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La Izquierda Diario
28 de octobre de 2015 Twitter Faceboock

L’accord entre la CFDT et Hirsch mettra-t-il un terme à la lutte des hospitaliers parisiens ?
La CFDT à l’AP-HP. Chronique d’une trahison annoncée
Daniela Cobet

On ne peut pas vraiment dire qu’il s’agisse d’une surprise. La direction générale de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) et la CFDT avaient annoncé dès l’ouverture du processus de négociation fin septembre qu’après une ronde de réunions, un accord serait présenté fin octobre. L’occasion impose de se poser un certain nombre de questions sur le bilan et les perspectives d’un mouvement historique.

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Que la date tombe au milieu des vacances de la Toussaint ce n’est surement pas un hasard, mais encore une fois cela avait été dit. La trahison de la CFDT sous la houlette de Laurent Berger, qui aurait selon certains mis un coup de pression au syndicat de l’AP-HP, est ainsi accomplie. Les autres syndicats dénoncent cet accord et appellent à poursuivre le mouvement, sans pour autant annoncer pour l’instant la moindre action. Une fois de plus, on se retrouve face à une contradiction entre la parole et les actes.

Mais que dit l’accord signé ?

Derrière un effort évident à montrer que la direction de l’AP-HP aurait cédé sur certains points et donc que la CFDT aurait obtenu des choses, c’est en réalité l’essentiel du projet de réorganisation du temps de travail, dit plan Hirsch, qui est validé.

Le passage en grande équipe, avec l’obligation pour les personnels d’avoir des horaires de travail changeants est ainsi acté, ainsi que la disparition des journées de travail à 7h50, qui fait que 12.000 agents perdraient cinq journées de RTT par an. Les journées non travaillées dites de « forfait protocole » sont également supprimées, de même que la journée de la fête des mères.

En guise de « concession », la pause déjeuner serait maintenue dans le temps de travail et le passage en 7h30 pour les agents travaillant aujourd’hui sur des journées de 7h36 serait fait au « volontariat ». Elle serait par contre obligatoire pour les nouveaux agents, ce qui montre bien qu’on va vers un régime de généralisation des journées de 7h30 avec la perte de trois jours de RTT qui va avec. Il est clair de plus que dans le cadre de cette généralisation, les agents subiront une pression de leur hiérarchie pour adopter le nouveau schéma horaire, ce qui rend le caractère « volontaire » de la chose purement illusoire.

Quant au plus grand contrôle des dépassements horaires qui font que les personnels hospitaliers travaillent d’ores et déjà bien plus que ce pourquoi ils sont payés (car lorsqu’on est en train de soigner un malade on ne va pas le laisser tomber au milieu du soin), cela reste de l’ordre des déclarations d’intentions. De plus les dépassements pouvant être pris en compte seraient limités à 18 heures annuelles, ce qui fait moins de six minutes par jour, et restreints aux agents qui accepteraient de passer en 7h30.

Tout ce dispositif se ferait avec zéro embauche, ce qui entérinerait la dégradation des conditions de soins et la surcharge de travail qui pèse déjà sur le personnel hospitalier. Par contre, côté plan d’économies, Hirsch ferait bon élève et garantirait l’essentiel de ce qui lui était demandé.

Que vaut l’accord Hirsch-CFDT ?

La CFDT ne représentant que 15% du personnel de l’AP-HP, l’accord obtenu reste largement minoritaire, non seulement à l’échelle des agents qui restent hostiles à l’application du plan Hirsch, mais aussi à l’échelle des organisations syndicales. Il n’y a cependant pas d’obligation légale pour la direction générale de l’AP-HP à obtenir un accord majoritaire pour appliquer son projet de réorganisation du temps de travail.

Si Martin Hirsch a été poussé au mois de juin à changer de tactique et à prôner la recherche d’un accord majoritaire, c’est parce que la force du mouvement lui imposait un certain rapport de forces qui risquait de rendre difficile l’application de son plan dans la pratique. C’est aussi parce que la communication actuelle du gouvernement qui essaie de valoriser sa politique de « dialogue social » contrastait avec la truculence avec laquelle Martin Hirsch tentait d’imposer les choses à des milliers d’agents en colère : une contradiction qui avait à l’époque failli faire tomber la tête du directeur fraîchement nommé de l’AP-HP.

Plus qu’un problème d’ordre légal, le fait de savoir si le projet de réorganisation du temps de travail pourra s’appliquer ou pas a toujours été et reste encore aujourd’hui une question de rapport de forces.

Il est passé où le « rapport de forces » ?

A la mi-juin les hospitaliers étaient 15 000 à défiler dans les rues de Paris, et ce malgré le fait que de nombreux agents grévistes avaient été réquisitionnés. Pour un secteur qui compte environ 75 000 personnels, c’était juste un chiffre énorme. Après, il y a eu le cafouillage du 17 juin lorsque des organisations syndicales ont accepté de négocier en secret avec Hirsch, pour quitter quelques jours après la table de négociations sous la pression de la base. Il y a eu également la pause estivale qui a marqué un coup d’arrêt considérable à la mobilisation.

Et pourtant, le 17 septembre, le personnel hospitalier a montré dans la rue qu’il avait encore des ressources et l’envie de se battre. Mais depuis, aucun appel à des manifestations ou actions centralisées et avec un minimum de préparation n’a été lancé par l’intersyndicale. La journée du 1er octobre, pourtant prévue depuis fort longtemps a ainsi été organisée du jour au lendemain et dans la division. Lors des journées d’actions locales il n’y a guère que quelques équipes syndicales locales qui ont joué le jeu, la plupart étant alors restées passives. Et, au fur et à mesure, les assemblées générales se tenaient de moins en moins.

Des tentatives ont été faites à partir de la base, que ce soit en inter-établissement à partir d’un appel de l’assemblée générale de l’Hôpital Beaujon le 8 octobre, que ce soit localement comme à l’hôpital Saint-Louis. Mais dans un tel contexte, il était difficile de maintenir la pression et de relancer le mouvement. Et pourtant on savait tous depuis fin septembre que la CFDT négociait avec Martin Hirsch et qu’un accord tomberait fin octobre. L’impasse actuelle a dans ce sens été bel et bien préparée. Cela veut-il dire que l’affaire est désormais définitivement pliée ? Pas forcément…

Et maintenant ?

Face à la signature de l’accord Hirsch-CFDT, les organisations syndicales qui sont restées organisées en intersyndicale ont quasiment toutes exprimées leur désaccord. Sud et CGT appellent dans leurs communiqués à poursuivre la mobilisation. Au vu de la gravité de la situation et du risque réel d’application de cet accord, on ne peut plus se contenter de simples paroles.

Si dès la semaine prochaine, des actions fortes ne sont pas proposées à l’ensemble du personnel de façon à relancer véritablement le mouvement et à démontrer dans la rue que l’accord n’est pas représentatif de ce que pensent les agents de l’AP-HP, l’affaire sera vite pliée. La balle est donc en grande partie dans les mains des organisations syndicales refusant l’accord pour appeler et construire des actions en ce sens.

Si elles ne le font pas, il ne faudra pas se plaindre du fait que des hospitaliers essaient de reprendre les choses en main eux-mêmes, en se coordonnant de façon autonome avec toutes les équipes syndicales qui entendent poursuivre le combat pour le retrait définitif du Plan Hirsch, y compris dans sa dernière mouture, négociée avec les traîtres de la CFDT.

 
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