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La Izquierda Diario
21 de janvier de 2020 Twitter Faceboock

Un texte actuellement examiné par le Sénat
Loi bioéthique. Avec le non-remboursement, la PMA interdite aux femmes les plus modestes !
Gabriella Manouchki

La loi bioéthique est examinée à partir de ce mardi par le Sénat. Le texte vient d’être largement modifié, notamment dans le sens de ne pas appliquer le remboursement pour les femmes seules et les couples de femmes lesbiennes.

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 Crédit photo : AFP / Philippe Desmazes 

La PMA : une promesse électorale

La PMA concerne les personnes qui ne peuvent procréer sans assistance médicale, à savoir certains couples hétérosexuels (infertilité, maladie héréditaire..) mais aussi les couples de femmes et les femmes seules. Jusqu’aujourd’hui, le recours à la PMA en France n’est légal que pour les couples hétérosexuels sous certaines conditions.

L’ouverture de la PMA à toutes les femmes, enjeu principal de la loi bioéthique, est une promesse de longue date. En effet, Hollande a été le premier à l’inscrire à l’agenda, mais aussi le premier à la repousser. Par la suite, voulant faire des femmes « la grande cause nationale du quinquennat », Macron en a fait une promesse de campagne et son gouvernement multiplie les effets d’annonce depuis l’été dernier.

Il s’agit en effet d’une occasion rêvée de se donner un vernis progressiste auprès des secteurs féministes et plus largement des électeurs de gauche, qui défendent le droit des femmes à disposer de leurs corps, y compris leurs droits reproductifs. Alors que Macron a depuis bien longtemps fait tombé son masque d’apparence sociale pour révéler ses positions toujours plus à droite, l’ouverture de la PMA à toutes les femmes pourrait lui permettre de mener la seule et unique réforme dont on se souviendrait comme progressiste au milieu du flot de régression sociale qu’il tente de nous imposer depuis le début de son quinquennat - à la manière de Hollande avec le mariage pour tous. Ce n’est donc pas un hasard si la discussion sur ce projet de loi a commencé dans le contexte du mouvement des Gilets Jaunes puis de la bataille contre la réforme des retraites : il s’agit pour un gouvernement détesté de se sauver la face, en particulier à l’approche des élections municipales.

Un texte de loi largement modifié par le Sénat

Cependant, pour celles et ceux qui en doutaient encore, le féminisme n’est pas le fort de ceux qui nous dirigent. Au delà des allocutions politiques, ce projet de loi peu ambitieux n’a en vérité aucune chance de voir le jour dans sa forme initiale, c’est à dire dans le but d’ouvrir réellement et sans conditions la PMA à toutes les femmes.

En effet, dès son adoption difficile devant l’Assemblée Nationale en septembre dernier, la loi excluait les personnes transgenres de la possibilité de recourir légalement à une PMA. De plus, elle ne comportait pas la suppression de la clause de conscience, donnant une réalité variable à cette loi selon les médecins et laissant la part belle aux idées réactionnaires.

Devant le Sénat, dont Les Républicains détiennent la majorité, la loi bioéthique a été modifiée au point de remettre profondément en cause son objet principal, l’ouverture de la PMA à toutes les femmes. Avant de l’adopter le 8 janvier dernier pour le soumettre à la discussion de l’ensemble de la chambre à partir de ce mardi, la Commission Bioéthique du Sénat a en effet significativement modifié le texte de loi qui se retrouve dès lors très en deçà du projet annoncé.

Contrairement aux promesses de Macron, la PMA ne sera pas remboursée pour les couples de femmes et les femmes seules !

Ainsi, parmi les amendements les plus conservateurs : si le recours à la PMA devenait légal pour toutes les femmes, son remboursement serait conditionné par un “critère d’infertilité médicalement diagnostiqué ou la non transmission d’une maladie d’une particulière gravité”. En d’autres termes, l’ouverture de la PMA pour les couples de femmes lesbiennes et pour les femmes seules est conditionné par des critères de classe, et en fonction de critères économiques. Il s’agit d’une interdiction de fait pour l’immense majorité d’entre elles, qui n’auront pas les moyens de payer cette opération médicale de leur poche.

Il s’agit donc d’une mesure directement discriminante qui préserve une conception "traditionnelle" et bourgeoise de la famille en excluant les femmes qui ne sont pas en couple hétérosexuel, et en particulier les plus précaires d’entre elles. Comme le souligne le HuffingtonPost : « Cela entre en contradiction avec les promesses du gouvernement, qui avait soutenu à l’Assemblée un remboursement de la PMA à 100% pour tous, sans critère médical. Une disposition approuvée par le Conseil d’État comme un “traitement égalitaire” en matière de protection sociale ».

De plus, un autre amendement réintroduit l’évaluation psychologique comme préalable à un accès à la PMA, ce qui constitue non seulement une nouvelle entrave à ce droit reproductif mais aussi une atteinte à la dignité des personnes qui veulent recourir à la PMA, présumées inaptes à juger par elles-mêmes de leur capacité à recourir à un tel procédé.

Nos droits s’obtiennent dans la rue

Si la loi bioéthique constitue une avancée importante en élargissant le droit a la PMA, les possibilités qu’elle ouvre dans la vie réelle restent donc considérablement limitées. Loin d’être féministes, les gouvernements bourgeois utilisent nos droits reproductifs pour faire campagne et peuvent les retirer aussi vite qu’ils les brandissent, comme on peut le voir ces dernières années avec le droit à l’avortement qui est sans cesse repoussé là où il n’est pas encore consacré par la loi et largement attaqué là où il avait été arraché par la lutte, comme aux États-Unis. Alors que d’une main on nous agite la carotte des droits sociaux et reproductifs, de l’autre main, on nous frappe de l’autre avec le bâton de l’austérité qui fait que nous ne seront jamais égaux dans l’exercice de nos droits, même s’ils existent sur le papier. Avec la réforme des retraites, les femmes seront en première ligne de la précarisation. La loi bioéthique ne peut dissimuler cela.

Comme nous l’écrivions il y a quelques mois, les femmes doivent aussi être en première ligne de la construction d’un mouvement de masse en mesure d’arracher au gouvernement les droits reproductifs pour toutes les femmes - et tant d’autres choses. Cela fait partie des revendications qui pourraient être portées par les féministes dans le mouvement de grève actuel, qui dépasse déjà largement la question de la réforme des retraites.

 
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