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La Izquierda Diario
4 de avril de 2020 Twitter Faceboock

Femmes et télétravail
“Maman est en réunion” : double journée de travail à la maison pendant le confinement
Celeste Murillo

Le télétravail, imposé à de nombreu.ses.x travailleur.ses dans cette période de confinement, met en lumière de nombreux problèmes liés à la combinaison de la journée de travail et du travail du care non rémunéré, réalisée majoritairement par les femmes.

Link: https://www.revolutionpermanente.fr/Maman-est-en-reunion-double-journee-de-travail-a-la-maison

Traduction de la légende :
“ - Maman est en réunion. Interdit de rentrer. La réponse à ta question peut-être : Dans le tiroir ; Mets-le dans la machine à laver ; Non ; Dans ta chambre ; Je ne sais pas ce qu’on va dîner ; Mange un fruit”.

Traduction de l’article original paru en espagnol dans La Izquierda Diario de Homa de la Bahía.

Crédits photos : La Izquierda Diario

Cette image, qui a fait le tour des réseaux sociaux en Argentine et qui a inspiré de nombreux “mêmes”, illustre la réalité que vivent aujourd’hui de nombreuses femmes en télé-travail durant le confinement. Toutes les femmes ne sont cependant pas dans cette situation, beaucoup travaillent dans des secteurs essentiels, comme le secteur soignant, d’autres sont précaires, travaillent de manière informelle, sans les moyens suffisants de protection sanitaire et hygiénique, ou sont au chômage.

Nous pourrions penser que le télétravail est agréable, qu’il offre des conditions de travail au calme, avec l’avantage de la propreté de chez soi et une haute-technologie. Mais la réalité est plus proche de celle d’une enseignante qui fait des cours virtuels, d’une employée administrative qui se démène avec Excel ou d’une opératrice d’un call center qui essaye de recevoir un appel dans une pièce partagée et désordonnée, avec une mauvaise connexion et entourée de la vie familiale. Famille et travail s’entremêlent ainsi d’autant plus avec le confinement.

Le télétravail a déjà ouvert plusieurs débats autour des risques d’hyper-contrôle exercé par les entreprises sur les travailleurs par le biais des outils informatiques, des risques de non-protection des données des travailleurs qui “ouvrent” leurs dispositifs pour travailler, mais aussi autour des limites floues de la journée de travail. Car avec la facilité de communication, la force de travail est mise à disposition 7 jours sur 7, 24 heures par jour. Quelles sont les conséquences du télétravail chez les femmes ?

Journées surchargées pour les travailleuses

En ce qui concerne les femmes travailleuses, surtout pour les mères isolées, les risques cités ci-dessus se combinent avec le travail du care qui se multiplie en période de confinement. Si les enfants ne vont pas à l’école, qui les garde ? Qui les aide à suivre les cours à distance ? Qui leur donne à manger ? Même s’il est possible que le confinement ait modifié le fonctionnement de certains foyers, les femmes sont généralement celles qui consacrent le double de travail à ces tâches, indispensables et non rémunérées. Selon une étude de l’INSEE, les femmes passent, en moyenne, deux fois plus de temps que les hommes à faire le ménage et à s’occuper des enfants à la maison. À cela s’ajoute le fait que, puisque les femmes occupent plus de temps dans le travail du care non rémunéré, elles ont moins d’heures disponibles pour avoir un emploi rémunéré. Par conséquent les femmes sont les plus touchées par le emplois à temps partiel ou avec une flexibilité horaire.

Durant le confinement, cette réalité se traduit par une surcharge de travail et des journées qui semblent interminables. De nombreuses femmes travaillent en même temps qu’elles s’occupent de leurs enfants ou des personnes âgées. Ceci n’est pas dû au confinement, mais au rôle assigné aux femmes dans les sociétés capitalistes, même si le patriarcat date depuis bien avant. Elles sont chargées des tâches ménagères et du soin des enfants, comme une extension de leur capacité biologique de reproduction et qui n’a pourtant rien à voir avec ces tâches assignées.

Cette inégalité ne se limite pas au foyer. Les rôles, qui reposent sur des préjugés patriarcaux, se reproduisent dans le marché du travail. Ceci s’alimente et se combine avec d’autres phénomènes : depuis l’inégalité salariale jusqu’aux “plafonds de verre”. Les femmes sont sur-représentées dans les emplois liés aux activités du ménage et du care. En France, selon une étude de DARES sur les métiers du nettoyage, les femmes occupent 8 emplois sur 10 dans le secteur du nettoyage et pour les cas des aides à domicile et des employés de maison, plus du 95%. De même selon l’UNESCO, dans l’enseignement primaire en France 83% des enseignants sont des femmes. On retrouve des scénarios similaires dans les services sociaux et dans les secteurs hospitaliers par exemple, plus de 90% des aides-soignants sont des femmes.

Pour aller plus loin : Crise du coronavirus : plus de risques pour les femmes

La non-disponibilité des services qui socialisent une partie du travail du care ou travail reproductif, comme les écoles, les laveries ou les cantines entre autres, montrent la réalité que vivent des millions de femmes qui voient leurs tâches multipliées par le confinement mais aussi par la crise économique à venir. Comme le montre Lucía Ortega dans un article en espagnol de La Izquierda Diario, “dans un contexte de baisse des revenus, les tâches ménagères tendent à s’intensifier, par la nécessité de remplacer des produits obtenus dans le marché par d’autres produits à l’intérieur du foyer. Comme par exemple l’élaboration d’aliments, le soin des personnes âgées et des enfants ou l’embauche de personnel du nettoyage. Ce qui se combine, en plus, avec la casse des services publics de l’État comme la santé et l’éducation”. Ces problèmes font, depuis longtemps, partie des revendications et des débats au sein du féminisme. Quelle est la place du travail reproductif dans les sociétés organisées autour de l’exploitation du travail salarié et des profits des capitalistes ? La mobilisation des femmes a traduit certains de ces débats dans des slogans comme “Ce n’est pas de l’amour, c’est du travail non rémunéré”, en faisant référence aux préjugés patriarcaux (que le capitalisme a bien su utiliser à son avantage). Visibiliser le travail reproductif non rémunéré, féminisé, fait partie de la critique des inégalités naturalisées dans une société inégale par définition.

 
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