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8 de avril de 2020 Twitter Faceboock

Femmes et précarité
Maintien du salaire pour la garde d’enfants : la promesse non tenue du gouvernement
Tristane Chalaise

Le mercredi 18 mars, la ministre du Travail avait assuré que le parent qui assurerait la garde des enfants pendant le confinement conserverait 90 % de son salaire. Trois semaines plus tard, de nombreux salariés et salariées ont découvert qu’ils ne toucheraient en réalité que la moitié de leur salaire au mois de mars. Un cruel parjure, qui se transforme en une attaque violente contre les mères célibataires : elles représentent aujourd’hui l’écrasante majorité des parents seuls.

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Crédit photo : Thierry Creux, OUEST-FRANCE

Interrogée sur Radio Classique deux jours après le début du confinement et la fermeture des crèches et des écoles insérer le lien , Muriel Pénicaud, ministre du Travail, avait déclaré pleine d’assurance, aux salarié.e.s avec enfant : « Si vous êtes un des deux parents qui gardez votre enfant, vous êtes en arrêt maladie sans certificat médical et selon les conventions collectives […] vous toucherez 90% de votre salaire ». Or, il s’avère que cette promesse comportait des conditions que la ministre a oublié, ou n’a pas cru bon, de mentionner.
 
C’est ce que révèlent les témoignages publiés aujourd’hui sur le site d’information francetvinfo, qui, dans un article, dénonce le sentiment de trahison vécu par des mères célibataires qui se voient privées de la moitié de leurs salaires du mois de mars En effet, si la loi prévoit le maintien du salaire pour le parent devant assurer la garde d’enfant, cette rémunération n’est assurée qu’à 50 % par l’Etat, via la Sécurité Sociale. Le pourcentage restant de la rémunération est définie dans les conventions collectives négociées en amont, et reste donc à la charge – et au bon vouloir – de l’employeur… Le montant du salaire perçu, ainsi que la durée de la rémunération, est ainsi variable selon les secteurs et les entreprises. Il peut représenter de la totalité du salaire habituel à seulement la moitié, selon la part allouée par l’employeur ! Cette situation n’était d’ailleurs pas ignorée par la ministre, qui, déjà, dans son interview sur Radio Classique, expliquait du bout des lèvres que les employeurs devraient « payer la partie complémentaire »… Sans préciser si, et comment, le gouvernement comptait les obliger à verser les 40 % nécessaires pour répondre à la promesse de la ministre !
 
Pire encore : l’article L1226-1 du Code du travail réserve le versement d’une indemnité complémentaire par l’employeur à « tout salarié ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise ». En clair, il est parfaitement légal pour un employeur de ne pas verser de part complémentaire aux salarié.e.s s’ils travaillent depuis moins d’un an dans l’entreprise, quelles que soient les promesses de Mme Penicaud. Le ministère du travail, interrogé par France Info, a cru bon de réagir en précisant que l’ordonnance n°2020-322, prise dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, prévoit que l’indemnité complémentaire sera désormais versée aux salariés « sans que la condition d’ancienneté (...) ne soit requise ». Toutefois, cette ordonnance, parue au Journal officiel le 26 mars, n’est pas rétroactive, ce qui signifie que la rémunération du mois de mars ne sera pas rectifié pour les salarié.e.s concernés. Alors qu’on leur avait promis le maintien de 90 % de leur salaires, de nombreux parents se retrouvent ainsi à n’en avoir perçu que la moitié, et ne verrons jamais la couleur des centaines d’euros perdus !

Les femmes premières touchée par ce mensonge

 
Une fois de plus, le gouvernement montre qu’il fait le choix de défendre les intérêts des entreprises, au détriment des vies des travailleuses et travailleurs. Le témoignage de Chiara, sur le site de francetvinfo, souligne le dilemme qui s’impose aujourd’hui aux mères seules qui ne peuvent pas vivre avec un demi-salaire : risquer sa vie et celle de sa famille en s’exposant davantage à la maladie, ou rester chez soi et ne pas pouvoir payer ses factures ? « Qu’est-ce que je dois faire, s’insurge cette mère de 42 ans, qui élève seule ses enfants de 6, 15 et 18 ans. Reprendre mon travail, prendre des risques et faire garder ma fille par je-sais-pas-qui pour pouvoir payer mes factures ? Ou rester à la maison avec seulement la moitié de mon salaire ? On nous met le couteau sous la gorge. C’est aberrant.  »
 
Au-delà de l’injonction, pour tous, à retourner au travail, la question du maintien de salaire pour garde d’enfant constitue une attaque envers les femmes, en en particulier les plus précaires, qui sont les plus affectées en raison de leurs faibles revenus, mais aussi par la clause des « un an d’ancienneté ». C’est ce que souligne, le choix fait par France Info de donner la parole à des mères célibataire.
 
Selon les chiffres publiés par l’INED (Institut National d’Etudes Démographiques) en 2017, dans 84 % des familles monoparentales, les enfants résident principalement avec leur mère. Les femmes représentent ainsi une majorité écrasante des parents seuls, et, bien qu’aucun chiffre officiel n’ait encore été publié, on peut d’ores et déjà estimer qu’elles sont nombreuses à avoir dû demander un arrêt de travail pour garder leur enfant suite à la fermeture des crèches et des écoles. Alors que les femmes ont déjà, à travail égal, un salaire moyen inférieur de 18 % à celui des hommes, certaines femmes ne vont toucher que de 90 % à 50 % de ces salaires déjà inférieurs ! La gestion gouvernementale de l’épidémie est ainsi en train de renforcer les inégalités et la précarité liée au genre pour ces mères seules, mais aussi pour toutes celles qui ont dû cesser de travailler pour s’occuper de leurs enfants.

 
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