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La Izquierda Diario
22 de décembre de 2020 Twitter Faceboock

Pandémie
Nouvelle souche de Covid au Royaume-Uni : le résultat d’une politique sanitaire désastreuse
Joachim Bertin

L’apparition et le développement d’une nouvelle souche du Sars-Cov-2, qui serait 70 % plus contagieuse, ont créé la panique en Angleterre : les autres pays suspendent les vols, les ports sont fermés, les vacances de Noël annulées pour un peu plus de 20 millions de personnes. La gestion de Boris Johnson et des conservateurs était déjà une calamité, la nouvelle mutation ne vient que le montrer plus dramatiquement.

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Crédits photo : AFP

L’histoire joue des tours parfois sacrément ironique. La bourgeoisie anglaise, qui, au cours de son essor industriel a ouvert par la force de ses canons tant de frontières pour y faire pénétrer « librement » ses capitaux, cherche depuis quatre longues années à remettre en service ses postes de douane. Empêtrée dans un Brexit dont elle a du mal à trouver l’issue, c’est une nouvelle souche de coronavirus plus contagieuse, symptôme de la décadence capitaliste actuelle qui vient ouvrir une crise politique et sanitaire XXL au Royaume-Uni. Alors que Boris Johnson montrait les muscles pour fermer ses frontières dans un effort réactionnaire, c’est sa politique sanitaire, tout autant réactionnaire, qui fait fermer à un certain nombre d’États leurs frontières, et ce sur toute la planète.

Le bilan de Boris Johnson dans cette crise s’élève aujourd’hui à presque 70.000 morts. Si les rois, par un simple toucher parait-il, soignaient les aveugles et les lépreux, en serrant des mains à-tout-va, Boris Johnson n’a réussi qu’à finir en réanimation. Sa mésaventure personnelle, il a voulu la transposer à tout un pays. Ainsi, depuis des mois, la pandémie frappe durement le pays et principalement les classes populaires, les travailleurs précaires. Le Royaume-Uni est ravagé par les inégalités que les vagues d’austérité successives ont fait exploser. Le système de santé a eu toutes les peines du monde à faire face à la pandémie, les allocations sociales avaient déjà été taillées à la hache. En termes d’espérance de vie, déjà avant la pandémie les inégalités étaient criantes, des dizaines d’années d’espérance de vie pouvant séparer un riche londonien des beaux-quartiers et des habitants de villes désertées par l’industrie et où les services publics ont petit à petit fermé leurs portes. Le chômage reste. C’est sur cette situation que s’est posée la pandémie, celle que retranscrivent les films de Ken Loach, face à la destruction des conditions de travail, face à l’exploitation jusqu’à la mort, aux drames familiaux imposés par la pauvreté.

« Business as usual », les capitalistes ont continué à faire des profits grâce aux travailleurs envoyés en première ligne, parfois licenciés depuis Zoom pour respecter les gestes barrière. Boris Johnson et les conservateurs, tout autant que l’opposition docile du Parti travailliste, ont refusé de mettre en place les mesures nécessaires : fermeture des activités non-essentielles ou reconversion de ces activités comme dans l’industrie pour combattre la pandémie, investissements et embauches massifs dans la santé publique (hôpital, test, traçage aides à domicile), nationalisation du système privé de santé et des moyens de recherche comme les vaccins etc. Partout le même constat, seuls les travailleurs peuvent s’emparer de ces tâches et les imposer comme des mesures d’urgence pour leur santé et celles de leurs proches. Autrement, les capitalistes, face aux crises, ne connaissent que les dystopies : licenciements, gestion sanitaire par la matraque, contrôle social etc.

La nouvelle souche a été observée pour la première fois il y a un peu plus de trois mois dans le Kent au Sud de l’Angleterre. Nommée VUI-202012/01, elle y est devenue majoritaire en quelques semaines, tout comme à Londres. Les premiers cas ont été détectés en Europe, notamment en Italie, et en Belgique. Il est donc hautement probable que la circulation de cette nouvelle souche soit effective dans de larges zones du continent.

Le Royaume-Uni est divisé en zones de niveaux d’alerte. Pour un peu plus de 20 millions de personnes, c’est désormais le quatrième niveau d’alerte qui est appliqué, notamment à Londres et dans le Sud de l’Angleterre, c’est-à-dire un confinement strict avec la fermeture des commerces non-essentiels. Il n’est en revanche toujours pas clair si les écoles fermeront à la rentrée. Johnson, qui avait jugé « inhumain » de priver la population de Noël, se retrouve maintenant à revenir sur son plan de fêtes de cinq jours avec trois foyers qui auraient pu se mélanger. A la place, ce seront les rues pleines de flics pour le Nouvel an et l’annulation des fêtes.

L’annonce par la France de l’interdiction des échanges avec la Grande-Bretagne a créé une désorganisation massive des transports. Chaque jour, ce sont environ 10.000 camions qui transitent par le port de Douvres et qui se sont retrouvés bloqués. Les commandes de Noël, et celles pour faire face au Brexit (certaines entreprises commandent massivement pour stocker avant l’apparition de tarifs douaniers dans 10 jours) créaient une hausse du commerce. Certaines entreprises annoncent un désastre économique, en particulier pour les produits périssables. Dans cette histoire, relativement, les dommages sont encore plus importants pour les petits commerçants et les artisans, qui ont déjà subi fortement la crise, et avec des reins toujours moins solides. Les actions des compagnies aériennes et des entreprises aéronautique britanniques ont chuté fortement (de plus de 10 % pour Rolls-Royce, Easy-Jet ou Britsh Airways), et les marchés européens ont accueilli avec crainte cette annonce d’un renouveau de l’épidémie qui rappelle, par l’urgence incontrôlée des mesures prises, certains aspects du mois de mars.

La gestion sanitaire par les capitalistes, et l’exemple britannique est frappant, est réglée par l’imprévision, le court terme et la volonté absolue de sauver les profits. Cette politique a occasionné plus d’un demi-million de morts en Europe. De ce point de vue, l’apparition d’une nouvelle souche du Sars-Cov-2 plus transmissible (qui n’est apparemment pas plus mortel, mais qui créera donc plus d’hospitalisations et plus de cas graves) et qui tend à devenir majoritaire, va exacerber les problèmes déjà existants et reposer la question de la solidité d’un système de santé rendu exsangue par les Thatcher, Blair et leurs émules. De même, l’annonce de la fin de certaines mesures de soutien à l’économie fait craindre de nombreux licenciements.

Des voix demandent un nouveau report du Brexit pour reprendre les discussions, une fois que le Royaume-Uni sera sorti du marasme sanitaire, qui pend au nez de tous les autres pays. En effet, tous les gouvernements européens qui se réjouissent d’un peu de coordination sur la question du vaccin (vaccin qui ne semble pas être compromis pour le moment par cette nouvelle souche) étaient déjà bien raccords pour faire payer la crise sanitaire et la crise économique aux travailleuses et aux travailleurs. La perspective des capitalistes, c’est plus de morts, et plus de restrictions des libertés pour régler leur gestion erratique de la crise. Pour les classes populaires et les travailleurs anglais, comme dans le monde entier, une lutte pour la vie est plus que jamais à l’ordre du jour. Les dominants ont largement donné la preuve de leur incapacité à gérer ces crises. Le seul vaccin qui puisse soigner nos sociétés sera une lutte des exploités et des opprimés pour imposer une gestion sanitaire qui prenne la main sur l’économie pour la mettre au service du plus grand nombre, pour sauver des vies.

 
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