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La Izquierda Diario
16 de mars de 2020 Twitter Faceboock

Union nationale ou solidarité internationale ?
Pandémie en Italie. Quand Macron et Merkel refusaient de l’aide à l’Italie
Petra Lou
Mahdi Adi

Alors que l’Italie est le principal foyer de contamination européen, les gouvernements français et allemand ont refusé de lui envoyer du matériel médical. Vu l’ampleur de l’épidémie, la réponse devra nécessairement être la solidarité internationale entre les peuples.

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L’Italie, en pleine crise sanitaire, ne peut pas compter sur l’aide de l’Union Européenne. Avec plus de 1.800 morts, dont 368 les dernières 24 heures, et 24.747 cas détectés, majoritairement en Lombardie au Nord de l’Italie, le pays est le principal foyer de contamination en Europe. L’Italie semble être dépassée par cette crise sanitaire malgré les différentes mesures drastiques, comme celles de la mise en quarantaine, et la fermeture d’une grande partie des commerces de la péninsule, les autorités italiennes ont demandé le soutien de la communauté internationale, en particulier de matériel médical, dont les masques FPP2 qui ne sont pas produits sur son territoire.

Pékin envoie un signal à Rome, et tente de restaurer son image après une gestion catastrophique de la crise

Le gouvernement italien a demandé à l’Europe plus d’aides, mais c’est la Chine, où l’épidémie régresse, qui lui a envoyé des moyens humains et matériels pour tenter de ralentir le virus. Vendredi, un cargo de Shanghaï transportant à son bord neuf médecins, des techniciens, et trois tonnes de fournitures, dont 20.000 combinaisons, 100.000 masques de haute technologie et 2 millions de masques médicaux ordinaires, ainsi qu’un millier d’appareils pour diagnostiquer le virus (qui manquent cruellement en Italie qui en compte seulement 3000) est arrivé en Italie.

Pour Pékin, cette initiative apparaît comme un moyen de s’affirmer auprès de son principal partenaire européen – contrairement à Paris ou Berlin, Rome a accepté de participer au programme d’investissement chinois pour une « nouvelle route de la soie » avec notamment la rénovation des ports de Gênes et Trieste – tout en faisant l’étalage sur la scène internationale de son expérience dans la gestion de l’épidémie après l’humiliation qu’a représenté l’extension de la maladie dans l’empire du milieu qui compte jusqu’à aujourd’hui 80.844 cas, dont 3.199 décès et 66.911 guérisons.

L’Union Européenne minée par les divisions nationales, incapable de fournir un véritable plan pour faire face à la pandémie

Du côté des pays de l’Union Européenne, ces appels à la solidarité ont d’abord été ignorés, en particulier par les gouvernements allemand et français. Ces derniers ont en effet interdit dans un premier temps l’exportation de masques, en justifiant par la lutte contre la spéculation sur le matériel médical cette décision au passage saluée par Marine Le Pen. Dans son allocution prononcé jeudi soir, Emmanuel Macron promettait pourtant que face à « ce virus (qui) n’a pas de passeport (…) la coordination européenne est essentielle. »

Mais le signal envoyé par son gouvernement en refusant de venir en aide à l’Italie, de même que la fermeture des frontières avec l’Autriche, montrent les limites actuelles de l’Union Européenne, déjà en crise latente depuis la crise financière de 2008, et désormais percutée par une pandémie. Ainsi, le duo Macron-Merkel contrevient aux règles de libre-échange de marchandises qui sont pourtant la raison d’être de l’UE.

A un moment où la coopération internationale semblerait pourtant être le moyen le plus efficace pour faire face à une épidémie mondiale, la réponse des gouvernements se situe plutôt sur le terrain de la concurrence entre Etats, chacun se tirant la couverture sur la gestion de la crise. A l’image de la porte-parole du gouvernement, Sibeth N’Diaye qui accusait l’Italie de n’avoir pas pris les mesures pour « enrayer l’épidémie », au moment où l’Etat français lui-même rechignait à prendre des mesures jusqu’à suivre une courbe de contamination et de taux de létalité de l’épidémie supérieur... à l’Italie, avec un doublement des cas détectés ces dernières 72h.

Le ministre italien des affaires étrangères Luigi Di Maio a déclaré suite à la fin de non-recevoir quant à la demande d’aide médicale : « nous saurons nous souvenir des pays qui nous ont été proches. » Cette phrase illustre donc parfaitement le tournant que marque que cette crise sanitaire dans les relations géopolitiques, qui tend en particulier à accentuer les tensions inter-impérialistes.

Face aux divisions nationales et aux capitalistes qui font primer leurs profits sur nos vies, la seule solution c’est la coopération internationale des travailleurs

Dimanche, le commissaire européen chargé du marché intérieur, Thierry Breton, a déclaré avoir eu « des discussions avec les autorités françaises et allemandes » pour les convaincre de lever l’interdiction d’exporter du matériel médical, et a annoncé que « la possibilité d’export est à nouveau rétablie, bien entendu sous contrôle strict. » L’Allemagne a ainsi annoncé l’envoi immédiat vers l’Italie de plus d’un million de masques.

Cependant cette mesure, tout comme les quelques 100.000 masques FPP2 envoyés par le gouvernement chinois sont loin de répondre aux besoins nécessaires pour endiguer l’épidémie en Italie, où les experts estiment qu’il faudrait une dizaine de millions de masques. « Les patients atteints de coronavirus sont trop nombreux et les autres services hospitaliers sont au bord de la paralysie. Nous sommes allés au bout de nos limites en ce qui concerne le nombre de lits et la mobilisation du personnel médical  » a expliqué le coordinateur des thérapies intensives de l’unité de crise en Lombardie, avant de conclure : « on est en train de faire des miracles, mais on ne pourra pas tenir plus de dix jours à ce rythme. »

L’Etat français dispose pourtant de réserves stratégiques d’environ 145 millions de masques de haute technologie, selon un article publié dans Ouest France. Une situation qui ne manque pas d’interpeller, puisque médecins et personnels hospitaliers dénoncent une pénurie de ces dits masques et réclament un approvisionnement d’urgence depuis plusieurs semaines. Outre-Rhin, des entreprises allemandes produisent également ces masques. Il est donc scandaleux que les gouvernements Macron et Merkel refusent d’apporter une aide conséquente à l’Italie qui est aujourd’hui le principal foyer de contamination en Europe. L’argument selon lequel il faudrait mener la lutte contre le virus en priorité sur le territoire national est à ce titre absurde, alors que l’épidémie se répand désormais partout dans le monde.

Il est donc criminel de laisser l’épidémie continuer à s’étendre en Italie et à tuer les travailleurs italiens en première ligne contre la maladie, sacrifiés sur l’autel de la concurrence entre les Etats impérialistes qui veulent profiter de la crise sanitaire pour satisfaire des logiques politiciennes et s’enrichir. A l’image de la course entre le gouvernement d’Angela Merkel et celui Donald Trump pour s’accaparer le brevet d’un vaccin contre le coronavirus en cours de conception en Thüringe en Allemagne, et pour lequel les premiers essais sont prévus en juillet.

Tout cela montre que si l’épidémie de coronavirus n’est pas le fruit du système capitaliste, la crise sanitaire causée par son expansion est bien le produit des politiques néolibérales de casse de l’hôpital public et de la recherche, et de la concurrence inter-impérialiste. Face à cela, les travailleurs et les couches populaires qui sont envoyés en première ligne contre la maladie ne peuvent compter que sur leur propre mobilisation, comme c’est le cas avec les grèves en Italie et les droits de retraits en France dans l’industrie et les transports en commun, pour tirer les bilans de la situation catastrophique en Italie d’un point de vue sanitaire et mettre en place des mesures à la hauteur de l’urgence. Protéger la santé des travailleurs et travailleuses qui continuent de faire tourner le monde, organiser des campagnes de dépistages massives et gratuites, et porter des revendications telles que la socialisation des brevets scientifiques, le maintien des salaires et l’interdiction de licenciements dans cette période de crise, sous les couleurs de la solidarité internationaliste, en mettant partout à disposition et en commun tous les matériels et personnels pour répondre le plus rapidement possible à cette crise sanitaire.

 
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