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La Izquierda Diario
28 de mars de 2020 Twitter Faceboock

« Union nationale » ou imposer notre propre issue par la grève ?
Fermeture des entreprises non-essentielles. Philippe Martinez laisse l’initiative au gouvernement
Mahdi Adi

Mercredi, Macron imposait par ordonnance une nouvelle entaille de premier ordre dans le code du travail ouvrant la voie à la semaine de 60h. Deux jours après, les directions syndicales ont répondu par la positive au rendez-vous proposé par Macron et le MEDEF. Plutôt que de demander la liste des entreprises non-essentielles au gouvernement, ne s’agirait-il pas d’opposer un véritable plan de bataille du monde du travail pour imposer la fermeture des activités non-essentielles ?

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Ce vendredi, alors que la pandémie de coronavirus n’en finit plus de s’étendre en France avec 29 155 ayant été testés positifs au virus et 1 696 morts à l’hôpital – sans compter les personnes âgées non recensées dans les EHPAD –, Emmanuel Macron a réuni par téléphones directions syndicales (CFDT, CGT, Force ouvrière, CFE-CGC, Unsa ) et organisations patronales (Medef, CPME, U2P, FNSEA ), pour « faire le point avec les salariés et les chefs d’entreprise sur les mesures de protection au travail contre le coronavirus et de faire connaître à l’ensemble des acteurs les mesures et dispositifs d’aide mis en place par le gouvernement pour les entreprises et les salariés dans le contexte de la crise » selon l’Elysée.

Pompier pyromane : quand Macron veut résoudre la crise sanitaire causée par les politiques néolibérales

L’occasion pour le gouvernement d’essayer d’éteindre l’incendie alors que le patronat s’inquiète autant du ralentissement de l’activité économique, en chute de 35% selon l’Insee par suite de la propagation de l’épidémie, que du phénomène de contestation dans les entreprises. En effet, depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux secteurs connaissent un nombre important de droits de retrait exercés par les salariés face au risque élevé de contamination au coronavirus, notamment dans l’industrie. Une situation explosive qui fait désormais poindre de potentiels mouvements de grève à l’image de celle qui a eu lieu en Italie ce mercredi, ou encore avec les préavis de grève déposés par la CGT Fonction Publique et Sud Santé Sociaux à partir du 31 mars en France.

Et pour cause, ce sont aujourd’hui les travailleurs qui sont exposés à la double peine. D’abord obligés de travailler sans protection sanitaire que cela soit dans la santé ou dans des secteurs non essentiels à la lutte contre l’épidémie comme l’automobile ou l’aéronautique, c’est également aux travailleurs que la macronie veut faire payer la crise. Déjà frappés de plein fouet par les licenciements et le chômage technique, le gouvernement a profité de la crise sanitaire pour augmenter le temps de travail jusqu’à 60h par semaine et 12h par jour dans « les secteurs d’activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale », et permettre aux entreprises d’imposer aux salariés de poser jusqu’à 16 jours de repos selon le bon vouloir de l’employeur. Le tout en légiférant par ordonnance après le vote au parlement de la loi d’urgence sanitaire.

Face à la crise, demander plus de « dialogue social » ou construire le rapport de force par la grève ? La direction de la CGT à l’épreuve des sirènes de « l’union nationale »

Alors que ce sont les politiques néo-libérales menées par Macron et consorts contre les droits des travailleurs et de casse des services publics de la santé et de la recherche, qui ont mené à la catastrophe actuelle, il n’y a aucune confiance à accorder au gouvernement et au patronat pour résoudre la crise. Au contraire, il s’agit d’abord d’exiger le retrait pur et simple des ordonnances anti-sociales et des attaques répressives contre les droits démocratiques mises en place avec le confinement, plutôt que chercher à rétablir le « dialogue social » afin d’obtenir des « garanties » uniquement pour que les mesures d’augmentation du temps de travail hebdomadaire soient restreintes « sur une période la plus limitée possible » comme l’a demandé le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger dans une lettre adressée ce jeudi à la ministre du Travail, Muriel Pénicaud.

Pourtant face à une crise sanitaire, économique et sociale historique, la direction confédérale de la CGT a signé un communiqué commun le 19 mai dernier avec les autres confédérations syndicales (CFDT, FO, CFE-CGC, CFTC) et les organisations patronales (MEDEF, CPME, U2P ) affirmant « le rôle essentiel du dialogue social et de la négociation collective ». De son côté la direction de FO, également signataire de la déclaration, a soutenu la tentative du patronat pour imposer la reprise du travail dans la métallurgie en signant un communiqué commun avec l’UIMM (Union des Industries et des métiers de la métallurgie, organisation patronale membre du MEDEF), la CFDT et la CFE-CGC.

Des organisations constitutives de la CGT (dont l’UD 13, 94 et la Fédération des Services Publics) n’ont pas tardé à condamner et dénoncer la signature par leur confédération de la déclaration commune avec le MEDEF comme « un coup de poignard dans le dos des militants » derrière « l’union sacrée convoquée par Macron », en rejetant le « dialogue social, pendant que les patrons sont prêts à faire mourir des travailleurs plutôt qu’à renoncer à leurs marges ». De même, la Fédération CGT des Services Publics ainsi que SUD Santé Sociaux ont déposé un préavis de grève à partir du 31 mars qui « dénonce les choix du gouvernement » pour gérer la crise sanitaire à l’instar des mesures anti-sociales et anti-démocratiques prise dans le cadre de la loi « d’urgence sanitaire ». Un préavis qualifié « d’inopportun » d’abord par le gouvernement, puis par Emmanuel Macron lui-même, ce à quoi Philippe Martinez aurait répondu que l’appel venait d’un secteur en particulier et qu’il intervenait après l’échec de plusieurs alertes sanitaires émanant des fonctionnaires territoriaux, une réponse sur un ton « modéré » comme le remarque le journal libéral L’Opinion.

Pourtant ces initiatives démontrent qu’à la base, les travailleurs ne sont pas prêts à accepter de payer la crise sanitaire et sociale au profit du patronat, à l’instar des nombreux droits de retrait exercés par les salariés dans l’industrie et les services. Il s’agirait donc de les généraliser contre la volonté du gouvernement qui de concert avec le patronat a appelé plus ou moins ouvertement les salariés des entreprises non-essentielles à travailler, en proposant au contraire véritable un plan d’ensemble contre les patrons qui imposent de continuer ou de reprendre le travail en exposant les salariés et la population aux risques de contamination.

Pour ne pas laisser le gouvernement faire payer la crise aux travailleurs, imposer la fermeture des entreprises non-essentielles

A la sortie de la réunion de ce vendredi, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez a présenté comme une victoire « un projet de loi incitatif pour les entreprises qui ont reçu de l’aide et qui ne pourront pas verser des dividendes » que le ministre de l’Economie, Bruno Lemaire, devait présenter au Conseil des Ministres en fin d’après-midi. Si la mesure est déjà presque convenue, du fait même que les entreprises anticipent des résultats catastrophique (un certain nombre d’entreprise ont déjà annulé le versement de leur dividende), non seulement la loi reste strictement « incitative » mais plus encore, ce sont les grandes multinationales qui devraient être taxées massivement pour payer la crise sanitaire. Aujourd’hui, c’est tout le contraire qu’il se passe. Des milliards de cadeaux au patronat, et rien pour les travailleurs comme l’a montré la loi de financement rectificative votée unanimement à l’Assemblée Nationale.

L’Elysée s’est gargarisé du fait que « les participants auraient exprimé « un satisfecit général sur les mesures massives mises en place concernant le pouvoir d’achat, grâce au chômage partiel et à l’extension des droits au chômage, et le plan économique de soutien » alors même qu’aucune de ces mesures n’est garantie aujourd’hui. Pas même le chômage partiel qui reste sujet à une attribution sélective, des chefs d’entreprise interrogés par La Tribune expliquant que pour résorber cette charge financière, le services régionaux du ministère du Travail (Dirrecte), « sur instruction, refusent un maximum de dossier » aux entreprises qui souhaitent bénéficier du chômage partiel.

Il n’y a donc aucune confiance à accorder au gouvernement tant sur le plan de la crise économique que de la crise sanitaire. Car si dans une interview donnée à L’Humanité, le numéro un de la CGT affirmait au sujet de la fermeture des entreprises non essentielles, préconisée par le corps médical pour éviter la propagation de l’épidémie, « il faut stopper d’urgence toutes les activités non essentielles à la survie du pays. C’est ce que nous réclamons au gouvernement depuis des jours », il faut bien se rendre à l’évidence : le gouvernement n’a aucune intention d’imposer cet arrêt. Il préfère sacrifier la vie des travailleurs sur l’autel du profit. Par ailleurs qui mieux que les travailleurs sont en mesure de déterminer les activités essentielles des non essentielles ?

Plutôt que servir de caution ouvrière à « l’union nationale » convoquée par le gouvernement, il s’agit donc de construire le rapport de force pour exiger la fermeture des entreprises non-essentielles, l’interdiction des licenciements, l’embauche des chômeurs dans les secteurs en pénurie de personnels comme la santé, la mise en place de mesures sanitaires contre l’épidémie de Covid-19, la nationalisation des cliniques privées et de l’industrie pharmaceutique sous contrôle des travailleurs et usagers pour produire en urgence des masques, du gel hydroalcoolique pour les salariés, et des tests de dépistage accessibles à tous, et la mise en place de commissions d’hygiène et de sécurité indépendante de l’Etat et des patrons, composées de spécialistes de santé et de travailleurs pour décider des mesures sanitaires à mettre en place, et déterminer quelle activité est essentielle, et lesquelles peuvent être suspendues pour résoudre la crise.

 
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