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La Izquierda Diario
14 de janvier de 2021 Twitter Faceboock

#DuFricPourLesFacs
Les étudiants méprisés par le gouvernement : il est temps de relever la tête !
Anna Ky
Philomène Rozan

Alors que le mal-être des étudiants s’affiche de plus en plus sur les réseaux sociaux et dans les médias, les annonces du gouvernement marquent un nouveau cap franchi dans le mépris de ces jeunes en détresse. Nous n’avons rien à attendre de Vidal et Macron : luttons pour imposer de véritables mesures face à la crise.

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Crédits photo : LP/Philippe de Poulpiquet

La jeunesse confinée depuis des mois : la colère gronde

Depuis le début des sessions de partiels de janvier, les témoignages d’étudiants en souffrance se multiplient et la colère qui gronde depuis des mois est entrain de faire surface. Après de longues semaines confinés, coupés de toute vie sociale, le nombre de personnes dans un état dépressif a augmenté de plus 16 points chez les 18-24 ans et de plus 15 points chez les 25-34 ans selon une étude de Santé Publique France.

L’expression la plus tragique de cette situation se trouve dans les deux tentatives de suicide dans des résidences universitaire à Lyon ces derniers jours. Le premier est étudiant en droit à Lyon 3 et la seconde, dont on a appris la tentative de suicide le 13 janvier, est une étudiante étrangère dont RTL explique qu’elle est « très seule » et qu(elle « n’a pas pu rentrer chez elle depuis de très longs mois. ». Sans que l’on ne sache dans les deux cas quel a été l’élément déclencheur de ces drames, il est certain que le sentiment de mal-être est largement répandu dans la jeunesse.

Et pour cause la fermeture des facs depuis le mois de mars, à peine ré-ouvertes quelques semaines en septembre, a conduit à un isolement très prononcé dans la jeunesse comme en témoigne auprès de Loopsider Amélie étudiante infirmière de 20 ans : « Je n’ai plus de socialibilité. Je ne vois plus personnes, plus du tout. Ca fait des mois que je n’ai vu personne. C’est très dur  ».

Les partiels : la goutte d’eau qui fait déborder le vase

Mais après des mois passés en distanciel, les directions de facs ont décidé de rouvrir quelques salles… A l’écoute des étudiants ? Non il s’agit bien pour eux de faire passer des partiels, d’assurer des notes pour que la sélection à la fin de l’année ait lieu. On sent bien là le mépris d’un gouvernement pour qui les conditions d’études largement dégradées – on comptait déjà au premier confinement 1 étudiant sur 6 en décrochage scolaire – n’ont aucune importance et qui décide de laisser les facs fermées tout en faisant le choix d’évaluer. Ils vont ainsi renforcer une sélection qui va laisser de côté celles et ceux qui vivent dans des conditions précaires : 9m2 pour vivre et étudier, difficulté d’accès à la wi-fi, matériel informatique vétuste ou inexistant, etc.

Et les partiels en présentiel ont été l’affront de trop que le gouvernement et les directions d’université ont fait aux étudiants. Dès le début de la semaine dernière à Paris 4, Paris 12 et Bordeaux différents sites ont été bloqués pour exiger que les partiels se tiennent en distanciel. Le #MentalBreakup qui est monté jusqu’en Top1 sur Twitter la semaine dernière a été lancé par des étudiants en médecine dont les partiels ont été annulés et reportés après une gestion déplorable.

En début de semaine c’est le #EtudiantsFantomes qui a percé sur les réseaux sociaux avec quelques dizaines de milliers de tweets. La gestion pro-patronale qui a conduit le gouvernement à privilégier l’économie et les profits du grand patronat tout en méprisant la vie d’une grande partie de la population, et notamment de la jeunesse a été dénoncée à plusieurs reprises.

« Ça fait deux semestres qu’on est en distanciel le prochain c’est sûr on va pas tenir » c’est comme ça que se pose aujourd’hui pour beaucoup d’étudiants les prochain temps : la détresse ressentie pose pour beaucoup l’urgence d’une réouverture des facs.

Des annonces gouvernementales qui ne prévoient rien pour les étudiants : le mépris à son comble

Dans ce contexte, nombre d’étudiants attendaient les annonces gouvernementales de ce jeudi soir, que les médias avaient présentées comme pensées particulièrement à destination des étudiants, et qui comptait exceptionnellement Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, parmi les ministres présents. Mais après une gestion strictement répressive de la colère étudiante contre les partiels en présentiel, les annonces, et l’absence de véritables mesures à destination de la jeunesse, ont fait l’effet d’une nouvelle douche froide pour beaucoup d’étudiants.

Entre autres mesures cosmétiques, la possibilité pour les étudiants en première année de revenir en cours en demi-groupes une semaine sur deux à partir du 25 janvier : une mesure déjà connue et partiellement appliquée dans certaines facs mais dont la mise en pratique ne concerne qu’une minorité d’étudiants et qui est pratiquement impossible à mettre en place dans de bonnes conditions (surcharge de travail pour les travailleurs administratifs et les enseignants, casse-tête concernant des emplois du temps hybrides...). Autre mesure méprisante, l’embauche précaire de 20 000 étudiants tuteurs pour accompagner leurs camarades en difficulté : ce ne sont pas de plus de contrats précaires dont on a besoin dans l’enseignement supérieur, c’est de plus d’enseignants et de personnel administratif !

Mais la mesure qui a certainement le plus énervé les étudiants, c’est l’annonce du doublement des effectifs de psychologues dans les universités. Dans la plupart des campus, il n’y a qu’un ou deux psychologue pour des dizaines de milliers d’étudiants (un pour 30 000 en moyenne). Le doublement de ces effectifs est absolument ridicule et insuffisant.

En réalité, comme mesure d’urgence pour répondre à la détresse des étudiants, ce sont de véritables centre de soutien et de suivi psychologique qu’il faut mettre en place, en investissant massivement dans les hôpitaux et le domaine médico-social, qui est actuellement incapable de gérer le flux de demandes de rendez-vous.

Mais surtout, et contrairement à ce que veut faire croire le gouvernement, ce n’est pas tant la crise sanitaire en tant que telle qui entraîne un tel malaise dans la jeunesse, mais bien plutôt sa gestion désastreuse par le gouvernement. En effet, pour toute réponse, les étudiants se sont vus annoncer qu’un couvre-feu national était instauré à partir de 18h. En d’autres termes, face à des étudiants angoissés par un avenir plus qu’incertain face au taux de chômage et la fermeture des universités, par un isolement croissant, le gouvernement répond en affirmant que notre seul droit, c’est celui de rester enfermer dans un studio de 9m² face à un écran d’ordinateur ou d’aller travailler, sans aucune possibilité de sortir de chez soi. Et pour ceux qui auraient la « chance » de pouvoir se rendre sur leur campus, Vidal a annoncé qu’ils n’auraient pas le droit de manger sur place pour éviter le brassage des étudiants. En d’autres termes, les universités étant bien souvent excentrées, les étudiants n’auront d’autre choix que de jeûner lors de leur pause méridienne.

Réouverture des facs : dans quelles conditions ?

Mais alors que les chiffres de contamination sont en hausse et qu’un variant très contagieux circule activement dans une partie de l’Europe et menace la France : le retour dans les facs, s’il est nécessaire ne peut se faire à n’importe quel prix. Il n’est pas question que les facs deviennent des clusters ou de devoir choisir entre étudier dans des conditions dignes ou risquer le décrochage scolaire et les conséquences très dures de l’isolement. Il existe une sortie au dilemme cornélien qu’impose le gouvernement par la gestion catastrophique de la crise sanitaire : exiger un investissement massif dans les facs pour un plan sanitaire à la hauteur de la situation, dans la lignée de ce que revendiquaient à l’automne les enseignants et lycéens pour résoudre le manque de moyens criminels dans les établissements scolaires.

Pour assurer la distanciation sociale il faut réquisitionner les trop nombreux bâtiments vides pour les reconvertir en salle de classe et permettre de diviser les groupes. Le dégel des postes, la titularisation des personnels précaires et l’embauche massive d’enseignants et Biatss à salaire décent est un préalable à la réouverture des universités.

Le personnel du nettoyage joue un rôle clef dans la lutte contre la diffusion du virus et doit être doté de matériel conséquent de protection et de désinfection, les équipes doivent être renforcées, internalisées et les salaires augmentés.

Il est également nécessaire d’installer des centres de dépistages sur les campus et d’avoir la plus grande transparence sur les cas pour éviter tout cluster. En parallèle et pour faire face à une troisième vague beaucoup plus contagieuse, il est nécessaire d’augmenter les budgets des hôpitaux publics pour permettre la prise en charge des malades du Covid sans la déprogrammation des autres services par manque de moyens, y compris les soins psychiatriques.

Pour mettre en place ces mesures il va falloir augmenter les budgets de la fac, à la baisse ces dernières années, et prendre l’argent là où il y en a, dans les mains des capitalistes. Et alors que le gouvernement main dans la mains avec les directions de facs orchestre non seulement la casse de l’université depuis des années mais également la situation scandaleuse dans laquelle vit et étudie actuellement une partie de la jeunesse, il est nécessaire que le plan sanitaire lié à la réouverture des facs soient pris en charge et organisé par les travailleurs et étudiants de la fac.

Plus largement, la colère qui s’exprime dans la jeunesse, depuis les réseaux sociaux jusque devant les centres d’examens avec les blocus étudiant, témoigne en pointillé du rejet de l’avenir qui nous est promis avec un chômage de masse et une précarité croissante. Pour répondre sur le fond à ce mal-être qui est loin de se circonscrire aux partiels en présentiel et ne témoigne pas simplement d’une fragilité psychologique particulière de la jeunesse, il faut de véritables solutions, bien loin des mesures cosmétiques du gouvernement. Pour sortir de l’angoisse liée à l’avenir et à la précarité, il faut se battre pour le retrait pur et simple de toutes les lois de sélection à l’université, pour l’interdiction des licenciements et pour qu’un revenu à hauteur du SMIC soit alloué à l’ensemble des étudiants – indépendamment du fait qu’ils soient boursiers ou non – pour leur permettre de subvenir à leurs besoins. Il faut également imposer des protocoles sanitaires stricts dans les universités, et exiger un investissement massif dans l’Enseignement supérieur et dans le secteur de la santé, pour pouvoir affronter la crise sanitaire sans que les facs restent fermées.

Mais face à un gouvernement qui persiste et signe à ne mettre en oeuvre que des mesures coercitives ou de façade, il faut transformer la détresse en rage, et lutter avec acharnement pour imposer ce programme et ces mesures. Les enseignants et les lycéens l’ont prouvé en décembre : seule la lutte peut payer, pour imposer des protocoles sanitaires à la hauteur de la crise dans les établissements scolaires. Pour ce faire, il faut commencer à construire la date du 26 janvier, où les organisations syndicales de l’éducation appellent à une importante journée de grève et de mobilisation. Les étudiants ont tout à gagner à joindre leurs forces pour arracher des mesures qui permettront une sortie de crise par en haut et un avenir meilleur.

 
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