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La Izquierda Diario
24 de novembre de 2020 Twitter Faceboock

Contre l’union nationale
Tribune. Les travailleur·ses·x des arts rejettent “l’union nationale” de Macron

Après sa loi sur le “séparatisme”, le gouvernement s’est saisi du drame de Conflans pour poursuivre sa politique répressive, raciste et islamophobe. Aujourd’hui, il entérine son tournant autoritaire avec la loi sécurité globale qui voudrait renforcer l’impunité policière. Les artistes ne seront pas les agent·es de la reproduction idéologique des valeurs capitalistes, patriarcales et coloniales.

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Crédits photo : THOMAS COEX / AFP

Initialement publié sur Mediapart.

Face au crime abominable commis à Conflans, nous apportons notre solidarité aux proches de Samuel Paty et à la communauté enseignante en deuil.
Nous condamnons fermement le gouvernement qui voudrait instrumentaliser cette douleur et utiliser cette tragédie à des fins racistes et islamophobes. Dans la lignée de sa loi sur le “séparatisme”, qui visait déjà clairement la communauté musulmane, le gouvernement de Macron entend se servir de ce drame pour poursuivre sa politique répressive.

Le ministre de l’intérieur a ainsi annoncé avoir fait perquisitionner les logements d’une “dizaine d’individus” qui n’ont pas un “lien forcément avec l’enquête mais à qui nous avons envie de faire passer un message”. Il a affirmé vouloir dissoudre le CCIF et l’ONG Baraka City, et ses menaces qui se sont aujourd’hui concrétisées. S’en sont suivies ces déclarations de Darmanin, qui méritent d’être citées : “Moi ça m’a toujours choqué de rentrer dans un hypermarché et de voir un rayon de telle cuisine communautaire et de telle autre à côté. C’est comme ça que ça commence le communautarisme.”

Le message est clair : en empruntant les recours et les discours de l’extrême-droite, le gouvernement poursuit ses offensives racistes et islamophobes en amalgamant musulman et terroriste, et justifie ainsi sa politique répressive.

Dans ce contexte, nous avons constaté avec stupeur un appel, lancé “à l’ensemble du monde des arts vivants", qui se fait le relais de l’idéologie nauséabonde du gouvernement, sous couvert de défense de la liberté d’expression.

L’appel nous explique que ”Au travers de Samuel Paty c’est la liberté d’expression qui a été attaquée mais aussi l’esprit critique et les valeurs républicaines de l’émancipation laïque”.

Mais de quelles valeurs républicaines est-il réellement question ?

Celles qui ne réservent la “liberté d’expression” et la place de s’exprimer qu’à une caste dominante, sous couvert d’un pseudo-universalisme dont elle est l’unique bénéficiaire ? Celles qui réduisent la laïcité à un combat contre l’Islam dans son entier ? Ou encore celles qui appellent de leurs vœux la fameuse “tenue républicaine” de Blanquer et le contrôle des corps ? Ni voilées, ni dévoilées, sous peine d’être accusées d’attiser les violences dont elles sont pourtant victimes.
Ces “valeurs républicaines” à géométrie variable sont convoquées autant pour réprimer les libertés que pour les défendre. Et si ce sont là celles qu’un certain “monde de l’art” nous demande de défendre, il nous paraît au contraire nécessaire et urgent de les dénoncer. S’il faut assigner les artistes à un rôle, ce serait davantage celui de questionner, de proposer et montrer des alternatives aux discours dominants.

Quant à “l’émancipation laïque” dans la manière dont l’entend le gouvernement, il ne s’agit ni plus ni moins que d’un projet d’« union » raciste qui, sous couvert d’une prétendue laïcité, a pour seul but de s’attaquer aux musulmans ou présumés comme tels. L’émancipation que nous cherchons à construire n’est pas celle de ce gouvernement, qui après la loi "séparatisme" visant la communauté musulmane, entérine son tournant autoritaire avec la loi LPR qui criminalise les luttes étudiantes et la loi "sécurité globale" qui voudrait nous imposer une surveillance accrue et un renforcement de l’impunité policière. Elle se trouve du côté des exploité·es·x et des opprimé·es·x, chez les élèves et les professeur·es qui luttent aujourd’hui pour des conditions sanitaires de travail et d’apprentissage correctes que le gouvernement s’est prouvé incapable de garantir.

Car en effet, le contexte social est explosif. Il y a des choses qui ne passent plus : « on se lève et on se casse » des César, on ne tolère plus les pratiques de « black face » sur les plateaux, on ne tolère plus le harcèlement ou l’humiliation. Dénoncer un “excès de morale” n’est qu’une tentative de dépolitiser le débat autour du racisme et des abus sexistes et sexuels dans la culture. Faire passer pour des puritains ceux qui vont à l’encontre de la doxa raciste ou brisent l’omerta sur les violences sexistes et sexuelles n’est que le reflet de la peur de ceux qui ont tout à gagner à sauvegarder ce système : car ce que remettent en question ces éclats anti-racistes et féministes au sein des institutions culturelles, ce sont les institutions racistes et sexistes du capitalisme. Nous ne voulons pas d’un art ou d’une culture qui soient les garants de l’ordre établi.

Si nos institutions culturelles, massivement signataires de cet appel, veulent une union avec un gouvernement qui profite de cette tragédie pour cibler des militant·es antiracistes, elles se trouvent complices d’une islamophobie d’État.
Les artistes ne seront ni le verrou, ni les agent·es·x de la reproduction idéologique des valeurs patriarcales et coloniales.

Nous appelons tous·tes les travailleur·ses·x de la culture à se joindre à nous, à refuser l’union nationale du gouvernement et à dénoncer ce saut répressif, raciste et islamophobe !

Signataires :

La commission culture du NPA
Art En Grève Paris Banlieue
Art En Grève Rouen
Art En Grève Lyon
Gilets Jaunes intermittent·e·s chômeur·e·s précaires
Décoloniser les Arts
La Permanence

 
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