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La Izquierda Diario
15 de janvier de 2020 Twitter Faceboock

Réforme des retraites : le gouvernement prêt à utiliser le 49.3 ?
Joël Malo

Le calendrier parlementaire de la réforme des retraites se précise malgré la 5ème semaine de grève qui s’entame. Et pour passer en force et vite, le gouvernement pourrait être tenté par l’utilisation du fameux 49-3.

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Crédits photo : Thomas Samson/AP/SIPA

L’alinéa 3 de l’article 49 de la constitution (plus connu sous le nom de 49-3) fait partie des mesures anti-démocratiques et autoritaires caractéristiques de la Vème République, puisqu’il permet à l’exécutif de passer en force à l’Assemblée nationale et de faire passer un projet de loi sans vote des parlementaires. Cet article avait été rappelé au grand public sous la présidence Hollande à de multiples reprises mais en particulier lors du (non-) vote de la loi Macron en 2015 (loi fourre-tout qui autorisait pêle-mêle les « bus Macron », raccourcissait les heures de travail de nuit, facilitait grandement les licenciements, bridait les possibilités de recours aux prud’hommes etc.) et de celui de la Loi Travail, par deux fois, en 2016.

Cet article est un outil parmi tout l’arsenal répressif, autoritaire du bonapartisme « cinquième-républicain ». Auquel Macron a su parfaitement coller dans le premier acte de son mandat, principalement pour masquer et compenser sa propre faiblesse en termes de légitimité et de capacité à rassembler une vaste base sociale, en multipliant le recours aux ordonnances, aux décrets, ou au vote bloqué (sur une mesure pour les retraites agricoles d’ailleurs !). Si Hollande et Valls avaient dû faire face à une pseudo-fronde (dont le caillou n’était pas parti bien loin) au sein de leur majorité parlementaire, Macron dispose d’une solide majorité, « bien alignée » selon Marc Fesneau, ministre chargé des relations avec le Parlement.

Pourtant, le 49-3 vient repointer le bout de son nez. C’est un article du Journal du Dimanche qui a lancé la rumeur, « un ministre », anonymisé dans l’article, aurait évoqué le sujet la semaine dernière lors d’un dîner politique à l’Elysée. Pourquoi ? Tout d’abord, le calendrier du gouvernement a été bousculé par la grève appelée le 5 décembre par pression de la base de la RATP. Macron comptait passer cette loi, qui risquait d’être et qui est particulièrement impopulaire, au mois de mai, après les élections municipales pour ne pas gréver son électorat potentiel. Que le parcours législatif commence fin janvier, avec le passage en conseil des ministres le 24, et se termine début juin bouleverse ces plans. Le JDD évoque, de la bouche de ce « ministre », la peur d’une « guérilla parlementaire » et de batailles d’amendement, c’est-à-dire que l’opposition dépose des milliers d’amendements pour ralentir et alourdir le processus législatif. De plus, ce passage au Parlement pourrait servir de tribune politique aux oppositions, à droite comme à gauche, et faire tâche d’huile avant les élections locales. C’est par crainte de ce bourbier que le 49-3 pourrait être envisagé. Au sein des rangs de LREM, il ne devrait pas y avoir trop de dissensions, si ce n’est sur des éléments qui recréent le clivage centre-droit/centre-gauche, notamment autour des mesures d’équilibre.

Après le lancement de cette rumeur, Elisabeth Borne (transports et écologie) et Pénicaud (Travail) sont montées au créneau, dénonçant une « fausse information » et une « idée saugrenue ». Pourtant, si le gouvernement venait à se trouver en difficulté, surtout dans la rue, sur le terrain de la lutte des classes, le 49-3 pourrait être une issue ; coûteuse politiquement mais une issue tout de même. Le fait même de l’évoquer à niveau ministériel en dit long sur le manque de légitimité et de popularité (les derniers sondages reprennent à la baisse) du gouvernement, son manque de base sociale et surtout l’échec de son projet de construction d’un bloc bourgeois qui se redéfinit avant tout par la tentative de solidifier un bloc traditionnel de droite. Pas si facile pourtant, alors que les Républicains veulent se refaire, en tapant sur les reculs successifs de Macron, le dernier en date, bien maigre pourtant, étant le retrait provisoire de l’âge pivot. Un quitte ou double pour Macron, puisque reculer sur la réforme des retraites marquerait la fin de son quinquennat, mais une défaite aux municipales traduirait l’incapacité pour son mouvement de s’ancrer dans le paysage politique. En cas de menace sur ces objectifs, passer par la force à l’image de la répression opérée dans les rues lors des dernières manifestations, pourrait être une tentation pour le gouvernement.

 
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