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La Izquierda Diario
21 de décembre de 2019 Twitter Faceboock

Refus des négociations et d’une trêve à noël !
Réunion SNCF-RATP : les grévistes à la base établissent un plan de bataille pour une semaine noire !
Olive Ruton

Au lendemain des annonces d’E. Philippe et des directions syndicales, sorties de la réunion multilatérale du 19 décembre, se tenait ce vendredi une réunion d’urgence des grévistes de la SNCF et RATP, fers de lance du mouvement, à Paris. Ce qui en ressort est clair : refus total des négociations et de toute forme de trêve, et l’établissement d’un plan de bataille pensé par la base pour une « semaine noire » après 15 jours de mobilisation.

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Jeudi soir, Édouard Philippe, sortant de la réunion multilatérale avec les confédérations syndicales autour de la réforme des retraites, faisait des annonces pour la deuxième fois depuis le début du mouvement le 5 décembre dernier. Des annonces qui ont confirmé que le gouvernement restait sur ses positions, ne reculant sur aucun des aspects de la réforme, que ce soit le principe du système à points ou même l’âge pivot. Si ces annonces n’ont guère surpris la population, habituée à la comédie du dialogue social devenu monnaie courante avec ce gouvernement, c’est plutôt les annonces à leur suite des directions syndicales qui ont suscité les plus vives réactions dès jeudi soir, et notamment chez les grévistes mobilisés maintenant depuis plus de deux semaines.

En effet, au bout de 15 jours de grève reconductible pour des milliers de grévistes, notamment à la SNCF et la RATP, les appels des directions syndicales, notamment celui de l’UNSA qui appelle explicitement à une trêve pour les fêtes, trahissant ouvertement ces milliers de grévistes, ont fait voir rouge dans les rangs de ceux qui se battent chaque jour contre la réforme des retraites. D’un autre côté, l’appel de l’intersyndicale à une prochaine journée d’action le 9 janvier apparaît comme déconnectée des besoins des grévistes pour qui il est urgent de durcir et d’élargir la grève. C’est donc dans un sentiment commun d’urgence et de nécessité de s’organiser à la base, indépendamment du plan proposé par les directions syndicales que les grévistes de région parisienne ont ressenti le besoin de se réunir d’urgence afin de se doter d’un plan de bataille pour les jours à venir.

C’est donc dès 15h ce vendredi (avant que les soutiens ne les rejoignent à 17h), dans une réunion appelée en live sur Révolution Permanente jeudi soir par Anasse Kazib, en lien avec les différents secteurs mobilisés, que se sont réunis plus de 80 grévistes des différents dépôts de bus, lignes de métro et gares de la région. C’est en effet la rencontre RATP SNCF la plus représentative depuis le début de la grève. Étaient ainsi présents des grévistes des dépôts de bus d’Asnières, Flandre, Charlebourg, Lagny, Malakoff, Montrouge, Point du jour, Aubervilliers, Nanterre, Pavillon sous-bois, Bélliard et Saint Denis, des lignes 3, 5 et 9 du métro, et A et B du RER, ainsi que des gares de Paris Nord, Saint Lazare, le Bourget, Austerlitz, et Châtillon. Le mot d’ordre de cette réunion : préparer une semaine noire ! Rappeler que la grève appartient aux grévistes, se démarquer du plan ou de l’absence de plan proposé par les directions syndicales, se coordonner tous ensemble pour durcir le ton, taper fort la semaine prochaine, et réaffirmer le refus de toutes négociations : pas de retrait, pas de trêve !

Le mouvement entre dans une deuxième période, il faut durcir la grève ! Pas de retrait, pas de trêve !

C’est dans une atmosphère combative et sérieuse que commence la réunion, avec la conscience d’entrer dans un moment charnière du mouvement, au bout de deux semaines de grève reconductible et au lendemain d’annonces visant à le mettre en pause, avec le sentiment que la vraie bataille commence maintenant. Ce à quoi appellent les directions syndicales « C’est une trêve sans dire le terme de trêve », introduit Anasse, cheminot du Bourget. « On nous demande de continuer en reconductible avec juste la perspective d’une journée de manifestation dans 20 jours ! ». Pour l’ensemble des grévistes présents, il en est hors de question ! C’est en affirmant le refus total de négocier que l’assemblée se positionne en rejet net vis-à-vis de la posture des directions syndicales qui se rendent aux réunions avec l’Élysée. « Ces gens là ne représentent qu’eux-même ! » entend-on fuser dans la salle. Une idée largement partagée, et développée par un conducteur de la ligne B du RER, qui rappelle les précédentes négociations et trahisons de ces mêmes directions : « C’est pas nous qui négocions avec le gouvernement c’est eux ! En, 2009 pour le statut des nouveaux, c’est eux qui ont signé ! Ne nous laissons pas berner une deuxième fois. »

A l’image des antennes locales de l’UNSA qui ont publié des communiqués en claire opposition avec la trêve, c’est la nécessité de se faire entendre, et surtout de rappeler que la grève appartient aux grévistes et que c’est eux qui décident de celle-ci qui se répète dans les différentes interventions, comme dans celle de Arnaud, conducteur sur la ligne A du RER ; « Aujourd’hui la base démontre qu’elle est déterminée et unie. Les salariés se prennent en main et ont un but : le retrait pur et simple de cette réforme de merde ! ». Une idée soulignée par Jérémy, agent de station sur la même ligne : « Il n’y aura pas de trêve. Les leaders syndicaux ne tiennent plus le mouvement. Aujourd’hui ce sont les AG qui le tiennent. Il est hors de question qu’on s’arrête ! On peut perdre 2000 euros en grève aujourd’hui, mais pas 600 euros tous les mois à la retraite ! »

Ce n’est pas une pause mais un durcissement de la grève qui s’impose. Dans ce sens, c’est autour de la prévision d’actions fortes pour la semaine à venir que s’oriente la discussion. Alors que les blocages des dépôts de bus, principales actions locales du mouvement depuis son commencement, sont depuis quelques jours très réprimés par la police, qui matraquent, gazent et interpellent les grévistes et leurs soutiens pour casser la grève à sa base, la question se pose de reprendre le rapport de force et durcir le trait des actions. « Eux ils n’hésitent pas a éborgner, arracher des mains, arracher des jambes. Nous on a notre outil, c’est la grève ! » lance ainsi Malek, du centre bus de Nanterre « Ça suffit la gentillesse, il faut se faire respecter ! »

« On veut marquer l’histoire ou être un détail de l’histoire ? », après un an de Gilets jaunes, se battre jusqu’à la victoire contre ce système

Radicalisés par les premières trahisons des directions syndicales, c’est contre tout un système qui précarise, réprime et trahit les travailleurs qu’entendent se battre – et jusqu’à la victoire ! - les grévistes présents. C’est ce qu’exprime Clément, cheminot du technicentre de Châtillon en parlant de la nécessité de gagner tous ensemble contre cette réforme des retraites, pour renverser le rapport de force qui enlève un par un leurs acquis aux travailleurs dans un monde qui leur permet à peine de survivre : Si ce combat là on le gagne, derrière, on sera à l’offensive ! »

Et dans cette lutte contre la précarité et la société dans laquelle on détruit chaque jour plus les classes populaires, impossible de ne pas évoquer le mouvement des Gilets jaunes, dont le point le plus fort a littéralement fait trembler le gouvernement il y a un an, un combat radical duquel les directions syndicales s’étaient désolidarisées. « On est en train de se giletjauniser. C’est quoi la réponse qu’on va donner en termes de radicalité aux directions syndicales qui sont en train de nous lâcher ? » demande Anthony, cheminot sur le Bourget, région de Paris Nord, « Est ce qu’on veut marquer l’histoire ou être un détail de l’histoire ? Il faut aller beaucoup plus loin que la réforme des retraites, on en est tous conscients, et c’est pour ça que se battent les Gilets jaunes depuis un an. »

En plus de revendiquer ce combat des Gilets jaunes et d’appeler à converger avec eux le samedi, les interventions réfléchissent aussi au dépassement des obstacles qui ont malgré tout empêché ce mouvement long et radical de faire tomber le gouvernement. C’est ainsi que poursuit Anthony « Il nous faut du concret, avec un vrai outil de coordination » dans une véritable discussion stratégique sur la centralité et la nécessité de l’auto-organisation qui s’engage au cœur de la discussion.

Construire véritablement des outils d’auto-organisation : « Ce n’est pas avec la détermination qu’on gagne une grève, c’est avec un plan de bataille !"

Pour endurcir et faire gagner une telle grève, quand les directions syndicales jouent le jeu du gouvernement, celui du temps long et de l’usure, ici tout le monde en est conscient, il va falloir s’organiser à la base, et prendre en charge soi-même tout ce qui permettra que le mouvement parvienne à s’organiser. Ainsi est par exemple discutée la centralité des caisses de grèves, véritable soutien et appui pour les grévistes pour assurer la poursuite d’un mouvement qui commence ainsi à s’étendre dans le temps. Des actions sont ainsi décidées dans le sens d’approvisionner ces caisses pour les différents secteurs, de l’interpellation des syndicats dont les caisses sont remplies, aux actions tournées vers la population, pensées avec les étudiants en soutien.

« La première phase, c’était celle du taux de grévistes. Là, il faut rentrer dans celle contrôlée et dirigée par la base. Faire comprendre aux grévistes que le mouvement leur appartient réellement. » explique Anasse, et Anthony de renchérir « On doit à nouveau se réunir rapidement, régulièrement, et se donner pour objectif d’être un germe de vraie coordination ».

C’est en prenant au sérieux l’organisation, des assemblées générales sur les lieux de travail, aux organes de coordination, en passant par les comités de grève, que les grévistes pourront – et commencent à – se saisir pleinement de cette grève impulsée par la base depuis le début. Refusant catégoriquement d’attendre le 9 ou même le 28, une date de manifestation est ainsi proposée et adoptée au cours de l’assemblée, avec la ferme décision de la part des grévistes d’eux-mêmes diriger la grève et de ne plus attendre des directions syndicales qu’elles donnent le rythme de la mobilisation. « La question c’est comment entre la détermination et la gagne, on met un plan de bataille ! On ne gagne pas avec de la détermination, mais avec une stratégie. On doit avoir un plan de bataille. » Voilà l’une des leçons tirées du mouvement des Gilets jaunes, et un début de chemin pour le dépasser et enfin faire de cette lutte une victoire.

Ainsi, l’assemblée se termine sur cette résolution, celle de faire des grévistes eux-mêmes les seuls acteurs et décideurs de cette grève, et de se doter d’un véritable plan de bataille, que se clôture l’assemblée avec le vote d’un communiqué qui affirme cette volonté et annonce les grandes dates de la semaine à venir. En plus de la manifestation du 26 qui émerge de la discussion, le communiqué annonce la jonction avec la date appelée par la CGT Cheminots et Sud Rail de manifestation le 28 décembre, et à l’action du lundi 23, de rassemblement devant le siège de la RATP à Bercy. Une action qui se donne pour mot d’ordre la dénonciation de la répression policière féroce qui s’abat sur les blocages de dépôts de bus, commandée par la RATP, et qui a déjà fait de nombreux blessés. A ces principales dates, se rajoutent de nombreuses actions, discutées en commissions, dans la perspective de faire de cette semaine, loin de toute trêve, un temps fort du mouvement.

 
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