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La Izquierda Diario
14 de avril de 2020 Twitter Faceboock

Confinement, écoles, masques, tests… mais quelle confiance avoir en Macron ?
Damien Bernard

Macron a cherché à combiner humilité, « vérité » mais surtout perspective en vue d’un déconfinement progressif. Comment ? Les termes restent flous. Ce que l’on sait cependant, c’est que la réouverture des écoles maternelles et élémentaires est d’ores et déjà annoncée le 11 mai. Lorsque l’on connait les difficultés à faire appliquer dans les écoles les gestes barrières. S’agit-il vraiment de combattre… les « inégalités » ou d’ouvrir la reprise de l’activité à marche forcée ?

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Pour son quatrième discours, Emmanuel Macron a cherché à adresser un discours de « vérité ». Si l’on peut reconnaitre une chose, c’est que pour la première fois, le président de la République a avoué ce que nous savions déjà tous : l’État n’était «  à l’évidence pas assez  » préparé pour affronter l’épidémie. Bien que plus que tardive, on ne peut réfuter cette première vérité. Celle-ci sera cependant suivie d’une série de nouveaux mensonges et d’omissions.

« Nous avons manqué de blouses, de gants, de gels, nous n’avons pas pu distribuer autant de masques que nous aurions voulu  », a-t-il donc fini par avouer après plusieurs semaines de déni. Une demi-vérité cependant puisqu’elle sert à passer sous silence un autre scandale : celui de l’état catastrophique du système de santé. «  Les hôpitaux français ont réussi à soigner tous ceux qui s’y présentaient  », a-t-il affirmé avec assurance. Comme une façon de dire que le système de santé n’a pas été mis en défaut mais aussi de jeter aux oubliettes le fameux plan d’investissements massifs dans l’hôpital public promis dans une précédente intervention. Toujours pas de détails sur ce plan. Enfin si ce dernier s’avérerait comme l’affirme Médiapart : un plan qui «  vise à accélérer la marchandisation de la santé et sa privatisation rampante  ». Une vérité pour passer sous silence la casse de l’hôpital public dont une partie non négligeable s’est effectuée sous son mandat.

Un autre mensonge de Macron, celui sur le manque de masques. En effet, durant son discours, le président a tenté de justifier une nouvelle fois que l’État a fait de son mieux lorsqu’il avait été mis au courant des dysfonctionnements. «  Dès l’instant où ces problèmes ont été identifiés, nous nous sommes mobilisés pour produire et acquérir le matériel nécessaire. Je mesure pleinement que lorsqu’on est au front, une pénurie mondiale empêche les livraisons », a-t-il pointé. Au sujet des masques, cette affirmation ne passe pas l’épreuve des faits tant l’exécutif n’a eu cesse de nier leur efficacité semaine après semaine. D’abord, qualifié de « contre-productif », d’inutile, d’une efficacité pas « prouvée médicalement » avant la volte-face du gouvernement que retrace le 20 minutes. Nouveau mensonge par omission donc.

Déconfinement des écoles contre « les inégalités » ou faire redémarrer l’activité à marche forcée ?

Seule mesure réellement concrète d’Emmanuel Macron : « à partir du 11 mai, nous rouvrirons progressivement les crèches, les écoles, collèges et lycées= » a-t-il lancé ouvrant la voie au déconfinement progressif, terme qu’il n’a encore une fois pas cherché à prononcer. C’est une « priorité » pour Macron, « car la situation actuelle creuse les inégalités », continue-t-il. Un discours contre les « inégalités » aux antipodes de ce qui fonde le macronisme : une politique au service des riches, de la suppression de l’ISF et des « premiers de cordées ». Après une moitié de quinquennat contre le monde du travail et la jeunesse, les mensonges permanent, on peut légitimement douter de cette présupposée lutte « contre les inégalités ».

Ce qui nous fait venir au fond même de la réouverture des écoles annoncée en grande pompe sans que nous puissions prédire de l’évolution de l’épidémie car comme l’affirme pourtant Macron : « le virus garde beaucoup de mystères  ». Y a-t-il une raison strictement sanitaire pour afficher d’ores et déjà la réouverture des écoles ? Ou est-ce que cela répond à la volonté de satisfaire à l’exigence formulée par le MEDEF de faire en sorte que l’activité reparte ?

En effet, derrière l’ouverture des écoles maternelles et élémentaires se niche aussi le risque sanitaire. Pourquoi rouvrir les écoles mais pas les universités ? Et pourquoi en mai ? La mesure de précaution, quand bien même les enfants seraient selon certaines études, moins à risque et moins contagieux (relativement puisqu’il y a des morts), indiquerait la prudence la plus totale. En effet, Elisabeth Bouvet, infectiologue à l’hôpital Bichat à Paris, expliquait à Europe 1 : «  Il paraîtrait, à mon sens, assez logique que la rentrée ne se passe que après l’été, c’est-à-dire en septembre  », a-t-elle expliqué sur les modalités du déconfinement. La réouverture des écoles dans ces conditions évacue la question du foyer de contamination qu’elles représentent en termes d’interactions sociales et des conséquences sur les transports.

Un avis partagé par Jean-Paul Hamon, médecin généraliste, président de la Fédération des Médecins de France, qui a déclaré à France Info suite à la déclaration de Macron que la réouverture des établissements scolaires le 11 mai « fait courir un risque inutile  » car les enfants « risquent de ramener le virus à la maison  ».

Loin d’être dirigé par la précaution, Macron cherche à jouer sur les deux tableaux : résoudre une crise de légitimité importante tout en répondant aux préoccupations du patronat qui vise la reprise de l’activité économique à marche forcée. C’est ce que note Cécile Cornudet : «  Crise sanitaire (« La santé reste notre priorité »), crise économique, le chef de l’État tente de concilier les deux. Les écoles maternelles et élémentaires vont donc rouvrir le 11 mai, affirme Emmanuel Macron, puisque c’est la condition pour que l’activité reparte. Dans un moment marqué par les incertitudes, il garde une prudence verbale (« Ce sera progressif », « La situation sera évaluée ») mais tente de baliser le chemin de sortie.  »

De la sorte, Emmanuel Macron, loin d’avoir rompu avec son quinquennat cherche à remettre en ordre de marche une "union nationale" qui bat de l’aile. D’abord en ouvrant la voix a la suppression de sa réforme des retraites en échange d’un pacte Républicain, comme une manière d’acquérir de nouveau la légitimité pour rouvrir le volet des attaques sociales avancée par le MEDEF et … reprise par le gouvernement lui-même. Cela fait partie des omissions, celles qui fâchent : en effet, la secrétaire d’État à l’Économie a fait sienne la nécessité de mettre "les bouchées doubles" à la fin du confinement en réponse aux propos du MEDEF qui appelait à remettre en question les congés, les RTT et le temps de travail. En somme, il ne peut être question d’aucune confiance en Macron qui, il faut le rappeler, faisait déjà son méa culpa en décembre 2018 pour tenter de canaliser la colère des Gilets jaunes avant d’ouvrir la voix à une répression sans précédent, combinée à une attaque sociale historique contre la réforme des retraites.

Si le gouvernement a été forcé à opérer un tel grand écart entre son discours et ce qu’il prépare au service du MEDEF, c’est essentiellement du fait de l’affaiblissement sans précédent du macronisme. Dans un contexte de défiance aigüe vis à vis du personnel politique, la formation présidentielle est toujours plus questionnée sur sa gestion catastrophique de la crise sanitaire à laquelle s’ajoute la pression de la crise économique, qui pourrait être l’ingrédient décisif d’un cocktail social explosif. Une position précaire, alimentée par la contradiction selon laquelle le gouvernement appelle à un confinement strict et autoritaire tout en poussant les salariés des secteurs non essentiels à reprendre le travail. Si Macron s’adresse aux « derniers de cordées », c’est en définitive car « le jour d’après » inquiète les classes dominantes.

Crédit photo : Photo Ludovic MARIN/AFP

 
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