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La Izquierda Diario
3 de janvier de 2020 Twitter Faceboock

LETTRE D’UNE PROFESSEURE DES ÉCOLES À SES COLLÈGUES
Éducation nationale. « Où est la bienveillance face à notre situation et à notre métier ? Nulle part »

Révolution Permanente lance une campagne de témoignages des travailleurs de l’Éducation qui depuis la rentrée subissent la mise en application des réformes Blanquer.

Link: https://www.revolutionpermanente.fr/Education-nationale-Ou-est-la-bienveillance-face-a-notre-situation-et-a-notre-metier-Nulle-part

Le passage en force des réformes néolibérales n’a d’autres conséquences que la casse accélérée de l’éducation nationale. Face au manque de moyens, à la dégradation de leur quotidien, aux suicides des collègues comme celui de Christine Renon et maintenant au projet de reforme des retraites, nombreux sont ceux qui choisissent de démissionner. La hausse des démissions sur les 5 dernières années est totalement alarmante, particulièrement chez les enseignants-stagiaires qui choisissent de quitter l’Education Nationale avant la fin de leur première année sur le terrain. Ils sont, en 2017-2018, six fois plus nombreux qu’en 2012-2013 à avoir démissionné. Nous avons recueilli la lettre qu’une professeure des écoles a envoyé à ses collègues.

Bonjour chers collègues,

J’espère que vous passez de bonnes vacances reposantes après cette difficile période d’avant Noël.

Je vous écris ce petit mot pour vous signaler que je vais reprendre cette rentrée de janvier « à l’essai » et en douceur après ma convalescence, suite à l’intervention chirurgicale effectuée sur mon canal carpien droit. En effet, j’ai, selon la chirurgienne, bien récupéré en force et en mobilité, mais par contre, les appuis, pressions, porters, mouvements de torsion, restent délicats, voire douloureux et je verrai comment je peux gérer cette situation au quotidien en classe, lorsque ma main droite sera constamment sollicitée. Je vais donc y aller doucement, à tous les niveaux… et voir comment cela se passe.

Ceci entraînant cela, et avec un bienfaisant recul de deux mois de congé maladie, j’ai décidé de m’accorder une « cessation progressive d’intensité", car hélas, ni notre ministère, ni notre hiérarchie, ni notre administration ne nous accorderont jamais une nécessaire « cessation progressive d’activité » au fur et à mesure que nous avançons en âge et atteignons l’âge théorique de la retraite. Or, je vais avoir 59 ans dans quelques mois en 2020, nombre de collègues de mon âge sont en retraite, mais je dois continuer au minimum jusqu’à 65 ans, pour avoir le strict minimum vital... Je n’ai en effet que 20 ans d’ancienneté dans l’Education Nationale, et très peu d’années hors Education Nationale, ayant arrêté 15 ans pour élever mes 4 enfants.

Je tiens à me protéger au quotidien autant que faire se peut, et conserver l’énergie suffisante pour gérer le groupe classe et faire mon travail correctement, c’est-à-dire dispenser un programme de CE2 à mes élèves. Pas de superflu, pas de choses qui parasitent, le moins de perte de temps possible, pas de rendez-vous de dernière minute, sauf en cas d’extrême urgence, pas de récréations sacrifiées au dernier moment alors que j’y consacre un maximum de corrections. S’agissant des réunions du midi, très fatigantes pour moi, qu’elles aient débuté à n’importe quelle heure, je partirai désormais à 13h, pour essayer de me reposer et décompresser un minimum avant d’attaquer l’après-midi, etc.. Toutes ces petites choses du quotidien épuisantes que nous avons à gérer. En essayant d’avoir le moins de « mal-être » possible, physique ou moral...

Notre rendez-vous avec notre inspecteur de circonscription nous a bien démontré l’incohérence, l’absurdité, le manque de moyens humains et professionnels face à toutes les situations d’inclusion présentes et à venir. Sans compter toutes les problématiques sociales, familiales, comportementales du quotidien on ne peut plus chronophage. Et tout ceci bien sûr sans aucune compensation financière ! Où est la bienveillance face à notre situation et à notre métier ? Nulle part… Alors à nous de nous l’attribuer à nous mêmes en priorité.

Suite au conseil d’un ancien inspecteur de circonscription parti en retraite et avec qui j’avais longuement discuté, je vais commencer à prospecter et me renseigner pour tenter de dénicher éventuellement un poste vacant hors milieu urbain, totalement « grillé » selon lui. Je sais cependant que ce n’est pas chose facile et je ne souhaite pas trop m’éloigner de mon actuel domicile. L’avenir le dira.

Je terminerai mon mail en vous disant que j’apprécie énormément de travailler à vos côtés, j’apprécie ce que chacun ou chacune fait ou a fait pour moi de manière directe ou indirecte, cette bonne entente et cette solidarité permettent de venir à l’école le coeur léger et d’aborder chaque journée positivement.

Je vous souhaite une très bonne continuation dans vos vacances et de bonnes fêtes de fin d’année.
Amitiés.

 
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