
Flora Carpentier

Flora Carpentier

Sorti en salles mercredi dernier, Brooklyn est l’un de ces rares films à donner une vision sincère de la banlieue française, une histoire racontée entièrement par ceux qui connaissent de près le quotidien difficile de ces quartiers, la misère sociale, la débrouille, aussi. Loin de toute stigmatisation, Brooklyn sort des clichés, sans pour autant tomber dans l’idéalisation. La culture hip-hop, à laquelle le réalisateur Pascal Tessaud a souhaité rendre hommage, est au cœur de ce long-métrage, qui s’apparente finalement plus à un documentaire qu’à une fiction.

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La jeune Coralie (la rappeuse KT Gorique), dont le nom de scène est Brooklyn, arrive de Suisse où ses débuts dans le rap ne lui ont valu que des humiliations. A Paris, du haut de ses vingt-deux ans, elle décide de tout reprendre à zéro. La jeune femme trouve une chambre à louer chez Odette (Liliane Rovère), une retraitée qui fume de l’herbe, et un petit boulot dans une association de quartier où elle fait le ménage et la cuisine. Alors qu’elle fredonne un des cinquante textes qu’elle a composés dans son « Zap book », elle est repérée par Yazid (Jalil Naciri), qui organise des ateliers d’écriture de rap avec les jeunes de Saint-Denis. Ce sera le point de départ d’une aventure dans le monde du hip-hop, avec ses peurs, ses émotions, le trac de la scène, ses belles rencontres et ses déceptions.

Le rap, un moyen d’expression, mais pour dire quoi ?

Lorsqu’il initie « les petits » au rap, Yazid les pousse à rechercher l’authenticité. Il revendique un rap sincère, qui parle de la misère sociale vécue au quotidien, de la « chienne de vie » plutôt qu’un rap « bling bling », « falche », qui fasse « l’apologie de l’oseille ». Ces jeunes, que la société stigmatise et ghettoïse, vivent le rap comme un moyen de s’exprimer, de parler de leurs souffrances : « Pourquoi on s’étonne que des jeunes oubliés dans des ghettos brûlent des voitures ». Le rap, c’est aussi un moyen d’être quelqu’un, de retrouver une dignité, une reconnaissance : « J’veux faire de la musique pour dire ces choses que j’ai du mal à dire ».

Le jeune rappeur Issa (Rafal Uchiwa) est en proie à ses contradictions, lui qui est encore en balance entre un style sincère et un rap commercial, qui pourrait lui offrir de grandes scènes. La recherche d’un horizon un peu plus glorieux que la misère dans laquelle il a toujours vécu le pousse à faire les mauvais choix, qui finiront par le décevoir.

Faire sa place dans le monde hip-hop quand on est une femme

En choisissant une jeune femme noire pour incarner le rôle principal, Pascal Tessaud met en lumière la difficulté à se faire une place dans la société, quand on est la fois issu des milieux populaires, noir de peau et une femme, de surcroît. A l’image de la société, la banlieue n’est pas exemptée des oppressions machistes, et l’on sent à quel point celles-ci pèsent sur Coralie. Alors qu’elle cherche des contacts pour se faire une place dans le monde du hip-hop, elle est systématiquement confrontée à des tentatives de séduction. Ce qui lui permettra de garder la tête haute, c’est sa volonté de ne pas se laisser faire : quand, au cours d’un rendez-vous professionnel, son interlocuteur lui glisse un « Tu es belle », elle rétorque sèchement :« On n’est pas venus pour parler de ça ». Mais malgré sa force de caractère, certains coups-bas auront raison de son moral. Heureusement, le rap est là pour évacuer. C’est d’ailleurs dans ses moments les plus sombres qu’elle produit les textes les plus puissants.

Un film autoproduit pour mettre en valeur le talent des banlieues

Le premier long métrage de Pascal Tessaud est entièrement autoproduit, tourné avec très peu de moyens dans les rues de Saint-Denis et Saint-Ouen. Une quarantaine d’artistes hip-hop ont participé au tournage, avec une équipe technique également composée de jeunes des banlieues. C’est ce que le réalisateur appelle du « cinéma guérilla », où « l’on prend beaucoup de plaisir à inventer les dialogues sur l’instant (…),on perd le contrôle des choses ».

 
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