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La Izquierda Diario
25 de décembre de 2019 Twitter Faceboock

Hypocrisie
Après avoir tué le train primeurs, la direction SNCF s’inquiète de l’effet de la grève sur le fret
Paul Morao

Dans un entretien au Monde, le PDG de la SNCF tente d’attaquer le mouvement de grève par la bande, en mettant en avant les pertes engendrées par la lutte. Parmi celles-ci, il accuse notamment la grève de menacer le fret. Pourtant, l’entreprise n’a eu de cesse de l’attaquer : dernier exemple en date, la ligne Perpignan-Rungis.

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 Crédit photo : DR

Farandou en défenseur du rail dans Le Monde ?

 
En pleines fêtes de Noël et alors que la pression médiatique s’accroît contre les grévistes, le nouveau Président de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, s’est fendu d’un entretien dans Le Monde où il revient sur les conséquences de la grève sur l’entreprise.

« Au bout de vingt jours, on est à 400 millions d’euros de chiffre d’affaires qui n’aura pas été réalisé dans la période. C’est déjà une somme considérable. Les comptes 2019 seront fortement impactés par ce conflit, d’autant plus qu’on n’est pas encore au bout du décompte des conséquences économiques. » explique-t-il notamment au journal, pointant en filigrane la responsabilité des grévistes.

Mais un des éléments avancés par Farandou a de quoi choquer encore plus les cheminots. Interrogé sur la situation du fret, il n’a pas hésité à avancer que : « Quand nos clients ne peuvent pas compter sur le ferroviaire, ils retournent à la route. (…) C’est trop tôt pour faire le calcul, mais je crains qu’un certain nombre de tonnes qui échappent au train à l’occasion de cette grève ne restent dans le mode routier. » La grève serait ainsi coupable de mettre en danger le fret.
 
Cet argument est pour le moins culotté de la part de la direction de la SNCF au vu de la politique qu’elle mène activement depuis des années : une destruction consciente du fret ferroviaire au profit du transport routier… dont la SNCF est d’ailleurs un acteur de premier plan, au travers de sa filiale Geodis. C’est une casse systématique du fret ferroviaire qui est organisée depuis des années.
 

Le fret, sous les coups des politiques de privatisation de la SNCF depuis des années

Dans un rapport intitulé « Transport de marchandises, changeons d’ère », le CE de Fret SNCF et le cabinet Emergences revenait en 2016 sur la politique qui a conduit à la déliquescence du fret : réduction des effectifs, détérioration du réseau faute de maintenance suffisante et de renouvellement des voies, fermeture de centaines de gares de triage, destruction du « réseau capillaire », celui des petites lignes desservant les sites et permettant aux marchandises de réaliser les derniers kilomètres. Une politique qui s’est aggravée avec l’ouverture à la concurrence en 2007, et qui a été menée en parallèle du développement par la SNCF de sa filiale de transport routier.
 
Comme le note le rapport : « En même temps que le fret ferroviaire français déclinait, la SNCF créait et développait des filiales de logistique, de messagerie, de transport routier et de commission de transport international regroupées aujourd’hui dans Geodis, dont elle détient 98,40% du capital. Geodis s’est haussé au rang de quatrième groupe européen de logistique. (...) Les activités de Geodis occupent désormais une part bien plus centrale dans les activités du groupe SNCF que les activités de fret ferroviaire : ces dernières ont en effet représenté un peu moins de 2 milliards de chiffre d’affaires du groupe SNCF en 2015, sur un chiffre d’affaires total de 31,4 milliards d’euros. »
 
C’est ainsi la SNCF qui a, en premier lieu, privilégié le transport routier pour ses avantages évidents au premier rang desquels on retrouve un coût d’infrastructure quasi-nul, mais au prix d’une aberration écologique et de la mise en danger du rail. Un déclin du fret lié à la politique de la SNCF que les chiffres utilisés par Jean Gadrey expriment clairement :
 

 

La ligne Perpignan-Rungis : un exemple récent évocateur

 
Dernier exemple en date de cette politique : la destruction de la ligne de fret Perpignan-Rungis. Après avoir liquidé les wagons frigorifiques du train de primeurs de la ligne au motif que ceux-ci étaient obsolètes et sans poser la question de leur réparation, la SNCF et le gouvernement s’étaient engagés à relancer cette ligne. Mais, entre temps, la SNCF a laissé les transporteurs qui utilisaient la ligne, Roca et Rey, quitter le navire et fini par envoyer les rames frigorifiques réparées au triage… Une politique dénoncée par la CGT localement, expliquant notamment que « La SNCF organise la disparition pure et simple du train des primeurs et ainsi favoriser sa filiale d’autoroute ferroviaire VIIA. La CGT n’en restera pas là, nous suivons attentivement les déplacements des wagons. »
 
Une situation qui a conduit au remplacement au moins partiel de la ligne par des camions malgré les promesses de la SNCF, et qui n’est toujours pas réglée à l’heure actuelle comme le rappelait le collectif Sauvons le Perpignan-Rungis sur sa page Facebook le 22 décembre dernier : « Aujourd’hui cela fait 52 jours que le train Perpignan Rungis a été supprimé pour être remplacé par des camions, soit 2288 tonnes de CO2 supplémentaires dans l’atmosphère. Une fois de plus les promesses de Elisabeth Borne et Djebbari n’étaient que mensonges ! Honte à vous. »
 
De quoi détruire le discours de Farandou qui tente de se poser en défenseur du rail. N’en déplaise à la direction de la SNCF, les cheminots qui luttent contre une réforme des retraites qui menace toute la population sont aujourd’hui les véritables défenseurs du rail, que leurs politiques de privatisation et d’ouverture à la concurrence ne font que fragiliser un peu plus chaque jour. 

 
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