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La Izquierda Diario
22 de mai de 2020 Twitter Faceboock

Violences policières
Lumière(s). Des milliers de personnes défilent à Argenteuil pour exiger justice pour Sabri
Gabriel Ichen

Ce jeudi 21 mai, plusieurs milliers de personnes ont défilé pour rendre hommage et demander justice pour Sabri, mort après avoir croisé un véhicule de la BAC. Cette marche blanche constitue le rassemblement le plus important depuis le début du déconfinement.

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Crédit Photo : AFP / THOMAS COEX

La journée d’hier a été marquée par une mobilisation sans précédent depuis le début du déconfinement. Quelques heures seulement après le rassemblement de plusieurs centaines de personnes devant l’hôpital Robert Debré à Paris, ce sont plusieurs milliers de personnes qui se sont réunies à Argenteuil pour marcher en hommage au jeune Sabri et réclamer vérité et justice.

« Lumière[s] pour Sabri ». C’est le slogan inscrit sur les pancartes et floqués sur les t-shirts de nombreux manifestants présents. Choisi par les organisateurs de la marche, c’est aussi le nom du collectif fondé pour mettre la lumière sur la mort du jeune homme de 18 ans.

Mettre la lumière, c’est bien ce qui est en jeu aujourd’hui autour de la disparition de Sabri, mort à la suite d’un accident de moto dans lequel la police est probablement impliquée. Comme expliqué dans un article de Médiapart co-écrit avec le Bondy Blog, les circonstances de la mort de Sabri restent encore floues. Ce que l’on sait, c’est qu’un véhicule de la Brigade anti-criminalité (BAC) d’Ermont était présent au moment des faits. Selon le parquet de Pontoise il n’y aurait pas eu de choc entre la voiture de police et la moto. Les policiers auraient vu une moto se déporter vers le trottoir pour tenter d’éviter leur véhicule. Mais, les avocates de la famille de Sabri ont montré qu’il y avait des incohérences dans les faits rapportés par les policiers et dans la conduite de l’enquête. La scène du drame a été nettoyée et des preuves ont pu être perdues. Il est ainsi probable qu’une tentative d’interpellation ou une course-poursuite ait pu avoir lieu, occasionnant l’accident de moto de Sabri.

L’objectif de la marche était donc politique. Il s’agissait de dénoncer les violences policières systématiques qui s’exercent dans les quartiers populaires. Les habitants du quartier questionnent largement les enquêtes de policiers ayant pour objet d’autres policiers. A l’image de Dounia, habitante du quartier qui connaissait Sabri, venue marcher, elle s’est exprimée pour Révolution Permanente : « C’est un petit que je connaissais. C’est une injustice, car il y a sans doute violence policière. Il faut qu’on arrête de se taire face à tout ça ». Elle remet ainsi en cause la version de police, « la police ne peut pas enquêter sur la police, on ne peut pas être juge et partie »

Le rassemblement a été organisé par la famille et les proches de Sabri avec l’aide de nombreux jeunes et habitants du quartier de la ZUP d’Argenteuil où vivait le jeune homme. Les organisateurs ont mis à disposition des masques et du gel hydro-alcoolique.

Différentes personnalités et figures des quartiers populaires étaient présentes, comme Assa Traoré et Youssef Brakni du Comité Adama, Omar Slaouti tête de liste à Argenteuil pour la liste Argenteuil commune citoyenne égalité.s), Vikash Dhorasoo (ex footballeur international aujourd’hui militant politique et associatif) ou encore Taha Bouhafs (journaliste).

Le cortège a démarré aux alentours de 16h au départ de la cité champagne et est passé par le lieu où Sabri a trouvé la mort. La marche a duré près de 2h30 sous un soleil de plomb.

Crédits photo : Victor Tassel pour Le Parisien

Elle s’est terminée au niveau de l’appartement de la famille dans le quartier de la ZUP où un lâché de ballons blancs a été réalisé sous les applaudissement et le nom de « Sabri, Sabri, Sabri » scandé par les manifestants.

Sur de nombreux murs de la ville pouvait lire l’inscription « Justice pour Sabri ».

Une prise de parole a été organisée pour clôturer la manifestation dans le parc des Cerisiers. Khalid, le père de Sabri ainsi que des proches de la victime se sont exprimés en son honneur. Yussuf Traoré, frère d’Adama Traoré, s’est également exprimé autour du combat que mène sa famille avec le Comité Adama depuis 4 ans pour obtenir justice et vérité sur la mort d’Adama. Adama Traoré avait trouvé la mort en 2016 à la suite d’une interpellation policière où les policiers ont utilisé la technique du plaquage ventral. La famille Traoré fait d’ailleurs l’objet d’une répression judiciaire et politique abjecte et est régulièrement envoyée devant les tribunaux afin de les faire taire.

Mara Kanté, militant de quartier populaire qui avait été inculpé à tort après des révoltes en 2007 a aussi pris la parole. Il a notamment appelé à continuer la mobilisation et à l’inscrire dans la durée, à faire « de la politique sincère pour les prolétaires » comme seul moyen de répondre à ces violences et à l’oppression dont font l’objet les quartiers populaires.

« Lumière[s] » est au pluriel nous rappelle un des organisateurs. Car l’objectif est aussi de mettre les lumières sur les trop nombreuses morts liées à la police dans les quartiers populaires ainsi que sur les violences policières qui s’y exercent de manière systématique.

En France, depuis des décennies les habitants des quartiers populaires font l’objet d’une répression policière systématique qui entraîne la mort d’une quinzaine de personnes par an. Les victimes de ces violences sont majoritairement des jeunes racisé.es. A l’image de Zyed & Bouna en 2005, Lamine Dieng en 2007 ou plus récemment Adama Traoré en 2016. Ces violences illustrent le traitement différencié et le racisme d’État dont les habitants de quartiers populaires sont les cibles privilégiées.

Ces violences s’accélèrent brutalement depuis le début de la crise sanitaire. Depuis la mise en place de l’état d’urgence sanitaire, 12 personnes sont mortes après avoir croisé la police en l’espace de deux mois. Sans compter les nombreux blessés graves suite à des interpellations des forces de l’ordre. Comme Mouldi à Villeneuve la Garenne qui a subi une fracture de la jambe suite à une collision avec une voiture de police banalisée.

Dans la soirée suivant l’après-midi du rassemblement, un imposant dispositif de contrôle policier a été mis en place avec la présence de nombreux CRS :

Cette répression violente s’inscrit dans un système d’exploitation et d’oppression par lequel les habitants des quartiers populaire subissent une véritable triple peine. En première ligne des emplois essentiels qui ont toujours tournés, en première ligne de la précarité et en première ligne de la répression policière.

 
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