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La Izquierda Diario
16 de octobre de 2015 Twitter Faceboock

LGBTI – un B revendiqué
Bisexualité, une sexualité à part entière

Encore très taboue dans notre société, la bisexualité est une sexualité à part entière, et non pas une passade ou une période de recherche d’identité sexuelle comme certains aiment à le penser. Être bisexuel-le, c’est être attiré-e à la fois par des personnes du même genre que soi et du genre « opposé » (on y reviendra). Contrairement aux préjugés véhiculés, les bisexuel-le-s ne sont pas des homosexuel-le-s refoulés ou des hétéros qui s’amusent. Révolution Permanente souhaite revenir sur des stéréotypes et des difficultés liées à une orientation sexuelle qui dérange et bouscule les rôles de genre et les sexualités normées de notre société.

Maria Chevtsova

Link: https://www.revolutionpermanente.fr/Bisexualite-une-sexualite-a-part-entiere

Les stéréotypes ont la vie dure

Concernant la bisexualité, les clichés persistent : « ça te passera avec l’âge », « tu n’as pas encore trouvé ton camp », « les bisexuel-le-s sont infidèles » ou encore « les bisexuel-le-s sont des obsédé-e-s sexuel-le-s »…Quelques-uns de ces clichés sont de même type que ceux diffusés sur les homosexuel-le-s ; ce seraient des individus à la sexualité débordante, et par ce fait dérangeante, qui se « jetteraient sur tout ce qui bouge ». Leur désir, s’adressant aussi bien aux hommes qu’aux femmes, se projetterait de façon irréfrénable sur « l’ensemble » des individus. Mais être bisexuel-le, homosexuel-le, hétérosexuel-le, ne prédestine en rien le type d’activité sexuelle que l’on aura, ni même la fréquence, ni la nature des rapports. Chacun construit sa relation affective et/ou sexuelle avec son partenaire, sa partenaire ou ses partenaires, et l’activité sexuelle des bi-e-s n’est pas plus débridée que celle de leur collègue de bureau hétéro, homo ou bi-e, allez savoir… Être bi-e ne veut pas dire que l’on veut avoir des relations sexuelles ou sentimentales avec n’importe qui mais qu’indifféremment du genre de l’autre, on pourra avoir une relation avec une personne qui nous attire et que l’on attire en retour. La question n’est pas de savoir quelle est l’étendue du choix ou le nombre de relations potentielles, mais bien de pouvoir choisir quelles relations on établit dans un respect mutuel.

Certain-e-s pensent aussi que la bisexualité n’est qu’une « phase » que l’on traverse allant de l’hétérosexualité à l’homosexualité, une sorte d’escale dans un vol transatlantique, ou que les bisexuel-le-s sont tout simplement incapables de « choisir leur camp ». Comme s’il y avait d’un côté les hétéros, de l’autre les homos, et que nous devions tou-te-s trouver notre place dans cette vision binaire de la sexualité. Les bisexuel-le-s le disent haut et fort : quand on est bisexuel, on ne se demande pas si l’on est hétéro ou homo, on est bi-e, un point c’est tout ! Deuxième déconstruction à opérer : la bisexualité n’est pas un entre-deux, mais une sexualité à part entière.

Les médias ont tendance à présenter la bisexualité comme un effet de mode, permettant de caser un « baiser lesbien sexy » dans certains films pour faire « exotique » ou « sensuel ». Ils présentent une pseudo-bisexualité ultra-normée, occasionnelle, « fun », ce qui est le meilleur moyen pour ne pas aborder le sujet en profondeur et ainsi le discréditer. De cette manière, les médias participent à la propagation des clichés les plus communs envers les bisexuel-le-s.

Violences et discriminations : une sexualité qui dérange ?

Aux préjugés vient s’ajouter la discrimination très réelle, et celle que subissent les bisexuel-le-s est double : une première forme de discrimination provient directement des normes imposées à la sexualité dans notre société hétéronormative. On peut parler de biphobie, c’est-à-dire de stigmatisation des bisexuel-le-s (ou des personnes considérées comme telles) se manifestant par des préjugés, le dénigrement voire la négation de l’existence de cette orientation sexuelle, des jugements négatifs, voire des violences physiques à l’encontre des bi-e-s. Le rapport annuel 2015 de SOS Homophobie révèle que la biphobie est ambiante : en 2014, c’est plus d’un bi sur deux (63 %) qui affirme en être victime. De la même manière, on a dû attendre 2015 pour que soit menée une première enquête nationale traitant spécifiquement de la bisexualité, avec un chapitre spécifique sur la biphobie.
Dans ce même rapport, face à la question sur la possibilité d’avoir une relation sexuelle, sentimentale ou de construire une relation de couple avec une personne bie, les résultats témoignent bien des préjugés. Bien que l’exclusion totale ait été minoritaire, on peut constater que plus l’engagement avec un-e bi-e est sérieux et durable, plus il semble y avoir de réticences. 78 % sont pour coucher avec un-e bi-e, 71 % pour concevoir et développer des sentiments pour l’un-e d’eux/elles, et finalement seuls 61 % seraient pour envisager un couple stable. L’idée des personnes bies comme éternellement « insatiables » et donc pas enclines à développer des relations stables s’accompagne ainsi de la « crainte » d’être sans doute trompé.

Mais ça ne s’arrête pas là, puisque les conséquences peuvent être très matérielles. Une enquête de la Rice University du Texas a montré qu’entre 40 et 42 % des personnes bisexuelles vivent sous le seuil de pauvreté aux USA. Une autre étude, cette fois-ci en Écosse, montre que presque la moitié des personnes bies interrogées ont expérimenté des formes de biphobie lorsqu’elles s’adressaient aux services de l’État. La communauté bisexuelle est également devenue plus forte mais demeure toujours invisible sur bien des points. Cela est dû entre autres au fait que la société nous conditionne tous à catégoriser automatiquement tout couple se promenant main dans la main comme homo ou hétéro, en fonction du genre que nous assignons à chaque personne. » Si la bisexualité dérange autant, c’est qu’elle remet en cause un certain nombre de normes que certains voudraient imposer : celle selon laquelle chacun-e serait déterminé-e à n’avoir une relation sexuelle ou affective que de façon monosexuelle (hétérosexuelle ou, éventuellement, homosexuelle), celle imposant aux relations sentimentales et/ou sexuelles le cadre du couple destiné à enfanter, celle consistant à dire qu’il faudrait finir par « se ranger » (dans le couple hétéro ou, à la rigueur, homosexuel) après l’adolescence, comme si nos vies ne pouvaient qu’être figées dans une seule identité, un seul mode de sexualité.

C’est aussi dans ce cadre que se place la remise en cause du terme de « bisexualité » au profit de « pansexualité », qui va au-delà de la binarité des genres, puisqu’une personne pansexuelle est attirée par une personne sans se préoccuper de son genre, qu’il soit binaire, ou pas. Que ce soit dans la binarité de l’homosexualité/hétérosexualité ou du masculin/féminin, il est important de souligner que le genre, les désirs, les identités ne sauraient effectivement être exclusivement réduites à celle-ci, qui, dans son injonction, est source de discriminations et d’invisibilisation. Ce qui est sûr c’est que la biphobie, l’invisibilisation des minorités et la discrimination contre les LGBTI continueront tant que l’on n’ira pas à la racine de cette oppression. Oppression particulièrement marquée par l’injonction à la reproduction du modèle de famille bourgeoise, à l’hétérosexualité, ainsi que par l’imposition d’une seule variante des normes de genre et de sexualité considérées comme valides ou légitimes.

 
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