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La Izquierda Diario
4 de juin de 2020 Twitter Faceboock

Racisme et impunité de la police
« Ennemis de la race blanche », « nègres », « bougnoules »... des policiers mis en cause pour leurs échanges racistes
Cléo Rivierre

Il s’agit d’une affaire révélée par Mediapart et ARTE Radio : plusieurs policiers de Rouen sont mis en cause pour leurs échanges privés racistes, sexistes, homophobes, etc., – leurs propos relèvent parfois du suprémacisme blanc. Ils sont toujours en poste aujourd’hui, cinq mois après avoir été dénoncés.

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Crédit photo : Orléans AGENCE / www.larep.fr (illustration)

C’est une affaire révélée par Mediapart et ARTE Radio. Un policier noir en poste à Rouen a eu accès à des échanges privés, sur un groupe Whatsapp, entre plusieurs de ses collègues. Ces échanges sont accablants en tous points : racisme, sexisme, LGBT-phobie... allant jusqu’à des discours qui relèvent clairement suprémacisme blanc ou des discours néo-nazis. Il s’agit d’un très grand nombre de messages audios, échangés sur plusieurs mois. Le policier a reporté les faits à sa hiérarchie puis a déposé plainte. C’était en décembre 2019. À l’heure actuelle, les policiers en question sont toujours en poste et travaillent au contact du public, en attendant leur conseil de discipline, dont la date n’est pas encore connue. Ils auraient simplement été changés de poste au sein du même service.

ARTE Radio a rendu public un document audio où l’on peut entendre plusieurs extraits des audios en question. Dans un article, Mediapart en relaye certains des passages les plus accablants : “Persuadés de l’imminence d’une « guerre raciale », pour laquelle ils affirmaient stocker des armes, ces policiers (titulaires et « adjoints de sécurité », les emplois-jeunes de la police) accablaient d’injures tous les « ennemis de la race blanche » : les femmes (des « putes », même les policières), les Noirs (des « nègres »), les Arabes (des « bougnoules »), les gens du voyage (des « putain de manouches »), les Juifs (des « fils de pute » qui « dirigent le pays » en compagnie des « gauchistes »), les homosexuels (des « pédés »). « Pour vivre heureux, vivons casher », plaisantaient entre eux ces policiers, soucieux de rester discrets sur leurs échanges. « On est fichés F, F comme fachosphère »”.

Alex, le policier noir qui a dénoncé ces discours après les avoir découverts grâce à un collègue, est directement visé par certains des propos. Ainsi, “Un adjoint de sécurité de 19 ans critique ainsi son « travail de nègre »”. Les propos relèvent clairement du registre néo-nazi : “Avec une certaine constance, ces policiers s’en prennent aux « filles qui aiment bien les bâtards » plutôt que « les mâles blancs », avec une explication toute trouvée. « Vu que c’est les Juifs et les gauchistes qui dirigent ce pays, on fait en sorte que la fille aille vers le bougnoule ou le nègre. En Angleterre ou en Allemagne, c’est pas comme ça, t’éduques ta fille pour qu’elle continue dans la race aryenne »” ; ou encore des “saillies sur « la race blanche », « les chambres à air » (pour désigner les chambres à gaz) ou la nécessité de « purger » la France”.

Les personnes racisées ne sont pas le seules victimes de leurs propos : “Quant aux « fils de pute de la gauche », ils ne méritent rien d’autre qu’une « balle dans la tête ». « T’es une merde de gauche, tu mérites de mourir. Poutine il s’occuperait de ta gueule vite fait bien fait. Vivement la guerre civile, vivement l’effondrement, y a pas que la diversité qui va prendre cher, la gauche aussi, il va vraiment falloir éliminer ces fils de pute. Un jour ou l’autre, il va vraiment falloir que ces enculés paient »”.

Les policiers racontent d’ailleurs disposer d’un certain nombre d’armes ou échangent sur celles qu’ils désirent acquérir, puis relatent leurs objectifs : “Là où nous, les nationalistes racialistes, on doit être assez malins, c’est laisser le combat intersectionnel les obliger à s’exterminer entre eux. Ils vont déjà se séparer entre pro-arabes et pro-juifs, se bouffer la gueule, par exemple Mélenchon est très pro-arabe. Y a les féministes, tu sais pas sur quelle fesse elles dansent, ces grosses putes. Les pédés LGBT tout ça, machin-bidule, c’est pareil, les musulmans vont s’en charger. Quand les féministes, les LGBT, les juifs, les bougnoules, les nègres qui sont pas musulmans vont commencer à se bouffer la gueule entre eux, tu manges ton popcorn, tu regardes la télé, tu aiguises tes armes et quand ils se sont bien affaiblis tu achèves les bêtes”.

Il est à souligner que les femmes ne sont pas non plus épargnées par leurs diatribes. Par exemple, dans le document audio d’ARTE Radio, l’on peut entendre les propos suivants : “après tant pis, de toute façon les gonzesses ne veulent pas de mec bien donc tant pis. Elles prennent le nègre qui les saute et puis qui les lâche après une fois qu’il a trouvé mieux. Tant pis pour elle, qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Y a 140 féminicides... tant pis les gars !”.

Si Christophe Castaner a déclaré ce mercredi au Sénat que “chaque faute, chaque excès, chaque mot, y compris des expressions racistes” ferait l’objet “d’une enquête, d’une décision, d’une sanction”, c’est bien car il est mis sous pression par l’ampleur de la mobilisation et du débat public au sujet des violences policières racistes. Mais bien souvent, les crimes ou les propos racistes, homophobes ou sexistes des policiers restent impunis. C’est, par exemple, ce que montre la dernière expertise médicale raciste et mensongère sur la mort d’Adama Traoré, destinée une fois de plus à disculper les agents de police coupables de sa mort.

Dans le cas des policiers de Rouen, Mediapart explique que « Leurs téléphones n’ont pas été saisis et ils se sont vantés, avant leur convocation, d’avoir déjà effacé une grande partie des messages ». En effet, selon le journal, “S’ils s’autoqualifient parfois de « fascistes » ou de « gros fachos », les agents ont bien conscience que leurs échanges ne doivent pas être rendus publics. L’un des messages rappelle que leur groupe privé n’est ouvert « qu’aux hommes, et tous les hommes de l’unité n’y ont pas forcément accès »”.

Didier Lallement a récemment déclaré, en réaction à la prise à partie de policiers noirs par des manifestants lors de la manifestation pour Adama Traoré à Paris, qu’ "Il n’y a pas de race dans la police, pas plus que de racisés ou d’oppresseurs racistes. Il y a des fonctionnaires qui s’engagent pour la liberté, l’égalité et la fraternité et cela au quotidien !" Contrairement à ces manipulations grossières, le racisme est bel et bien endémique dans la police française. Ce que cette affaire contribue à démontrer, c’est que le racisme dans l’institution policière n’est pas une exception malheureuse, comme le dénoncent les manifestants en France, aux États-Unis et ailleurs ces derniers jours. Cette affaire démontre aussi l’impunité dont bénéficient les policiers qui se rendent coupables de gestes et de discours racistes.

Si les policiers états-uniens ont pu tuer George Floyd, si les policiers français ont pu tuer Adama Traoré, si ces policiers de Rouen ont pu tenir de tels propos, c’est car la police en elle-même est une institution dont la fonction de maintenir l’ « ordre » social tel qu’il est actuellement. Or, cet « ordre » social aujourd’hui repose sur l’exploitation d’une majorité de la population par une minorité ; ainsi que sur l’oppression des personnes racisées, des personnes LGBTI, des femmes, etc. Il s’agit d’un système à part entière, dont l’État et la police sont garants.

 
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